"20041" . . . . . . "Satin broch\u00E9 nuances Le petit joueur de cornemuse (sujet de tenture)"@fr . "0.93989998102188110352"^^ . . . . . . "0.98240000009536743164"^^ . "En 1862, la Chambre de Commerce de Lyon faisait l'acquisition, pour son tr\u00E8s jeune mus\u00E9e d'Art et d'Industrie (l'anc\u00EAtre du mus\u00E9e des Tissus et du mus\u00E9e des Arts d\u00E9coratifs), de\u00A0la\u00A0collection de Jules Reybaud (1807-1872), dessinateur de fabrique, auteur des portraits tiss\u00E9s de Philippe de Lasalle (MT 7912), d'Antoine Berjon (inv. MT 7910) et de Jean-Fran\u00E7ois Bony (inv. MT 7911) qui ont \u00E9t\u00E9 pr\u00E9sent\u00E9s \u00E0 l'Exposition universelle de 1855, et d'Alexandre de Humboldt, ex\u00E9cut\u00E9 l'ann\u00E9e suivante, ce dernier ayant valu \u00E0 l'artiste une lettre flatteuse du mod\u00E8le lui-m\u00EAme et une m\u00E9daille d'or du roi de Prusse Fr\u00E9d\u00E9ric-Guillaume IV. \nJules Reybaud avait constitu\u00E9 un cabinet, dans lequel il avait r\u00E9uni une collection remarquable qui comprenait des \u0153uvres appartenant au domaine des beaux-arts (peintures, gravures, lithographies), des arts appliqu\u00E9s \u00E0 l'industrie (peintures, dessins) des c\u00E9ramiques europ\u00E9ennes, chinoises et japonaises, des \u00E9toffes, du Moyen \u00C2ge jusqu'au Second Empire, des papiers peints et des objets d'art. La renomm\u00E9e, \u00E0 Lyon, de ce cabinet \u00E9tait grande : il fut visit\u00E9 par le mar\u00E9chal de Castellane, par le cardinal de Bonald et par le s\u00E9nateur Va\u00EFsse qui y accompagna le roi de Bavi\u00E8re, Maximilien II. L'acquisition de cette collection constitue, encore aujourd'hui, l'un des apports majeurs des fonds du mus\u00E9e, puisqu'elle avait \u00E9t\u00E9 r\u00E9unie par un connaisseur \u00E9clair\u00E9.\nLa r\u00E9putation de Philippe de Lasalle\u00A0 (1723-1804), l'un des plus c\u00E9l\u00E8bres dessinateurs et marchands-fabricants de Lyon des r\u00E8gnes de Louis XV et de Louis XVI, bas\u00E9e \u00E0 la fois sur la perfection de ses dessins et sur les innovations techniques qu'il a apport\u00E9es au m\u00E9tier, tout autant que sur son exceptionnelle facult\u00E9, tout au long de sa carri\u00E8re, \u00E0 d\u00E9velopper ses affaires, explique que les \u00E9toffes issues de ses ateliers ont \u00E9t\u00E9 collect\u00E9es avec soin par les dessinateurs qui lui ont succ\u00E9d\u00E9 et par les professionnels de la fabrique, comme Jules Reybaud. Plusieurs chefs-d'\u0153uvre\u00A0du fabricant\u00A0ont donc rejoint le mus\u00E9e des Tissus avec le cabinet de Jules Reybaud,\u00A0comme la tenture avec le Petit joueur de cornemuse, et la collection du mus\u00E9e\u00A0est aujourd'hui la r\u00E9f\u00E9rence mondiale pour l'\u00E9tude et la connaissance de la production de Philippe de Lasalle.\nLe sujet du Petit joueur de cornemuse (ou L'Enfant berger ou L'Innocence)\u00A0est emprunt\u00E9 \u00E0 Fran\u00E7ois Boucher (1703-1770), comme en t\u00E9moigne l'eau-forte du ma\u00EEtre, termin\u00E9e au burin par Pierre Aveline, intitul\u00E9e L'Innocence,\u00A0aujourd'hui conserv\u00E9e au mus\u00E9e du Louvre, au d\u00E9partement des Arts graphiques (inv. 18277 LR/Recto), ou la gravure en mani\u00E8re de crayon, impression en sanguine brune, de Gilles Demarteau (1722-1776) ex\u00E9cut\u00E9e en 1770 d'apr\u00E8s un dessin du ma\u00EEtre ayant appartenu\u00A0au cabinet de\u00A0Pierre-Jacques-On\u00E9zyme Bergeret de Grancourt (1715-1785), aussi conserv\u00E9e au Louvre (inv. 19312 LR/Recto). La figure du Petit joueur de cornemuse avec son chien qui fait le beau a \u00E9t\u00E9 reproduite \u00E0 l'huile \u00E0 plusieurs reprises par l'atelier de Fran\u00E7ois Boucher, comme en t\u00E9moigne, par exemple, la version du Museum of Fine Arts de Boston (inv. 61.958), mais aussi dans diff\u00E9rentes techniques du domaine des arts d\u00E9coratifs (tapisserie, \u00E9mail, porcelaine).\nC'est donc un motif en vogue dans les ann\u00E9es 1760-1770 qu'utilise Philippe de Lasalle sur ce meuble en satin broch\u00E9 nuances.