. "13656" . . . "La laize est conserv\u00E9e avec ses deux lisi\u00E8res. Le d\u00E9cor est con\u00E7u selon une sym\u00E9trie bilat\u00E9rale parfaite sur toute sa largeur mesurant un peu plus de cinquante-quatre centim\u00E8tres. Le rapport de dessin mesure, en hauteur, quarante-cinq centim\u00E8tres et demi, et, en largeur,\u00A0cinquante-deux centim\u00E8tres et demi, soit un chemin \u00E0 pointe double en retour. Le d\u00E9cor est compos\u00E9 de deux rinceaux sinueux oppos\u00E9s compos\u00E9s de campanules tombantes bleut\u00E9es, d\u2019an\u00E9mones largement \u00E9panouies au c\u0153ur bleu et aux p\u00E9tales rouges et blancs somm\u00E9es d\u2019une fleur jaune de brom\u00E9liac\u00E9es, c\u2019est-\u00E0-dire de la famille des ananas vraisemblablement import\u00E9s d\u2019Am\u00E9rique du Sud et d\u00E9gust\u00E9s pour la premi\u00E8re fois en France, \u00E0 la table de Louis XV en 1733. Le fond de l\u2019\u00E9toffe est travaill\u00E9 \u00E0 la mani\u00E8re d\u2019un r\u00E9seau de treillage alv\u00E9olaire dont de larges crev\u00E9s ouvrent sur un paysage abritant une architecture de fantaisie. La construction de ces m\u00E9daillons est r\u00E9alis\u00E9e en perspective centr\u00E9e \u00E0 un seul point de fuite, respectant le principe de sym\u00E9trie parfaite de l\u2019ensemble du motif. Sur un mur de douve trilob\u00E9 d\u00E9nu\u00E9 d\u2019embarcad\u00E8re, se d\u00E9ploie une architecture dont le corps de b\u00E2timent principal est coiff\u00E9 d\u2019un toit terrasse bord\u00E9 d\u2019une balustrade. Au premier \u00E9tage, cinq trav\u00E9es de fen\u00EAtres rythment la fa\u00E7ade et au rez-de-chauss\u00E9e, une arcade compos\u00E9e de trois arcs et quatre piliers forme le perron couvert d\u2019un toit en appentis. De part et d\u2019autre, deux ailes de b\u00E2timents apparemment peu saillantes se terminent en tours carr\u00E9es couronn\u00E9es d\u2019une toiture \u00E0 l\u2019imp\u00E9riale orn\u00E9e d\u2019une suite de trois boules. Cette architecture est ceinte de grands arbres feuillus dont on distingue deux essences, peut-\u00EAtre de ch\u00EAne et de h\u00EAtre. L\u2019\u00EElot qui se refl\u00E8te sur une eau calme est lui-m\u00EAme bord\u00E9 d\u2019une for\u00EAt verdoyante. Au premier plan, quelques souches aux feuilles lob\u00E9es, de la m\u00EAme couleur que le fond, cr\u00E9ent un effet de profondeur. \nCette \u00E9toffe a \u00E9t\u00E9 acquise aupr\u00E8s de M. Bouillin de Lyon en 1889. Elle est inscrite \u00E0 l\u2019inventaire avec la description suivante : \u00AB un beau morceau Louis XIV, \u00E0 maisons \u00BB. Raymond Cox, en 1900, dans son ouvrage L\u2019Art de d\u00E9corer les tissus d\u2019apr\u00E8s les collections du mus\u00E9e historique de la Chambre de Commerce de Lyon, la reproduit en partie pour la premi\u00E8re fois dans son chapitre d\u00E9di\u00E9 \u00E0 l\u2019\u00E9poque de Louis XIV qu\u2019il caract\u00E9rise ainsi : \u00AB Avec le XVIIe Si\u00E8cle, la sup\u00E9riorit\u00E9 fran\u00E7aise s\u2019affirme. Lyon est le principal cadre de production. \u00C0 la confusion des compositions italiennes notre pays oppose l\u2019expression claire, tr\u00E8s lisible, de dessins s\u2019inspirant directement de la nature. Pour la premi\u00E8re fois appara\u00EEt le