. "L'ornement Salvatoris, \u00E9galement mentionn\u00E9 comme \u00AB ornement Gobelin \u00BB (num\u00E9ro de patron 2953), a contribu\u00E9, comme l'ornement ang\u00E9lique (con\u00E7u en 1888-1889 et ex\u00E9cut\u00E9 entre 1891 et 1906), au succ\u00E8s de la maison Henry J.-A., puis Truchot J. et Grassis (1908-1919) puis Truchot J. et\u00A0Cie (la soci\u00E9t\u00E9 a cess\u00E9 son activit\u00E9 en 1977) durant les derni\u00E8res ann\u00E9es du XIXe si\u00E8cle et les premi\u00E8res d\u00E9cennies du XXe si\u00E8cle dans la branche des \u00AB ornements\u00A0d'\u00E9glise \u00BB.\nJoseph-Alphonse Henry (1836-1913), en succ\u00E9dant en 1867 \u00E0 la maison Henry fr\u00E8res et Jouve (1842-1867), poursuivait le but \u00AB d'appliquer aux ornements sacerdotaux l'heureux retour qui s'est fait de notre temps vers les \u0153uvres de go\u00FBt et de style. Quelque pr\u00E9cieuse que soit la mati\u00E8re employ\u00E9e, l'ornement, sans id\u00E9e autre que celle de l'\u00E9clat et de la richesse, perd promptement sa valeur, tandis que l'objet d'art ne subit l'influence du temps que pour \u00EAtre estim\u00E9 davantage \u00BB (Joseph-Alphonse Henry, Dais artistique tiss\u00E9 \u00E0 Lyon au point des Gobelins, 1874-1876, Lyon, 1876, p. 3-4). La maison Henry J.-A. est gratifi\u00E9e d'une m\u00E9daille d'argent \u00E0 l'Exposition universelle de Paris en 1867, d'une m\u00E9daille d'or \u00E0 l'Exposition maritime internationale du Havre en 1868, d'une m\u00E9daille d'honneur \u00E0 l'Exposition religieuse de Rome en 1870 et \u00E0 l'Exposition internationale de Lyon en 1872, d'une m\u00E9daille de progr\u00E8s et d'une m\u00E9daille de m\u00E9rite \u00E0 l'Exposition universelle de Vienne en 1873, d'une m\u00E9daille d'or \u00E0 l'Exposition universelle de Paris de 1878 et d'un Grand prix \u00E0 l'Exposition universelle de Paris en 1889, renouvel\u00E9 \u00E0 l'Exposition de 1900.\nJoseph-Alphonse Henry fait appel, pour cr\u00E9er ses mod\u00E8les les plus prestigieux, aux talents d'artistes confirm\u00E9s, comme Th\u00E9odore-Nicolas-Pierre Maillot (1826-1888) ou\u00A0Gaspard Poncet (1820-1892), de dessinateurs de fabrique sp\u00E9cialis\u00E9s comme Joanny Coquillat (1870-1941), Jean Leroudier (1838-1916), F\u00E9lix Pin\u00A0ou\u00A0Pierrette Paquier, de cabinets de dessin, comme celui d'Andr\u00E9 Vigouroux,\u00A0de metteurs en carte, comme Christophe Gerbaud, et des meilleures\u00A0brodeuses, comme Rose Paulet ou Marie-Anne Haug, \u00E9pouse Leroudier (1838-1908).\nL'ornement Salvatoris conna\u00EEt un succ\u00E8s\u00A0comparable \u00E0 celui de l'ornement ang\u00E9lique qui le pr\u00E9c\u00E8de de quelques ann\u00E9es. Il en est d'ailleurs, en quelque sorte, le pendant douloureux. L'ornement ang\u00E9lique\u00A0r\u00E9sumait l'histoire du Salut par le choix de quelques \u00E9v\u00E9nements joyeux ou glorieux de la vie du Christ (Nativit\u00E9 et Recouvrement au Temple, ainsi que\u00A0Remise des clefs \u00E0 saint Pierre et Entr\u00E9e \u00E0 J\u00E9rusalem pour les dalmatiques, Incarnation et Ascension pour la chasuble, Couronnement de la Vierge et Assembl\u00E9e des saints pour la chape). L'ensemble Salvatoris adopte une iconographie li\u00E9e \u00E0 la c\u00E9l\u00E9bration eucharistique, avec la repr\u00E9sentation du Sacrifice\u00A0parfait par la Crucifixion