\u00A0Du\u00A0dessin diffus\u00E9 par la gravure, il retient l'enfant, dont la physionomie, l'attitude, le costume et les accessoires sont parfaitement fid\u00E8les au mod\u00E8le, et le chien dress\u00E9 sur ses pattes arri\u00E8res. Il supprime en revanche les r\u00E9f\u00E9rences bucoliques, transformant le berger en jardinier, appuy\u00E9 sur un muret de pierres, \u00E0 l'ombre d'une vigne. Sur le c\u00F4t\u00E9 du muret, un seau contenant oreilles d'ours, iris, pens\u00E9es,\u00A0phlox et hell\u00E9bore repose sur une petite marche. Une guirlande de mauve s'en \u00E9chappe et ondule sous la terrasse qui accueille la sc\u00E8ne. Celle-ci est trait\u00E9e en\u00A0soie polychrome broch\u00E9e\u00A0sur un fond de satin cr\u00E8me. Elle s'inscrit dans un m\u00E9daillon, dont la couronne est compos\u00E9e de roses \u00E9panouies. En partie sup\u00E9rieure et inf\u00E9rieure du m\u00E9daillon, des branches charg\u00E9es de feuilles blanches\u00A0permettent au\u00A0rapport de dessin de se r\u00E9p\u00E9ter, tandis que des convolvulus cr\u00E8me au c\u0153ur orang\u00E9 occupent les \u00E9coin\u00E7ons, de part et d'autre du m\u00E9daillon central.\nComme souvent dans les meubles fa\u00E7onn\u00E9s produits par Philippe de Lasalle, l'\u00E9toffe est ex\u00E9cut\u00E9e en satin de 8, cha\u00EEne (d\u00E9cochement 3), broch\u00E9 \u00E0 plusieurs lats \u00E0 liage repris par\u00A0deux fils en serg\u00E9 (de 3 lie 1, S). Elle est tiss\u00E9e sur une cha\u00EEne en organsin de soie (S de deux bouts cr\u00E8me ; d\u00E9coupure : 12 fils ; r\u00E9duction : 144 fils\u00A0par cm dont 24 liages repris par 2/6 des fils), par deux coups de trame de fond pour un coup de chaque lat de broch\u00E9 selon le d\u00E9cor (d\u00E9coupure : 1 pass\u00E9e ; r\u00E9duction : 22 pass\u00E9es au cm).\u00A0Mais, ce qui est notable, c'est que la trame de fond, invisible sous les flott\u00E9s du satin, est en lin (fil\u00E9 de torsion Z) et non en soie, alors que les trames broch\u00E9es sont en soie et schappe. On compte au moins\u00A0quinze couleurs, en plus du blanc et du noir (trois tons de bleu,\u00A0deux tons de\u00A0vert,\u00A0un vert-jaune,\u00A0un jaune,\u00A0un rouge,\u00A0deux tons de\u00A0rose,\u00A0un violet,\u00A0un parme,\u00A0deux tons de\u00A0gris et\u00A0un marron). En fonction des couleurs, les trames sont compos\u00E9es de trois bouts sans torsion apparente ou faiblement assembl\u00E9s (couleurs claires, en soie continue)\u00A0ou de trois bouts Z assembl\u00E9s en S ou sans torsion apparente (couleurs sombres ou mates, en schappe). La pr\u00E9sence d'une trame de fond en lin et de schappe pour certaines couleurs du d\u00E9cor caract\u00E9rise\u00A0certaines productions de Philippe de Lasalle, qui sont distingu\u00E9es par une\u00A0autre particularit\u00E9 remarquable : la pr\u00E9sence d'une lisi\u00E8re ray\u00E9e de noir. G\u00E9n\u00E9ralement compos\u00E9es de cordelines et de mignonettes tiss\u00E9es en satin, les lisi\u00E8res sont cependant diff\u00E9renci\u00E9es. Celle de gauche est ray\u00E9e de bleu clair, celle de droite, d'une large rayure noire.\nLes \u00E9toffes produites par Philippe de Lasalle\u00A0\u00E0 partir de 1771 et jusqu'en 1773\u00A0pr\u00E9sentent cette\u00A0double particularit\u00E9 d'\u00EAtre m\u00E9lang\u00E9es (trame de fond en lin ou en coton, pr\u00E9sence de schappe en plus de soie continue)\u00A0et de comporter une des deux lisi\u00E8res ray\u00E9e de noir.\nEn 1771, en effet, la Fabrique lyonnaise subissait une nouvelle crise, dont les causes et les effets sont rappel\u00E9s par le m\u00E9moire qu'adressent, en mars 1772, les ma\u00EEtres ouvriers\u00A0\u00E0 Jean-Charles-Philibert Trudaine de Montigny (1733-1777), car \u00AB les cris et les g\u00E9missements continuels d'un corps d'ouvriers le plus consid\u00E9rable du Royaume [...] ne leur permettent plus de garder le silence. \u00BB Tous les \u00AB maux \u00BB\u00A0qui accablent la Fabrique sont alors rappel\u00E9s : les deuils successifs qui ont affect\u00E9 les cours europ\u00E9ennes, la trop grande quantit\u00E9 d'\u00E9toffes fabriqu\u00E9es \u00E0 l'occasion du mariage du dauphin et rest\u00E9e invendue, la guerre dans les pays du Nord qui ferme les principaux d\u00E9bouch\u00E9s, les progr\u00E8s des manufactures \u00E9trang\u00E8res que l'\u00E9migration des ouvriers de Lyon \u00AB\u00A0fortifie et perfectionne tous les jours\u00A0\u00BB, les mauvaises r\u00E9coltes qui augmentent le prix des soies..., autant de causes qui expliquent \u00AB\u00A0une cessation presque g\u00E9n\u00E9rale dont la dur\u00E9e ne fut jamais si consid\u00E9rable en aucun temps\u00A0\u00BB (Paris, Archives nationales, F121441).