model\u00E9 du d\u00E9tail, qui jusqu\u2019alors avait \u00E9t\u00E9 stylis\u00E9 en \u00E0 plat et sans exception. Les fleurs et fruits sont, en g\u00E9n\u00E9ral, plus grands que nature. \u00BB En 1902, dans son ouvrage Le mus\u00E9e historique des Tissus de la Chambre de Commerce de Lyon. Pr\u00E9cis historique de l\u2019art de d\u00E9corer les \u00E9toffes et catalogue sommaire, il apporte quelques pr\u00E9cieux d\u00E9tails concernant l\u2019\u00E9volution de la production sous Louis XIV : \u00AB L\u2019art du tissu passe par trois phases sous Louis XIV : pour la premi\u00E8re (\u2026), la fabrication s\u2019affirme chez nous plus prosp\u00E8re. La seconde, au contraire, b\u00E9n\u00E9ficiaire des institutions de Colbert, va se r\u00E9v\u00E9ler g\u00E9niale. Elle est essentiellement r\u00E9aliste d\u2019expression et d\u2019autant plus que, gr\u00E2ce \u00E0 Revel, un \u00E9l\u00E8ve de Le Brun, qui avait \u00E9t\u00E9 mis \u00E0 la t\u00EAte du mouvement \u00E0 Lyon, on inventera une nouvelle formule dans la repr\u00E9sentation des d\u00E9tails d\u00E9coratifs. Jusque-l\u00E0, ils \u00E9taient rendus en \u00E0-plat, d\u00E9sormais l\u2019ombre et la lumi\u00E8re y joueront, modelant le motif. C\u2019est une innovation qui r\u00E9volutionne l\u2019aspect des \u00E9toffes et dont l\u2019usage persistera pendant les deux r\u00E8gnes suivants. Sous Louis XIV la flore extr\u00EAmement nature est surtout employ\u00E9e. On l\u2019interpr\u00E9tera dans des proportions relativement \u00E9normes, plus grandes que le mod\u00E8le m\u00EAme : de grosses fleurs, de gros fruits, isol\u00E9s, r\u00E9unis en bouquets ou combin\u00E9s \u00E0 divers d\u00E9tails cons\u00E9cutifs aux go\u00FBts du jour : tel, par exemple, celui des jardins dits \u00E0 la fran\u00E7aise, avec leurs treilles, leurs ifs, leurs caisses d\u2019orangers, etc. ; tel aussi ce go\u00FBt de l\u2019arch\u00E9ologie qui se manifestera par l\u2019apparition des ruines, de fragments d\u2019architecture, ou bien encore la vogue des passements, des coquillages, etc. \u00BB La mention de Revel est ici le point le plus important de sa d\u00E9monstration. Malheureusement, elle est anachronique puisque Jean Revel a \u0153uvr\u00E9 pour la Fabrique lyonnaise sous le r\u00E8gne de Louis XV. N\u00E9anmoins, il y a bien eu, un autre Revel, son p\u00E8re, pr\u00E9nomm\u00E9 Gabriel, re\u00E7u \u00E0 l\u2019Acad\u00E9mie royale de Peinture en 1683 et r\u00E9put\u00E9 avoir travaill\u00E9 aux c\u00F4t\u00E9s de Charles Le Brun \u00E0 Versailles. Jean Revel est, quant \u00E0 lui, n\u00E9 en 1684 \u00E0 Paris et d\u00E9c\u00E9d\u00E9 dans sa propri\u00E9t\u00E9 de Saint-Rambert-l\u2019\u00CEle-Barbe en 1751. Il serait arriv\u00E9 \u00E0 Lyon en 1710 en s\u2019essayant d\u2019abord comme portraitiste. Il aurait pu, lui aussi, b\u00E9n\u00E9ficier dans ses ann\u00E9es d\u2019apprentissage de la prestigieuse influence de Le Brun. N\u00E9anmoins, il semble rencontrer quelques difficult\u00E9s dans son art du portrait et se serait alors tourn\u00E9 vers la fabrication des \u00E9toffes o\u00F9 son talent se serait rapidement impos\u00E9. Son style est marqu\u00E9 par l\u2019emploi de formes volumineuses que sa science de l\u2019ornement rend pourtant gracieuses. \nC\u2019est