et la\u00A0D\u00E9ploration sur le corps du Christ. Les formules iconographiques\u00A0inaugur\u00E9es avec l'ornement ang\u00E9lique\u00A0y sont renouvel\u00E9es : l'ornementation figur\u00E9e recouvre enti\u00E8rement la surface des diff\u00E9rents \u00E9l\u00E9ments, les sc\u00E8nes sont accompagn\u00E9es par une foule d'anges, de ch\u00E9rubins ou de s\u00E9raphins, et la partie centrale de chaque\u00A0composition est occup\u00E9e par une mandorle rayonnante, or et argent. Certains dessins, comme pour l'\u00E9tole et le manipule, sont directement reproduits de l'ornement ang\u00E9lique, d'autres sont adapt\u00E9s, comme pour le voile de calice, o\u00F9 la composition est identique \u00E0 celle du voile ang\u00E9lique, \u00E0 l'exception des instruments de musique qui ont \u00E9t\u00E9 supprim\u00E9s de la main des anges, afin de s'adapter \u00E0 l'iconographie douloureuse de l'ensemble Salvatoris. Tandis que l'ornement ang\u00E9lique \u00E9tait de couleur or, l'ensemble Salvatoris est d'une riche polychromie, enrichie d'argent et d'or.\nElle\u00A0a s\u00FBrement contribu\u00E9 au succ\u00E8s de l'ornement Salvatoris. C'est aussi le cas de la technique elle-m\u00EAme, qui constitue une caract\u00E9ristique de la maison Henry J.-A., donnant, par le tissage,\u00A0un effet visuel proche des broderies \u00E0 l'or nu\u00E9 ex\u00E9cut\u00E9es aux XVe et XVIe si\u00E8cles. Cette technique, appel\u00E9e par le fabricant \u00AB point de Gobelins \u00BB,\u00A0d\u00E9signe\u00A0dans les ann\u00E9es 1870\u00A0un taffetas fa\u00E7onn\u00E9, dominante trame, \u00E0 d\u00E9cor par trame compl\u00E9mentaire en soie polychrome et fil\u00E9s m\u00E9talliques argent et or.\nLe premier ornement r\u00E9alis\u00E9 au \u00AB point de Gobelins \u00BB consign\u00E9 dans le livre de patrons, qui porte le num\u00E9ro 1001, est une croix de chasuble et une bande d'orfroi repr\u00E9sentant les Sept Sacrements, dat\u00E9e de janvier 1871. Le fabricant pr\u00E9cise alors dans le livre :\u00A0\u00AB Ce tissu qui ne s'est jamais [fait] \u00E0 Lyon avant ce jour est d\u00E9pos\u00E9 [au Conseil des Prud'hommes] pour 15 ans. \u00BB Le mus\u00E9e des Tissus conserve un exemplaire de la \u00AB chasuble au point des Gobelins, repr\u00E9sentant les Sept Sacrements, style XVe si\u00E8cle \u00BB (inv. MT 2015.5.7), g\u00E9n\u00E9reusement donn\u00E9e par la famille Truchot, qui est probablement celui pr\u00E9sent\u00E9 par la maison Henry J.-A. au salon des Arts d\u00E9coratifs de Lyon de 1884, avec d'autres \u00E9l\u00E9ments tiss\u00E9s au \u00AB point de Gobelins \u00BB, le dais de Notre-Dame de la Salette (dont les quatre pentes sont conserv\u00E9es au mus\u00E9e des Tisssus, inv. MT 49287.1 \u00E0 MT 49287.4, ainsi qu'un autre exemplaire de la pente orientale, inv. MT 2015.5.10, donn\u00E9 par la famille Truchot, qui constituait un \u00E9chantillon de d\u00E9monstration),\u00A0\u00AB\u00A0deux figurines, style Henri II\u00A0\u00BB, une \u00AB\u00A0Vierge\u00A0\u00BB\u00A0et une\u00A0autre \u00AB\u00A0Vierge [...], d'apr\u00E8s Doger, encadr\u00E9e\u00A0\u00BB. \nC'est effectivement avec l'exceptionnel dais pour le sanctuaire de Notre-Dame de la Salette, mis en \u0153uvre entre 1874 et 1876, que le \u00AB point de Gobelins \u00BB invent\u00E9 par Joseph-Alphonse Henry trouve son accomplissement le plus remarquable. Ce dais pr\u00E9sente sur ses quatre pentes quatre-vingt-huit figures de l'Histoire chr\u00E9tienne de la France. Elles avancent en cort\u00E8ges, conduits par les anges portant les eulogies ou la grappe du raisin de Canaan.