\nPhilippe de Lasalle est alors en train de perfectionner le m\u00E9tier \u00E0 semple amovible qu'il a invent\u00E9 et qui lui permet, tout en renouvelant le dessin, d'abaisser les co\u00FBts de production. Par ailleurs, il imagine de produire des meubles en satin\u00A0ou en cannetill\u00E9, broch\u00E9s \u00E0 plusieurs lats, dont les trames de\u00A0fond, peu visibles, sont en mat\u00E9riaux moins chers que la soie (schappe latt\u00E9e de coton, coton ou lin), et les trames broch\u00E9es en schappe, pour les couleurs les plus sombres, afin de r\u00E9aliser des \u00E9toffes \u00E0 prix v\u00E9ritablement comp\u00E9titif. Le premier exemple de ce type de meubles est vraisemblablement la tenture dite \u00AB Les Perdrix \u00BB (inv. MT 2882), qu'il est en train de tisser lorsqu'il invite, en 1772, les ma\u00EEtres-gardes de Lyon \u00E0 se rendre \u00E0 son domicile, rue Royale, au premier \u00E9tage, pour examiner le m\u00E9tier de son invention \u00E0 semple mobile, permettant de\u00A0produire ais\u00E9ment de grands rapports de dessin sur la hauteur d'une laize. Les deux semples amovibles divisent le d\u00E9cor en deux parties correspondant chacune \u00E0 plus de cinquante centim\u00E8tres d'\u00E9toffe. Les ma\u00EEtres-gardes sont impressionn\u00E9s par ce syst\u00E8me et par cette \u00AB\u00A0\u00E9toffe fond carrel\u00E9 bleu, broch\u00E9e soye, a plusieurs lats, dont le dessein contenoit soixante dizaines \u00BB (Paris, Archives nationales de France, F121444A, Proc\u00E8s-verbal dress\u00E9 par les ma\u00EEtres-gardes, 9 novembre 1772).\u00A0Cette tenture a \u00E9t\u00E9 livr\u00E9e \u00E0 Louis-Joseph de Bourbon, prince de Cond\u00E9, pour le Palais Bourbon, et elle a\u00A0\u00E9t\u00E9 utilis\u00E9e pour le Salon d'attente de Bathilde d'Orl\u00E9ans, duchesse de Bourbon, la fille du prince et l'\u00E9pouse de Louis-Henri de Bourbon-Cond\u00E9. En 1773, elle fut aussi livr\u00E9e \u00E0 l'imp\u00E9ratrice de toutes les Russies, Catherine II. Elle fut utilis\u00E9e pour le Boudoir au premier \u00E9tage du Grand Palais de Peterhof.\nCette m\u00EAme ann\u00E9e 1773, Philippe de Lasalle livre aussi \u00E0 l'imp\u00E9ratrice une autre\u00A0\u00E9toffe remarquable, la tenture dite \u00AB de Tchesm\u00E9 \u00BB (inv. MT 2886), elle aussi r\u00E9alis\u00E9e gr\u00E2ce au m\u00E9tier \u00E0 semple mobile au moyen de soie, de coton et de schappe. Le prix de cette tenture, consign\u00E9 dans les Archives de\u00A0la maison imp\u00E9riale (\u0420\u0413\u041D\u0410, \u0424 468, \u043E\u043F. I. \u0414. 3888, 1773 \u0433., \u043B. 156/RGIA, F. 468, liste 1, n\u00B0 3888, 1773, p. 156), para\u00EEt, en effet, d\u00E9risoire (dix roubles cinquante kopecks par archine) par rapport au co\u00FBt de la tenture dite \u00AB au Paon et au Faisan \u00BB (inv. MT 1278), livr\u00E9e en 1778 pour vingt-cinq roubles l'archine.\nCette capacit\u00E9 de Philippe de Lasalle \u00E0 maintenir son activit\u00E9 durant la grande crise de 1771-1772 gr\u00E2ce \u00E0 l'invention du semple\u00A0amovible et \u00E0 la production d'\u00E9toffes m\u00E9lang\u00E9es, en soie,\u00A0coton ou lin\u00A0et schappe, a peu \u00E9t\u00E9 soulign\u00E9e.\u00A0Elle est pourtant remarqu\u00E9e par ses contemporains.\nAu d\u00E9but de l'ann\u00E9e 1778, Philippe de Lasalle fait rappeler l'\u00E9tat de ses travaux au Directeur g\u00E9n\u00E9ral des Finances (Archives nationales de France, F121444A, 6 janvier 1778). Parmi les services qu'il a rendus \u00E0 la Fabrique lyonnaise, il rappelle qu'\u00AB il a fait consid\u00E9rablement travailler les ouvriers de Lyon en \u00E9toffes pour meubles pour la Russie, ou il entrait tr\u00E8s peu de soye, beaucoup de main d'\u0153uvre et dont les fleurs s'ex\u00E9cutoient avec le rebus des cocons qu'il faisoit filer. \u00BB Il obtient peu de temps apr\u00E8s une gratification de six mille livres, dont Jacques Necker l'informe dans une lettre dat\u00E9e du 13 juin, o\u00F9 il pr\u00E9cise : \u00AB