avec Peter Thornton que l\u2019\u00E9toffe du mus\u00E9e des Tissus re\u00E7oit une nouvelle datation. Dans son ouvrage Baroque and Rococo Silks paru en 1965, cette laize de tenture est \u00E0 nouveau reproduite et l\u2019auteur, dans son cartel, indique que son dessin ressemble beaucoup aux dessins attribuables \u00E0 Jean Revel : \u00AB It so closely resembles other designs attribuable to Jean Revel that there can be little doubt this silk was also designed by him. \u00BB Il propose alors de dater son ex\u00E9cution aux alentours de 1733-1734. Cependant, on peut s\u2019\u00E9tonner, en l\u2019absence d\u2019archives propre \u00E0 cette laize, de pouvoir la dater aussi pr\u00E9cis\u00E9ment. Peter Thornton se base sur la carri\u00E8re de Jean Revel qu\u2019il d\u00E9voile d\u00E8s 1960 dans son article \u00AB Jean Revel, dessinateur de la grande fabrique \u00BB pour la Gazette des Beaux-Arts, nous invitant en premier lieu, \u00E0 relire la pr\u00E9face d\u2019Antoine-Nicolas Joubert de l\u2019Hiberderie de son ouvrage Le dessinateur, pour les fabriques d\u2019\u00E9toffes d\u2019or, d\u2019argent et de soies, paru en 1774. C\u2019est l\u2019une des premi\u00E8res sources \u00E0 citer Revel et \u00E0 lui reconna\u00EEtre la paternit\u00E9 d\u2019une innovation technique prodigieuse qui r\u00E9volutionna le traitement des motifs et fit de Lyon, le centre incontest\u00E9 de l\u2019art de d\u00E9corer les \u00E9toffes : \u00AB Mais il \u00E9toit r\u00E9serv\u00E9 \u00E0 la Peinture de briser les entraves qui retenoient encore quelques gens de go\u00FBt ; de porter la lumi\u00E8re dans cette pr\u00E9cieuse Manufacture, & de changer, pour ainsi dire, les ronces en fleurs. M. Revel Peintre parut, devint Dessinateur, & op\u00E9ra seul ce changement par la sup\u00E9riorit\u00E9 de ses talens. Il introduisit les points rentr\u00E9s d\u2019une couleur \u00E0 une autre, avec lesquels il forma si heureusement ces demi-teintes, qu\u2019il donna ce mo\u00EBleux, ce tendre qui imite la nature. Bient\u00F4t ces belles \u00E9toffes (ou plut\u00F4t ces tableaux en soie) excit\u00E8rent la plus grand \u00E9mulation ; & une fortune rapide fut le prix de ses talens. Il eut la gloire de voir de grands hommes parmi ses imitateurs. Le dessein fut envisag\u00E9 comme un art distingu\u00E9, noble & en m\u00EAme temps lucratif : voil\u00E0 le tableau que j\u2019ai voulu mettre sous les yeux des jeunes gens avant que d\u2019entrer en mati\u00E8re. \u00BB Peter Thornton rench\u00E9rit sur ces fameux points rentr\u00E9s en citant le fragment d\u2019une mise en carte, alors conserv\u00E9e \u00E0 l\u2019\u00C9cole de Tissage et aujourd\u2019hui entr\u00E9e dans les collections du mus\u00E9e des Tissus (inv. MT 40932) qui semble \u00EAtre le seul exemple sign\u00E9 et dat\u00E9 de l\u2019\u0153uvre de Jean Revel. Elle a \u00E9t\u00E9 r\u00E9alis\u00E9e \u00E0 Lyon, le 22 d\u00E9cembre 1733 et pr\u00E9sente un syst\u00E8me de s\u00E9paration des couleurs sous la forme de petites hachures horizontales, appel\u00E9es alors \u00AB points rentr\u00E9s \u00BB et que l\u2019on nomme aujourd\u2019hui \u00AB bercl\u00E9 \u00BB. Ces hachures sont r\u00E9alis\u00E9es uniquement avec les fils de trame. Cette audace, dans la fabrication des