\u00A0Les cort\u00E8ges convergent, sur la pente d'Orient, autour\u00A0de la Vierge douloureuse, soutenant le corps de son Fils au pied de la Croix, et, sur la pente d'Occident, autour du tr\u00F4ne du pape Pie IX. Les dessins ont \u00E9t\u00E9 fournis par Th\u00E9odore-Nicolas-Pierre Maillot. Le mus\u00E9e des Arts d\u00E9coratifs de Lyon conserve le dessin pr\u00E9paratoire pour la figure de Pie IX (inv. MAD 3431). La mise en carte du dais a \u00E9t\u00E9 ex\u00E9cut\u00E9e par Jean Leroudier. Les cartes sont conserv\u00E9es au mus\u00E9e des Tissus (inv. MT 49271.1 \u00E0 MT 49271.22). Dans le fascicule publi\u00E9 \u00E0 Lyon en 1876 par Joseph-Alphonse Henry pour pr\u00E9senter son dais artistique, le fabricant indique que \u00AB le point des Gobelins en soie et or fin est celui employ\u00E9 dans cet ouvrage. Le proc\u00E9d\u00E9 est nouveau et pour la premi\u00E8re fois en usage dans notre fabrique lyonnaise. \u00BB La qualit\u00E9 du dais de la Salette est si grande que le fabricant r\u00E9utilisera plusieurs des figures qui le composent dans d'autres r\u00E9alisations : les anges portant les eulogies ou la grappe de Canaan, par exemple, ont \u00E9t\u00E9 adapt\u00E9s pour les mises en carte 1127 et 1128 (conserv\u00E9es dans les archives de la maison Prelle, \u00E0 Lyon), en novembre 1875.\nC'est Joanny Coquillat qui fournit les dessins pour l'ornement Salvatoris. Ancien \u00E9l\u00E8ve de l'\u00C9cole des Beaux-Arts de Lyon, il est dessinateur de fabrique et illustrateur. Le mus\u00E9e des Tissus conserve deux dessins pr\u00E9paratoires pour le devant (inv. MT 49281.1) et pour le dos (inv. MT 49281.2) de la chasuble. Le devant pr\u00E9sente, au centre, la Vierge assise dans une mandorle rayonnante de couleur argent. Le corps mort de son Fils repose entre\u00A0ses genoux.\u00A0De la main droite, elle soutient le poignet de J\u00E9sus et \u00E9l\u00E8ve, de la gauche, la couronne d'\u00E9pines. De part et d'autre des galons verticaux se tiennent deux groupes de saints personnages, \u00E0 gauche de la composition, Marie-Madeleine \u00E9plor\u00E9e et les myrrhophores, \u00E0 droite, un homme barbu, Joseph d'Arimathie (plut\u00F4t que\u00A0Nicod\u00E8me) qui d\u00E9roule les bandelettes pour l'embaumement,\u00A0et saint Jean. En partie inf\u00E9rieure et au-dessus de la mandorle se pressent des anges, priant ou pleurant. Tous les personnages sont nimb\u00E9s d'or. Joanny Coquillat adapte plusieurs figures cr\u00E9es par Th\u00E9odore-Nicolas-Pierre Maillot pour le dais de la Salette ou Gaspard Poncet\u00A0pour l'ornement ang\u00E9lique. La figure de la Vierge est directement reprise de la pente orientale du dais. Les anges sont des adaptations plus libres de l'assembl\u00E9e c\u00E9leste qui appara\u00EEt sur les diff\u00E9rents \u00E9l\u00E9ments de l'ornement ang\u00E9lique.