Je s\u00E7ais aussi que vous av\u00E9s cr\u00E9\u00E9 dans la partie des meubles une branche de Commerce qui dans des tems de cessation de travail a occup\u00E9 un grand nombre d'ouvriers et que vous av\u00E9s \u00E9t\u00E9 autoris\u00E9 \u00E0 cette occasion par le Conseil a sortir des r\u00E8gles prescrites par les Reglemens de la Fabrique en vous assujettissant a une marque distinctive ; les remerciemens que vous ont faits en 1772 les syndics et Mrs Gardes de la fabrique de Lyon \u00E0 l'occasion du portrait de Louis XV ex\u00E9cut\u00E9 en \u00E9toffes dont vous av\u00E9s faits pr\u00E9sent \u00E0 cette Com(munau)t\u00E9 prouvent jusqu'\u00E0 quel point vous av\u00E9s port\u00E9 l'art du dessein et de la fabrication. \u00BB Necker s'est pr\u00E9alablement fait remettre un rapport (Archives nationales de France, F121444A) sur Philippe de Lasalle, dans lequel on apprend que le fabricant fut autoris\u00E9 \u00E0 \u00AB s'\u00E9carter des m\u00E9thodes usit\u00E9es de fabriquer les \u00E9toffes, en mettant une marque distinctive, pour laisser \u00E0 son g\u00E9nie l'essort dont il avait besoin, et l'on a vu sortir de son pinceau des chefs-d'\u0153uvre dans le genre d'\u00E9toffes pour meubles, en mati\u00E8re de laine, fil et bourre de soye qu'il faisait pr\u00E9parer \u00E0 sa mani\u00E8re, ce qui a prodigieusement occup\u00E9 de bras dans des temps mesme de cessation d'ouvrages et ses \u00E9toffes ont orn\u00E9 les Palais des Rois et ceux de l'imp\u00E9ratrice de Russie qui a consid\u00E9rablement fait travailler la ville de Lyon dans cette nouvelle branche d'industrie. \u00BB\nPlusieurs tentures conserv\u00E9es au mus\u00E9e des Tissus sont des \u00E9toffes m\u00E9lang\u00E9es, comme la laize de satin jaune, broch\u00E9 de fleurs nuanc\u00E9es (inv. MT 2879), celle en damas gros de Tours, fond cr\u00E8me, broch\u00E9 d'un bouquet nuanc\u00E9 nou\u00E9 par un ruban bleu (inv. MT 2866), celle en damas gros de Tours, fond bleu, broch\u00E9 d'un bouquet nuanc\u00E9 nou\u00E9 par un ruban rose (inv. MT 24591.2),\u00A0celle en satin ponceau,\u00A0broch\u00E9 de fleurs nuanc\u00E9es (inv. MT 2867), la tenture dite \u00AB aux tourterelles dans des fleurs \u00BB sur fond de satin jaune (inv. MT 2871), la tenture dite \u00AB\u00A0aux colombes\u00A0\u00BB, sur fond satin ponceau\u00A0(inv. MT 29688)\u00A0ou la tenture \u00AB au faisan dor\u00E9 \u00BB (inv. MT 1286 et MT 36453), indiquant que ces \u00E9toffes\u00A0ont \u00E9t\u00E9 produites en 1771-1772, durant la crise subie par la Fabrique lyonnaise qui incita Philippe de Lasalle \u00E0 demander l'autorisation au Conseil de \u00AB sortir des r\u00E8gles prescrites par les Reglemens de la Fabrique \u00BB en produisant des \u00E9toffes m\u00E9lang\u00E9es, notamment pour l'exportation vers la Russie, \u00E0 la condition de s'assujettir \u00AB a une marque distinctive. \u00BB La pr\u00E9sence d'une lisi\u00E8re noire, sur un c\u00F4t\u00E9 de la laize,\u00A0permettait de distinguer \u00E0 l'\u0153il nu les \u00E9toffes m\u00E9lang\u00E9es, soie, schappe\u00A0et coton ou soie, schappe\u00A0et lin, produites durant la grande crise de la Fabrique lyonnaise par Philippe de Lasalle. Les \u00E9toffes\u00A0ex\u00E9cut\u00E9es par le\u00A0fabricant apr\u00E8s cette crise, tout en soie, ne pr\u00E9sentent plus cette particularit\u00E9.\nL'exemplaire de la tenture au Petit joueur de cornemuse conserv\u00E9 au mus\u00E9e des Tissus peut donc bien \u00EAtre dat\u00E9e des ann\u00E9es 1771-1772, au moment ou le go\u00FBt pour les \u00AB enfants \u00BB de Fran\u00E7ois Boucher \u00E9tait \u00E0 son paroxysme. Le succ\u00E8s de ce mod\u00E8le de Philippe de Lasalle semble avoir \u00E9t\u00E9 important, comme en t\u00E9moigne, par\u00A0exemple, le fragment conserv\u00E9 au Metropolitan Museum de New York (inv. 38.182.6) ou le second exemplaire du mus\u00E9e des Tissus (inv. MT 2884), acquis avec la collection de Fran\u00E7ois Bert en 1862, \u00E0 l'instar d'autres tentures du fabricant avec des sujet pastoraux ou champ\u00EAtres, comme le Jardinier (inv. MT 1284), la Bouqueti\u00E8re (inv. MT 2885) ou le couple form\u00E9 par le Jardinier et la Bouqueti\u00E8re (inv. MT 2876 et MT 2920).