fa\u00E7onn\u00E9s, lui a peut-\u00EAtre \u00E9t\u00E9 inspir\u00E9e de son observation des productions de la manufacture des Gobelins, auxquelles il a certainement \u00E9t\u00E9 confront\u00E9 lors de ses jeunes ann\u00E9es parisiennes. L\u2019 alliance entre le talent du dessinateur et l\u2019ing\u00E9niosit\u00E9 du technicien \u00E0 traduire sur \u00E9toffe des effets comparables \u00E0 la peinture deviendra la marque de fabrique de la soierie lyonnaise, l\u2019\u00E9levant pour les d\u00E9cennies suivantes au somment de l\u2019art de tisser les \u00E9toffes. Dans l\u2019histoire de la soierie, cette r\u00E9volution marque l\u2019introduction du naturalisme apr\u00E8s une stylisation parfois extr\u00EAme des fleurs ou des v\u00E9g\u00E9taux \u00E0 Lyon, mais \u00E9galement en Italie ou en Angleterre. En effet, les motifs cr\u00E9\u00E9s \u00E0 Lyon sont presqu\u2019imm\u00E9diatement copi\u00E9s, une r\u00E9elle \u00E9mulation s\u2019empare des dessinateurs fran\u00E7ais qui lancent \u00E0 haute fr\u00E9quence des nouveaut\u00E9s, jusqu\u2019\u00E0 une fois par an, renouvelant ainsi consid\u00E9rablement la cr\u00E9ation. Les dessinateurs fran\u00E7ais vont \u00EAtre, \u00E0 ce titre, les seuls dans toute l\u2019Europe \u00E0 b\u00E9n\u00E9ficier du statut d\u2019artiste et Jean Revel est consid\u00E9r\u00E9 par sa fortune critique comme le premier d\u2019entre eux, leur Rapha\u00EBl. Ses motifs couvriront litt\u00E9ralement le r\u00E8gne de Louis XV et ce, pr\u00E9cis\u00E9ment d\u00E8s 1733-1734. Si, comme Peter Thornton, l\u2019on s\u2019en tient \u00E0 la mise en carte sign\u00E9e et dat\u00E9e de Jean Revel et \u00E0 l\u2019\u00E9tude de la soierie anglaise, prompte \u00E0 copier le dessin fran\u00E7ais, c\u2019est bien \u00E0 partir de ces ann\u00E9es, et plus particuli\u00E8rement 1735 pour l\u2019Angleterre qu\u2019est renouvel\u00E9 brusquement l\u2019art de d\u00E9corer les soieries et que s\u2019impose d\u00E9finitivement le go\u00FBt fran\u00E7ais. \nCette laize de soierie a probablement \u00E9t\u00E9 ex\u00E9cut\u00E9e comme tenture. Les lignes de fleurs n\u2019appellent pas forc\u00E9ment de compl\u00E9ment puisqu\u2019il n\u2019existe qu\u2019une infime marge entre elles et les lisi\u00E8res. Deux possibilit\u00E9s d\u2019agencement peuvent \u00EAtre avanc\u00E9es. La premi\u00E8re consisterait \u00E0 aligner les cartouches au d\u00E9cor d\u2019architecture mais juxtaposer ainsi les guirlandes de fa\u00E7on abrupte sans cr\u00E9er de nouveaux m\u00E9daillons n\u2019est pas enti\u00E8rement satisfaisant. En revanche, la seconde hypoth\u00E8se dans laquelle les m\u00E9daillons seraient dispos\u00E9s en quinconce, offrirait un effet d\u2019ensemble beaucoup plus rythm\u00E9. Les lignes sinueuses seraient doubl\u00E9es en \u00E9paisseur et anim\u00E9es d\u2019un aimable jeu de couleurs. C\u2019est cette derni\u00E8re proposition que l\u2019on est tent\u00E9 de retenir d\u2019autant plus qu\u2019elle s\u2019inspire de l\u2019art de Jean Revel de disposer ses motifs de fleurs massives ou de fruits ventrus parfois fra\u00EEchement \u00E9clat\u00E9s sur une m\u00EAme laize, toujours ordonn\u00E9s en quinconce. \nClaire Berthommier"@fr . . . . . . "La laize est conserv\u00E9e avec ses deux lisi\u00E8res. Le