\nLe dos de la chasuble est orn\u00E9 de la Croix o\u00F9 J\u00E9sus repose, les yeux clos, sur un fond de mandorle rayonnante. Elle est dress\u00E9e sur le Golgotha, devant lequel se presse une foule. Au pied de la croix se tiennent sainte Marie-Madeleine, face contre terre, la Vierge et les saintes femmes, \u00E0 gauche, et saint Jean avec les soldats, \u00E0 droite. Des anges en pleurs entourent la mandorle et des ch\u00E9rubins occupent les \u00E9paules de la chasuble.\nL'ensemble Salvatoris est mis sur le march\u00E9 en 1897.\u00A0Il est tiss\u00E9 \u00E0 la forme, chaque \u00E9l\u00E9ment (devant, dos, \u00E9tole, voile de calice, bourse) \u00E9tant plac\u00E9 dans la largeur des laizes afin d'optimiser la production. Pour confectionner la chasuble de forme \u00AB fran\u00E7aise\u00A0\u00BB (il a exist\u00E9 aussi des exemplaires de type \u00AB espagnol \u00BB), il suffisait de d\u00E9couper le dos et le devant et de les assembler par une couture au niveau de l'encolure. Le \u00AB\u00A0point de Gobelins\u00A0\u00BB a \u00E9volu\u00E9 depuis le dais de la Salette : il ne s'agit plus d'un taffetas fa\u00E7onn\u00E9, mais d'un lampas dont la cha\u00EEne pi\u00E8ce est en coton (elle est dissimul\u00E9e par les trames) et la cha\u00EEne de liage en soie rouge, lanc\u00E9 de soie polychrome\u00A0(schappe et soie tussah), de fil\u00E9s m\u00E9talliques et de lames or et argent. Les trames sont ensuite d\u00E9coup\u00E9es sur l'envers. Le liage vertical accentue le \u00AB\u00A0trompe-l'\u0153il \u00BB de broderie cr\u00E9\u00E9 par le tissage, de m\u00EAme que le model\u00E9 des figures, soulign\u00E9\u00A0par des effets de \u00AB bercl\u00E9. \u00BB\nLe mus\u00E9e des Tissus conserve deux panneaux de pr\u00E9sentation de l'Exposition universelle de Paris en 1900 qui contiennent respectivement le devant et le dos de la chasuble Salvatoris, g\u00E9n\u00E9reusement donn\u00E9s par la famille Truchot (inv. MT 2015.5.8 et MT 2015.5.9).\u00A0C'est l'Exposition\u00A0\u00E0 l'issue de laquelle la maison Henry J.-A. est gratifi\u00E9e d'un Grand prix, et durant laquelle elle\u00A0d\u00E9voile \u00E9galement la chape ang\u00E9lique.\u00A0dont le mus\u00E9e des Tissus conserve deux exemplaires, l'un mont\u00E9 (inv. MT 51441.1) et l'autre tomb\u00E9 du m\u00E9tier (inv. MT 2015.5.11), don de la famille Truchot.\nLes archives de la maison Henry J.-A., conserv\u00E9es par la manufacture Prelle, \u00E0 Lyon, pr\u00E9servent les donn\u00E9es techniques relatives au patron 2953, un \u00E9chantillon de tissage de la figure de la Vierge du devant de la chasuble, la mise en carte du voile de calice (faite de six morceaux en papier quadrill\u00E9 gouach\u00E9, mesurant 117 centim\u00E8tres par 117 centim\u00E8tres, et dat\u00E9e du 13 janvier 1898)\u00A0et six croquis de placement pour le tissage \u00E0 disposition des \u00E9l\u00E9ments de l'ornement, dont le plus r\u00E9cent date de 1927, ce qui r\u00E9v\u00E8le le succ\u00E8s commercial de l'ornement Salvatoris, tiss\u00E9 pendant trois d\u00E9cennies, malgr\u00E9 sa polychromie qui ne correspond \u00E0 aucune couleur liturgique (sans dominante de couleur,\u00A0l'ornement est sens\u00E9, d'apr\u00E8s le fabricant, pouvoir servir tous les jours de l'ann\u00E9e, ce qui va \u00E0 l'encontre des r\u00E8gles canoniques, la Sacr\u00E9e Congr\u00E9gation des Rites ayant rappel\u00E9 \u00E0 plusieurs reprises que\u00A0seul l'or peut se substituer au blanc, au rouge et au vert) et un d\u00E9faut faisant appara\u00EEtre, \u00E0 l'envers, les inscriptions grecques et latines du titulus de la croix du Christ.