\nMaximilien Durand"@fr . . . . . . . . . . . . . . . "Satin broch\u00E9 nuances Le petit joueur de cornemuse (sujet de tenture)"@fr . . "En 1862, la Chambre de Commerce de Lyon faisait l'acquisition, pour son tr\u00E8s jeune mus\u00E9e d'Art et d'Industrie (l'anc\u00EAtre du mus\u00E9e des Tissus et du mus\u00E9e des Arts d\u00E9coratifs), de\u00A0la\u00A0collection de Jules Reybaud (1807-1872), dessinateur de fabrique, auteur des portraits tiss\u00E9s de Philippe de Lasalle (MT 7912), d'Antoine Berjon (inv. MT 7910) et de Jean-Fran\u00E7ois Bony (inv. MT 7911) qui ont \u00E9t\u00E9 pr\u00E9sent\u00E9s \u00E0 l'Exposition universelle de 1855, et d'Alexandre de Humboldt, ex\u00E9cut\u00E9 l'ann\u00E9e suivante, ce dernier ayant valu \u00E0 l'artiste une lettre flatteuse du mod\u00E8le lui-m\u00EAme et une m\u00E9daille d'or du roi de Prusse Fr\u00E9d\u00E9ric-Guillaume IV. \nJules Reybaud avait constitu\u00E9 un cabinet, dans lequel il avait r\u00E9uni une collection remarquable qui comprenait des \u0153uvres appartenant au domaine des beaux-arts (peintures, gravures, lithographies), des arts appliqu\u00E9s \u00E0 l'industrie (peintures, dessins) des c\u00E9ramiques europ\u00E9ennes, chinoises et japonaises, des \u00E9toffes, du Moyen \u00C2ge jusqu'au Second Empire, des papiers peints et des objets d'art. La renomm\u00E9e, \u00E0 Lyon, de ce cabinet \u00E9tait grande : il fut visit\u00E9 par le mar\u00E9chal de Castellane, par le cardinal de Bonald et par le s\u00E9nateur Va\u00EFsse qui y accompagna le roi de Bavi\u00E8re, Maximilien II. L'acquisition de cette collection constitue, encore aujourd'hui, l'un des apports majeurs des fonds du mus\u00E9e, puisqu'elle avait \u00E9t\u00E9 r\u00E9unie par un connaisseur \u00E9clair\u00E9.\nLa r\u00E9putation de Philippe de Lasalle\u00A0 (1723-1804), l'un des plus c\u00E9l\u00E8bres dessinateurs et marchands-fabricants de Lyon des r\u00E8gnes de Louis XV et de Louis XVI, bas\u00E9e \u00E0 la fois sur la perfection de ses dessins et sur les innovations techniques qu'il a apport\u00E9es au m\u00E9tier, tout autant que sur son exceptionnelle facult\u00E9, tout au long de sa carri\u00E8re, \u00E0 d\u00E9velopper ses affaires, explique que les \u00E9toffes issues de ses ateliers ont \u00E9t\u00E9 collect\u00E9es avec soin par les dessinateurs qui lui ont succ\u00E9d\u00E9 et par les professionnels de la fabrique, comme Jules Reybaud. Plusieurs chefs-d'\u0153uvre\u00A0du fabricant\u00A0ont donc rejoint le mus\u00E9e des Tissus avec le cabinet de Jules Reybaud,\u00A0comme la tenture avec le Petit joueur de cornemuse, et la collection du mus\u00E9e\u00A0est aujourd'hui la r\u00E9f\u00E9rence mondiale pour l'\u00E9tude et la connaissance de la production de Philippe de Lasalle.\nLe sujet du Petit joueur de cornemuse (ou L'Enfant berger ou L'Innocence)\u00A0est emprunt\u00E9 \u00E0 Fran\u00E7ois Boucher (1703-1770), comme en t\u00E9moigne l'eau-forte du ma\u00EEtre, termin\u00E9e au burin par Pierre Aveline, intitul\u00E9e L'Innocence,\u00A0aujourd'hui conserv\u00E9e au mus\u00E9e du Louvre, au d\u00E9partement des Arts graphiques (inv. 18277 LR/Recto), ou la gravure en mani\u00E8re de crayon, impression en sanguine brune, de Gilles Demarteau (1722-1776) ex\u00E9cut\u00E9e en 1770 d'apr\u00E8s un dessin du ma\u00EEtre ayant appartenu\u00A0au cabinet de\u00A0Pierre-Jacques-On\u00E9zyme Bergeret de Grancourt (1715-1785), aussi conserv\u00E9e au Louvre (inv. 19312 LR/Recto). La figure du Petit joueur de cornemuse avec son chien qui fait le beau a \u00E9t\u00E9 reproduite \u00E0 l'huile \u00E0 plusieurs reprises par l'atelier de Fran\u00E7ois Boucher, comme en t\u00E9moigne, par exemple, la version du Museum of Fine Arts de Boston (inv. 61.958), mais aussi dans diff\u00E9rentes techniques du domaine des arts d\u00E9coratifs (tapisserie, \u00E9mail, porcelaine).\nC'est donc un motif en vogue dans les ann\u00E9es 1760-1770 qu'utilise Philippe de Lasalle sur ce meuble en satin broch\u00E9 nuances.