d\u00E9cor est con\u00E7u selon une sym\u00E9trie bilat\u00E9rale parfaite sur toute sa largeur mesurant un peu plus de cinquante-quatre centim\u00E8tres. Le rapport de dessin mesure, en hauteur, quarante-cinq centim\u00E8tres et demi, et, en largeur,\u00A0cinquante-deux centim\u00E8tres et demi, soit un chemin \u00E0 pointe double en retour. Le d\u00E9cor est compos\u00E9 de deux rinceaux sinueux oppos\u00E9s compos\u00E9s de campanules tombantes bleut\u00E9es, d\u2019an\u00E9mones largement \u00E9panouies au c\u0153ur bleu et aux p\u00E9tales rouges et blancs somm\u00E9es d\u2019une fleur jaune de brom\u00E9liac\u00E9es, c\u2019est-\u00E0-dire de la famille des ananas vraisemblablement import\u00E9s d\u2019Am\u00E9rique du Sud et d\u00E9gust\u00E9s pour la premi\u00E8re fois en France, \u00E0 la table de Louis XV en 1733. Le fond de l\u2019\u00E9toffe est travaill\u00E9 \u00E0 la mani\u00E8re d\u2019un r\u00E9seau de treillage alv\u00E9olaire dont de larges crev\u00E9s ouvrent sur un paysage abritant une architecture de fantaisie. La construction de ces m\u00E9daillons est r\u00E9alis\u00E9e en perspective centr\u00E9e \u00E0 un seul point de fuite, respectant le principe de sym\u00E9trie parfaite de l\u2019ensemble du motif. Sur un mur de douve trilob\u00E9 d\u00E9nu\u00E9 d\u2019embarcad\u00E8re, se d\u00E9ploie une architecture dont le corps de b\u00E2timent principal est coiff\u00E9 d\u2019un toit terrasse bord\u00E9 d\u2019une balustrade. Au premier \u00E9tage, cinq trav\u00E9es de fen\u00EAtres rythment la fa\u00E7ade et au rez-de-chauss\u00E9e, une arcade compos\u00E9e de trois arcs et quatre piliers forme le perron couvert d\u2019un toit en appentis. De part et d\u2019autre, deux ailes de b\u00E2timents apparemment peu saillantes se terminent en tours carr\u00E9es couronn\u00E9es d\u2019une toiture \u00E0 l\u2019imp\u00E9riale orn\u00E9e d\u2019une suite de trois boules. Cette architecture est ceinte de grands arbres feuillus dont on distingue deux essences, peut-\u00EAtre de ch\u00EAne et de h\u00EAtre. L\u2019\u00EElot qui se refl\u00E8te sur une eau calme est lui-m\u00EAme bord\u00E9 d\u2019une for\u00EAt verdoyante. Au premier plan, quelques souches aux feuilles lob\u00E9es, de la m\u00EAme couleur que le fond, cr\u00E9ent un effet de profondeur. \nCette \u00E9toffe a \u00E9t\u00E9 acquise aupr\u00E8s de M. Bouillin de Lyon en 1889. Elle est inscrite \u00E0 l\u2019inventaire avec la description suivante : \u00AB un beau morceau Louis XIV, \u00E0 maisons \u00BB. Raymond Cox, en 1900, dans son ouvrage L\u2019Art de d\u00E9corer les tissus d\u2019apr\u00E8s les collections du mus\u00E9e historique de la Chambre de Commerce de Lyon, la reproduit en partie pour la premi\u00E8re fois dans son chapitre d\u00E9di\u00E9 \u00E0 l\u2019\u00E9poque de Louis XIV qu\u2019il caract\u00E9rise ainsi : \u00AB Avec le XVIIe Si\u00E8cle, la sup\u00E9riorit\u00E9 fran\u00E7aise s\u2019affirme. Lyon est le principal cadre de production. \u00C0 la confusion des compositions italiennes notre pays oppose l\u2019expression claire, tr\u00E8s lisible, de dessins s\u2019inspirant directement de la nature. Pour la premi\u00E8re fois appara\u00EEt le model\u00E9 du d\u00E9tail, qui jusqu\u2019alors avait \u00E9t\u00E9 stylis\u00E9 en \u00E0 plat et sans exception. Les fleurs et fruits sont, en g\u00E9n\u00E9ral, plus grands que nature. \u00BB En 1902, dans son ouvrage Le mus\u00E9e historique des Tissus de la Chambre de Commerce de Lyon. Pr\u00E9cis historique de l\u2019art de d\u00E9corer les \u00E9toffes et catalogue sommaire, il apporte quelques pr\u00E9cieux d\u00E9tails concernant l\u2019\u00E9volution de la production sous Louis XIV : \u00AB L\u2019art du tissu passe par trois phases sous Louis XIV : pour la premi\u00E8re (\u2026), la fabrication s\u2019affirme chez nous plus prosp\u00E8re. La seconde, au contraire, b\u00E9n\u00E9ficiaire des institutions de Colbert, va se r\u00E9v\u00E9ler g\u00E9niale. Elle est essentiellement r\u00E9aliste d\u2019expression et d\u2019autant plus que, gr\u00E2ce \u00E0 Revel, un \u00E9l\u00E8ve de Le Brun, qui avait \u00E9t\u00E9 mis \u00E0 la t\u00EAte du mouvement \u00E0 Lyon, on inventera une nouvelle formule dans la repr\u00E9sentation des d\u00E9tails d\u00E9coratifs. Jusque-l\u00E0, ils \u00E9taient rendus en \u00E0-plat, d\u00E9sormais l\u2019ombre et la lumi\u00E8re y joueront, modelant le motif. C\u2019est une innovation qui r\u00E9volutionne l\u2019aspect des \u00E9toffes et dont l\u2019usage persistera pendant les deux r\u00E8gnes suivants. Sous Louis XIV la flore extr\u00EAmement nature est surtout employ\u00E9e. On l\u2019interpr\u00E9tera dans des proportions relativement \u00E9normes, plus grandes que le mod\u00E8le m\u00EAme : de grosses fleurs, de gros fruits, isol\u00E9s, r\u00E9unis en bouquets ou combin\u00E9s \u00E0 divers d\u00E9tails cons\u00E9cutifs aux go\u00FBts du jour : tel, par exemple, celui des jardins dits \u00E0 la fran\u00E7aise, avec leurs treilles, leurs ifs, leurs caisses d\u2019orangers, etc. ; tel aussi ce go\u00FBt de l\u2019arch\u00E9ologie qui se manifestera par l\u2019apparition des ruines, de fragments d\u2019architecture, ou bien encore la vogue des passements, des coquillages, etc. \u00BB La mention de Revel est ici le point le plus important de sa d\u00E9monstration. Malheureusement, elle est anachronique puisque Jean Revel a \u0153uvr\u00E9 pour la Fabrique lyonnaise sous le r\u00E8gne de Louis XV. N\u00E9anmoins, il y a bien eu, un autre Revel, son p\u00E8re, pr\u00E9nomm\u00E9 Gabriel, re\u00E7u \u00E0 l\u2019Acad\u00E9mie royale de Peinture en 1683 et r\u00E9put\u00E9 avoir travaill\u00E9 aux c\u00F4t\u00E9s de Charles Le Brun \u00E0 Versailles. Jean Revel est, quant \u00E0 lui, n\u00E9 en 1684 \u00E0 Paris et d\u00E9c\u00E9d\u00E9 dans sa propri\u00E9t\u00E9 de Saint-Rambert-l\u2019\u00CEle-Barbe en 1751. Il serait arriv\u00E9 \u00E0 Lyon en 1710 en s\u2019essayant d\u2019abord comme portraitiste. Il aurait pu, lui aussi, b\u00E9n\u00E9ficier dans ses ann\u00E9es d\u2019apprentissage de la prestigieuse influence de Le Brun. N\u00E9anmoins, il semble rencontrer quelques difficult\u00E9s dans son art du portrait et se serait alors tourn\u00E9 vers la fabrication des \u00E9toffes o\u00F9 son talent se serait rapidement impos\u00E9. Son style est marqu\u00E9 par l\u2019emploi de formes volumineuses que sa science de l\u2019ornement rend pourtant gracieuses. \nC\u2019est avec Peter Thornton que l\u2019\u00E9toffe du mus\u00E9e des Tissus re\u00E7oit