\u00A0Du\u00A0dessin diffus\u00E9 par la gravure, il retient l'enfant, dont la physionomie, l'attitude, le costume et les accessoires sont parfaitement fid\u00E8les au mod\u00E8le, et le chien dress\u00E9 sur ses pattes arri\u00E8res. Il supprime en revanche les r\u00E9f\u00E9rences bucoliques, transformant le berger en jardinier, appuy\u00E9 sur un muret de pierres, \u00E0 l'ombre d'une vigne. Sur le c\u00F4t\u00E9 du muret, un seau contenant oreilles d'ours, iris, pens\u00E9es,\u00A0phlox et hell\u00E9bore repose sur une petite marche. Une guirlande de mauve s'en \u00E9chappe et ondule sous la terrasse qui accueille la sc\u00E8ne. Celle-ci est trait\u00E9e en\u00A0soie polychrome broch\u00E9e\u00A0sur un fond de satin cr\u00E8me. Elle s'inscrit dans un m\u00E9daillon, dont la couronne est compos\u00E9e de roses \u00E9panouies. En partie sup\u00E9rieure et inf\u00E9rieure du m\u00E9daillon, des branches charg\u00E9es de feuilles blanches\u00A0permettent au\u00A0rapport de dessin de se r\u00E9p\u00E9ter, tandis que des convolvulus cr\u00E8me au c\u0153ur orang\u00E9 occupent les \u00E9coin\u00E7ons, de part et d'autre du m\u00E9daillon central.\nComme souvent dans les meubles fa\u00E7onn\u00E9s produits par Philippe de Lasalle, l'\u00E9toffe est ex\u00E9cut\u00E9e en satin de 8, cha\u00EEne (d\u00E9cochement 3), broch\u00E9 \u00E0 plusieurs lats \u00E0 liage repris par\u00A0deux fils en serg\u00E9 (de 3 lie 1, S). Elle est tiss\u00E9e sur une cha\u00EEne en organsin de soie (S de deux bouts cr\u00E8me ; d\u00E9coupure : 12 fils ; r\u00E9duction : 144 fils\u00A0par cm dont 24 liages repris par 2/6 des fils), par deux coups de trame de fond pour un coup de chaque lat de broch\u00E9 selon le d\u00E9cor (d\u00E9coupure : 1 pass\u00E9e ; r\u00E9duction : 22 pass\u00E9es au cm).\u00A0Mais, ce qui est notable, c'est que la trame de fond, invisible sous les flott\u00E9s du satin, est en lin (fil\u00E9 de torsion Z) et non en soie, alors que les trames broch\u00E9es sont en soie et schappe. On compte au moins\u00A0quinze couleurs, en plus du blanc et du noir (trois tons de bleu,\u00A0deux tons de\u00A0vert,\u00A0un vert-jaune,\u00A0un jaune,\u00A0un rouge,\u00A0deux tons de\u00A0rose,\u00A0un violet,\u00A0un parme,\u00A0deux tons de\u00A0gris et\u00A0un marron). En fonction des couleurs, les trames sont compos\u00E9es de trois bouts sans torsion apparente ou faiblement assembl\u00E9s (couleurs claires, en soie continue)\u00A0ou de trois bouts Z assembl\u00E9s en S ou sans torsion apparente (couleurs sombres ou mates, en schappe). La pr\u00E9sence d'une trame de fond en lin et de schappe pour certaines couleurs du d\u00E9cor caract\u00E9rise\u00A0certaines productions de Philippe de Lasalle, qui sont distingu\u00E9es par une\u00A0autre particularit\u00E9 remarquable : la pr\u00E9sence d'une lisi\u00E8re ray\u00E9e de noir. G\u00E9n\u00E9ralement compos\u00E9es de cordelines et de mignonettes tiss\u00E9es en satin, les lisi\u00E8res sont cependant diff\u00E9renci\u00E9es. Celle de gauche est ray\u00E9e de bleu clair, celle de droite, d'une large rayure noire.\nLes \u00E9toffes produites par Philippe de Lasalle\u00A0\u00E0 partir de 1771 et jusqu'en 1773\u00A0pr\u00E9sentent cette\u00A0double particularit\u00E9 d'\u00EAtre m\u00E9lang\u00E9es (trame de fond en lin ou en coton, pr\u00E9sence de schappe en plus de soie continue)\u00A0et de comporter une des deux lisi\u00E8res ray\u00E9e de noir.\nEn 1771, en effet, la Fabrique lyonnaise subissait une nouvelle crise, dont les causes et les effets sont rappel\u00E9s par le m\u00E9moire qu'adressent, en mars 1772, les ma\u00EEtres ouvriers\u00A0\u00E0 Jean-Charles-Philibert Trudaine de Montigny (1733-1777), car \u00AB les cris et les g\u00E9missements continuels d'un corps d'ouvriers le plus consid\u00E9rable du Royaume [...] ne leur permettent plus de garder le silence. \u00BB Tous les \u00AB maux \u00BB\u00A0qui accablent la Fabrique sont alors rappel\u00E9s : les deuils successifs qui ont affect\u00E9 les cours europ\u00E9ennes, la trop grande quantit\u00E9 d'\u00E9toffes fabriqu\u00E9es \u00E0 l'occasion du mariage du dauphin et rest\u00E9e invendue, la guerre dans les pays du Nord qui ferme les principaux d\u00E9bouch\u00E9s, les progr\u00E8s des manufactures \u00E9trang\u00E8res que l'\u00E9migration des ouvriers de Lyon \u00AB\u00A0fortifie et perfectionne tous les jours\u00A0\u00BB, les mauvaises r\u00E9coltes qui augmentent le prix des soies..., autant de causes qui expliquent \u00AB\u00A0une cessation presque g\u00E9n\u00E9rale dont la dur\u00E9e ne fut jamais si consid\u00E9rable en aucun temps\u00A0\u00BB (Paris, Archives nationales, F121441).