une nouvelle datation. Dans son ouvrage Baroque and Rococo Silks paru en 1965, cette laize de tenture est \u00E0 nouveau reproduite et l\u2019auteur, dans son cartel, indique que son dessin ressemble beaucoup aux dessins attribuables \u00E0 Jean Revel : \u00AB It so closely resembles other designs attribuable to Jean Revel that there can be little doubt this silk was also designed by him. \u00BB Il propose alors de dater son ex\u00E9cution aux alentours de 1733-1734. Cependant, on peut s\u2019\u00E9tonner, en l\u2019absence d\u2019archives propre \u00E0 cette laize, de pouvoir la dater aussi pr\u00E9cis\u00E9ment. Peter Thornton se base sur la carri\u00E8re de Jean Revel qu\u2019il d\u00E9voile d\u00E8s 1960 dans son article \u00AB Jean Revel, dessinateur de la grande fabrique \u00BB pour la Gazette des Beaux-Arts, nous invitant en premier lieu, \u00E0 relire la pr\u00E9face d\u2019Antoine-Nicolas Joubert de l\u2019Hiberderie de son ouvrage Le dessinateur, pour les fabriques d\u2019\u00E9toffes d\u2019or, d\u2019argent et de soies, paru en 1774. C\u2019est l\u2019une des premi\u00E8res sources \u00E0 citer Revel et \u00E0 lui reconna\u00EEtre la paternit\u00E9 d\u2019une innovation technique prodigieuse qui r\u00E9volutionna le traitement des motifs et fit de Lyon, le centre incontest\u00E9 de l\u2019art de d\u00E9corer les \u00E9toffes : \u00AB Mais il \u00E9toit r\u00E9serv\u00E9 \u00E0 la Peinture de briser les entraves qui retenoient encore quelques gens de go\u00FBt ; de porter la lumi\u00E8re dans cette pr\u00E9cieuse Manufacture, & de changer, pour ainsi dire, les ronces en fleurs. M. Revel Peintre parut, devint Dessinateur, & op\u00E9ra seul ce changement par la sup\u00E9riorit\u00E9 de ses talens. Il introduisit les points rentr\u00E9s d\u2019une couleur \u00E0 une autre, avec lesquels il forma si heureusement ces demi-teintes, qu\u2019il donna ce mo\u00EBleux, ce tendre qui imite la nature. Bient\u00F4t ces belles \u00E9toffes (ou plut\u00F4t ces tableaux en soie) excit\u00E8rent la plus grand \u00E9mulation ; & une fortune rapide fut le prix de ses talens. Il eut la gloire de voir de grands hommes parmi ses imitateurs. Le dessein fut envisag\u00E9 comme un art distingu\u00E9, noble & en m\u00EAme temps lucratif : voil\u00E0 le tableau que j\u2019ai voulu mettre sous les yeux des jeunes gens avant que d\u2019entrer en mati\u00E8re. \u00BB Peter Thornton rench\u00E9rit sur ces fameux points rentr\u00E9s en citant le fragment d\u2019une mise en carte, alors conserv\u00E9e \u00E0 l\u2019\u00C9cole de Tissage et aujourd\u2019hui entr\u00E9e dans les collections du mus\u00E9e des Tissus (inv. MT 40932) qui semble \u00EAtre le seul exemple sign\u00E9 et dat\u00E9 de l\u2019\u0153uvre de Jean Revel. Elle a \u00E9t\u00E9 r\u00E9alis\u00E9e \u00E0 Lyon, le 22 d\u00E9cembre 1733 et pr\u00E9sente un syst\u00E8me de s\u00E9paration des couleurs sous la forme de petites hachures horizontales, appel\u00E9es alors \u00AB points rentr\u00E9s \u00BB et que l\u2019on nomme aujourd\u2019hui \u00AB bercl\u00E9 \u00BB. Ces hachures sont r\u00E9alis\u00E9es uniquement avec les fils de trame. Cette audace, dans la fabrication des fa\u00E7onn\u00E9s, lui a peut-\u00EAtre \u00E9t\u00E9 inspir\u00E9e de son observation