\nPhilippe de Lasalle est alors en train de perfectionner le m\u00E9tier \u00E0 semple amovible qu'il a invent\u00E9 et qui lui permet, tout en renouvelant le dessin, d'abaisser les co\u00FBts de production. Par ailleurs, il imagine de produire des meubles en satin\u00A0ou en cannetill\u00E9, broch\u00E9s \u00E0 plusieurs lats, dont les trames de\u00A0fond, peu visibles, sont en mat\u00E9riaux moins chers que la soie (schappe latt\u00E9e de coton, coton ou lin), et les trames broch\u00E9es en schappe, pour les couleurs les plus sombres, afin de r\u00E9aliser des \u00E9toffes \u00E0 prix v\u00E9ritablement comp\u00E9titif. Le premier exemple de ce type de meubles est vraisemblablement la tenture dite \u00AB Les Perdrix \u00BB (inv. MT 2882), qu'il est en train de tisser lorsqu'il invite, en 1772, les ma\u00EEtres-gardes de Lyon \u00E0 se rendre \u00E0 son domicile, rue Royale, au premier \u00E9tage, pour examiner le m\u00E9tier de son invention \u00E0 semple mobile, permettant de\u00A0produire ais\u00E9ment de grands rapports de dessin sur la hauteur d'une laize. Les deux semples amovibles divisent le d\u00E9cor en deux parties correspondant chacune \u00E0 plus de cinquante centim\u00E8tres d'\u00E9toffe. Les ma\u00EEtres-gardes sont impressionn\u00E9s par ce syst\u00E8me et par cette \u00AB\u00A0\u00E9toffe fond carrel\u00E9 bleu, broch\u00E9e soye, a plusieurs lats, dont le dessein contenoit soixante dizaines \u00BB (Paris, Archives nationales de France, F121444A, Proc\u00E8s-verbal dress\u00E9 par les ma\u00EEtres-gardes, 9 novembre 1772).\u00A0Cette tenture a \u00E9t\u00E9 livr\u00E9e \u00E0 Louis-Joseph de Bourbon, prince de Cond\u00E9, pour le Palais Bourbon, et elle a\u00A0\u00E9t\u00E9 utilis\u00E9e pour le Salon d'attente de Bathilde d'Orl\u00E9ans, duchesse de Bourbon, la fille du prince et l'\u00E9pouse de Louis-Henri de Bourbon-Cond\u00E9. En 1773, elle fut aussi livr\u00E9e \u00E0 l'imp\u00E9ratrice de toutes les Russies, Catherine II. Elle fut utilis\u00E9e pour le Boudoir au premier \u00E9tage du Grand Palais de Peterhof.\nCette m\u00EAme ann\u00E9e 1773, Philippe de Lasalle livre aussi \u00E0 l'imp\u00E9ratrice une autre\u00A0\u00E9toffe remarquable, la tenture dite \u00AB de Tchesm\u00E9 \u00BB (inv. MT 2886), elle aussi r\u00E9alis\u00E9e gr\u00E2ce au m\u00E9tier \u00E0 semple mobile au moyen de soie, de coton et de schappe. Le prix de cette tenture, consign\u00E9 dans les Archives de\u00A0la maison imp\u00E9riale (\u0420\u0413\u041D\u0410, \u0424 468, \u043E\u043F. I. \u0414. 3888, 1773 \u0433., \u043B. 156/RGIA, F. 468, liste 1, n\u00B0 3888, 1773, p. 156), para\u00EEt, en effet, d\u00E9risoire (dix roubles cinquante kopecks par archine) par rapport au co\u00FBt de la tenture dite \u00AB au Paon et au Faisan \u00BB (inv. MT 1278), livr\u00E9e en 1778 pour vingt-cinq roubles l'archine.\nCette capacit\u00E9 de Philippe de Lasalle \u00E0 maintenir son activit\u00E9 durant la grande crise de 1771-1772 gr\u00E2ce \u00E0 l'invention du semple\u00A0amovible et \u00E0 la production d'\u00E9toffes m\u00E9lang\u00E9es, en soie,\u00A0coton ou lin\u00A0et schappe, a peu \u00E9t\u00E9 soulign\u00E9e.\u00A0Elle est pourtant remarqu\u00E9e par ses contemporains.\nAu d\u00E9but de l'ann\u00E9e 1778, Philippe de Lasalle fait rappeler l'\u00E9tat de ses travaux au Directeur g\u00E9n\u00E9ral des Finances (Archives nationales de France, F121444A, 6 janvier 1778). Parmi les services qu'il a rendus \u00E0 la Fabrique lyonnaise, il rappelle qu'\u00AB il a fait consid\u00E9rablement travailler les ouvriers de Lyon en \u00E9toffes pour meubles pour la Russie, ou il entrait tr\u00E8s peu de soye, beaucoup de main d'\u0153uvre et dont les fleurs s'ex\u00E9cutoient avec le rebus des cocons qu'il faisoit filer. \u00BB Il obtient peu de temps apr\u00E8s une gratification de six mille livres, dont Jacques Necker l'informe dans une lettre dat\u00E9e du 13 juin, o\u00F9 il pr\u00E9cise : \u00AB Je s\u00E7ais aussi que vous av\u00E9s cr\u00E9\u00E9 dans la