des productions de la manufacture des Gobelins, auxquelles il a certainement \u00E9t\u00E9 confront\u00E9 lors de ses jeunes ann\u00E9es parisiennes. L\u2019 alliance entre le talent du dessinateur et l\u2019ing\u00E9niosit\u00E9 du technicien \u00E0 traduire sur \u00E9toffe des effets comparables \u00E0 la peinture deviendra la marque de fabrique de la soierie lyonnaise, l\u2019\u00E9levant pour les d\u00E9cennies suivantes au somment de l\u2019art de tisser les \u00E9toffes. Dans l\u2019histoire de la soierie, cette r\u00E9volution marque l\u2019introduction du naturalisme apr\u00E8s une stylisation parfois extr\u00EAme des fleurs ou des v\u00E9g\u00E9taux \u00E0 Lyon, mais \u00E9galement en Italie ou en Angleterre. En effet, les motifs cr\u00E9\u00E9s \u00E0 Lyon sont presqu\u2019imm\u00E9diatement copi\u00E9s, une r\u00E9elle \u00E9mulation s\u2019empare des dessinateurs fran\u00E7ais qui lancent \u00E0 haute fr\u00E9quence des nouveaut\u00E9s, jusqu\u2019\u00E0 une fois par an, renouvelant ainsi consid\u00E9rablement la cr\u00E9ation. Les dessinateurs fran\u00E7ais vont \u00EAtre, \u00E0 ce titre, les seuls dans toute l\u2019Europe \u00E0 b\u00E9n\u00E9ficier du statut d\u2019artiste et Jean Revel est consid\u00E9r\u00E9 par sa fortune critique comme le premier d\u2019entre eux, leur Rapha\u00EBl. Ses motifs couvriront litt\u00E9ralement le r\u00E8gne de Louis XV et ce, pr\u00E9cis\u00E9ment d\u00E8s 1733-1734. Si, comme Peter Thornton, l\u2019on s\u2019en tient \u00E0 la mise en carte sign\u00E9e et dat\u00E9e de Jean Revel et \u00E0 l\u2019\u00E9tude de la soierie anglaise, prompte \u00E0 copier le dessin fran\u00E7ais, c\u2019est bien \u00E0 partir de ces ann\u00E9es, et plus particuli\u00E8rement 1735 pour l\u2019Angleterre qu\u2019est renouvel\u00E9 brusquement l\u2019art de d\u00E9corer les soieries et que s\u2019impose d\u00E9finitivement le go\u00FBt fran\u00E7ais. \nCette laize de soierie a probablement \u00E9t\u00E9 ex\u00E9cut\u00E9e comme tenture. Les lignes de fleurs n\u2019appellent pas forc\u00E9ment de compl\u00E9ment puisqu\u2019il n\u2019existe qu\u2019une infime marge entre elles et les lisi\u00E8res. Deux possibilit\u00E9s d\u2019agencement peuvent \u00EAtre avanc\u00E9es. La premi\u00E8re consisterait \u00E0 aligner les cartouches au d\u00E9cor d\u2019architecture mais juxtaposer ainsi les guirlandes de fa\u00E7on abrupte sans cr\u00E9er de nouveaux m\u00E9daillons n\u2019est pas enti\u00E8rement satisfaisant. En revanche, la seconde hypoth\u00E8se dans laquelle les m\u00E9daillons seraient dispos\u00E9s en quinconce, offrirait un effet d\u2019ensemble beaucoup plus rythm\u00E9. Les lignes sinueuses seraient doubl\u00E9es en \u00E9paisseur et anim\u00E9es d\u2019un aimable jeu de couleurs. C\u2019est cette derni\u00E8re proposition que l\u2019on est tent\u00E9 de retenir d\u2019autant plus qu\u2019elle s\u2019inspire de l\u2019art de Jean Revel de disposer ses motifs de fleurs massives ou de fruits ventrus parfois fra\u00EEchement \u00E9clat\u00E9s sur une m\u00EAme laize, toujours ordonn\u00E9s en quinconce. \nClaire Berthommier"@fr . . . . "0.8522"^^ . . . "0.5166"^^ . . "Laize de tenture \u00E0 d\u00E9cor d'architecture"@fr . . . 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