partie des meubles une branche de Commerce qui dans des tems de cessation de travail a occup\u00E9 un grand nombre d'ouvriers et que vous av\u00E9s \u00E9t\u00E9 autoris\u00E9 \u00E0 cette occasion par le Conseil a sortir des r\u00E8gles prescrites par les Reglemens de la Fabrique en vous assujettissant a une marque distinctive ; les remerciemens que vous ont faits en 1772 les syndics et Mrs Gardes de la fabrique de Lyon \u00E0 l'occasion du portrait de Louis XV ex\u00E9cut\u00E9 en \u00E9toffes dont vous av\u00E9s faits pr\u00E9sent \u00E0 cette Com(munau)t\u00E9 prouvent jusqu'\u00E0 quel point vous av\u00E9s port\u00E9 l'art du dessein et de la fabrication. \u00BB Necker s'est pr\u00E9alablement fait remettre un rapport (Archives nationales de France, F121444A) sur Philippe de Lasalle, dans lequel on apprend que le fabricant fut autoris\u00E9 \u00E0 \u00AB s'\u00E9carter des m\u00E9thodes usit\u00E9es de fabriquer les \u00E9toffes, en mettant une marque distinctive, pour laisser \u00E0 son g\u00E9nie l'essort dont il avait besoin, et l'on a vu sortir de son pinceau des chefs-d'\u0153uvre dans le genre d'\u00E9toffes pour meubles, en mati\u00E8re de laine, fil et bourre de soye qu'il faisait pr\u00E9parer \u00E0 sa mani\u00E8re, ce qui a prodigieusement occup\u00E9 de bras dans des temps mesme de cessation d'ouvrages et ses \u00E9toffes ont orn\u00E9 les Palais des Rois et ceux de l'imp\u00E9ratrice de Russie qui a consid\u00E9rablement fait travailler la ville de Lyon dans cette nouvelle branche d'industrie. \u00BB\nPlusieurs tentures conserv\u00E9es au mus\u00E9e des Tissus sont des \u00E9toffes m\u00E9lang\u00E9es, comme la laize de satin jaune, broch\u00E9 de fleurs nuanc\u00E9es (inv. MT 2879), celle en damas gros de Tours, fond cr\u00E8me, broch\u00E9 d'un bouquet nuanc\u00E9 nou\u00E9 par un ruban bleu (inv. MT 2866), celle en damas gros de Tours, fond bleu, broch\u00E9 d'un bouquet nuanc\u00E9 nou\u00E9 par un ruban rose (inv. MT 24591.2),\u00A0celle en satin ponceau,\u00A0broch\u00E9 de fleurs nuanc\u00E9es (inv. MT 2867), la tenture dite \u00AB aux tourterelles dans des fleurs \u00BB sur fond de satin jaune (inv. MT 2871), la tenture dite \u00AB\u00A0aux colombes\u00A0\u00BB, sur fond satin ponceau\u00A0(inv. MT 29688)\u00A0ou la tenture \u00AB au faisan dor\u00E9 \u00BB (inv. MT 1286 et MT 36453), indiquant que ces \u00E9toffes\u00A0ont \u00E9t\u00E9 produites en 1771-1772, durant la crise subie par la Fabrique lyonnaise qui incita Philippe de Lasalle \u00E0 demander l'autorisation au Conseil de \u00AB sortir des r\u00E8gles prescrites par les Reglemens de la Fabrique \u00BB en produisant des \u00E9toffes m\u00E9lang\u00E9es, notamment pour l'exportation vers la Russie, \u00E0 la condition de s'assujettir \u00AB a une marque distinctive. \u00BB La pr\u00E9sence d'une lisi\u00E8re noire, sur un c\u00F4t\u00E9 de la laize,\u00A0permettait de distinguer \u00E0 l'\u0153il nu les \u00E9toffes m\u00E9lang\u00E9es, soie, schappe\u00A0et coton ou soie, schappe\u00A0et lin, produites durant la grande crise de la Fabrique lyonnaise par Philippe de Lasalle. Les \u00E9toffes\u00A0ex\u00E9cut\u00E9es par le\u00A0fabricant apr\u00E8s cette crise, tout en soie, ne pr\u00E9sentent plus cette particularit\u00E9.\nL'exemplaire de la tenture au Petit joueur de cornemuse conserv\u00E9 au mus\u00E9e des Tissus peut donc bien \u00EAtre dat\u00E9e des ann\u00E9es 1771-1772, au moment ou le go\u00FBt pour les \u00AB enfants \u00BB de Fran\u00E7ois Boucher \u00E9tait \u00E0 son paroxysme. Le succ\u00E8s de ce mod\u00E8le de Philippe de Lasalle semble avoir \u00E9t\u00E9 important, comme en t\u00E9moigne, par\u00A0exemple, le fragment conserv\u00E9 au Metropolitan Museum de New York (inv. 38.182.6) ou le second exemplaire du mus\u00E9e des Tissus (inv. MT 2884), acquis avec la collection de Fran\u00E7ois Bert en 1862, \u00E0 l'instar d'autres tentures du fabricant avec des sujet pastoraux ou champ\u00EAtres, comme le Jardinier (inv. MT 1284), la Bouqueti\u00E8re (inv. MT 2885) ou le couple form\u00E9 par le Jardinier et la Bouqueti\u00E8re (inv. MT 2876 et MT 2920).\nMaximilien Durand"@fr . . . . "0.95980000495910644531"^^ . "0.77109998464584350586"^^ . .