\nOutre le devant et le dos mont\u00E9s sur leurs panneaux de pr\u00E9sentation et cet exemplaire de la chasuble Salvatoris, le mus\u00E9e des Tissus conserve deux autres chasubles du m\u00EAme ornement (inv. MT 2015.5.12 et MT 2015.5.14), un manipule (inv. MT 2015.5.15) et une bourse (inv. MT 2015.5.16), tous donn\u00E9s g\u00E9n\u00E9reusement par la famille Truchot.\nMaximilien Durand"@fr . . "Chasuble de type \u00AB fran\u00E7ais \u00BB appartenant \u00E0 l'ornement Salvatoris"@fr . . . . . "0.64240002632141113281"^^ . . . "0.55010002851486206055"^^ . . . "0.85729998350143432617"^^ . . . "Chasuble de type \u00AB fran\u00E7ais \u00BB appartenant \u00E0 l'ornement Salvatoris"@fr . . . . . . . . . . "87433" . "0.47269999980926513672"^^ . . . . . . . . . . . . . . "0.52029997110366821289"^^ . . . . . . . . "0.89999997615814208984"^^ . . "L'ornement Salvatoris, \u00E9galement mentionn\u00E9 comme \u00AB ornement Gobelin \u00BB (num\u00E9ro de patron 2953), a contribu\u00E9, comme l'ornement ang\u00E9lique (con\u00E7u en 1888-1889 et ex\u00E9cut\u00E9 entre 1891 et 1906), au succ\u00E8s de la maison Henry J.-A., puis Truchot J. et Grassis (1908-1919) puis Truchot J. et\u00A0Cie (la soci\u00E9t\u00E9 a cess\u00E9 son activit\u00E9 en 1977) durant les derni\u00E8res ann\u00E9es du XIXe si\u00E8cle et les premi\u00E8res d\u00E9cennies du XXe si\u00E8cle dans la branche des \u00AB ornements\u00A0d'\u00E9glise \u00BB.\nJoseph-Alphonse Henry (1836-1913), en succ\u00E9dant en 1867 \u00E0 la maison Henry fr\u00E8res et Jouve (1842-1867), poursuivait le but \u00AB d'appliquer aux ornements sacerdotaux l'heureux retour qui s'est fait de notre temps vers les \u0153uvres de go\u00FBt et de style. Quelque pr\u00E9cieuse que soit la mati\u00E8re employ\u00E9e, l'ornement, sans id\u00E9e autre que celle de l'\u00E9clat et de la richesse, perd promptement sa valeur, tandis que l'objet d'art ne subit l'influence du temps que pour \u00EAtre estim\u00E9 davantage \u00BB (Joseph-Alphonse Henry, Dais artistique tiss\u00E9 \u00E0 Lyon au point des Gobelins, 1874-1876, Lyon, 1876, p. 3-4). La maison Henry J.-A. est gratifi\u00E9e d'une m\u00E9daille d'argent \u00E0 l'Exposition universelle de Paris en 1867, d'une m\u00E9daille d'or \u00E0 l'Exposition maritime internationale du Havre en 1868, d'une m\u00E9daille d'honneur \u00E0 l'Exposition religieuse de Rome en 1870 et \u00E0 l'Exposition internationale de Lyon en 1872, d'une m\u00E9daille de progr\u00E8s et d'une m\u00E9daille de m\u00E9rite \u00E0 l'Exposition universelle de Vienne en 1873, d'une m\u00E9daille d'or \u00E0 l'Exposition universelle de Paris de 1878 et d'un Grand prix \u00E0 l'Exposition universelle de Paris en 1889, renouvel\u00E9 \u00E0 l'Exposition de 1900.\nJoseph-Alphonse Henry fait appel, pour cr\u00E9er ses mod\u00E8les les plus prestigieux, aux talents d'artistes confirm\u00E9s, comme Th\u00E9odore-Nicolas-Pierre Maillot (1826-1888) ou\u00A0Gaspard Poncet (1820-1892), de dessinateurs de fabrique sp\u00E9cialis\u00E9s comme Joanny Coquillat (1870-1941), Jean Leroudier (1838-1916), F\u00E9lix Pin\u00A0ou\u00A0Pierrette Paquier, de cabinets de dessin, comme celui d'Andr\u00E9 Vigouroux,\u00A0de metteurs en carte, comme Christophe Gerbaud, et des meilleures\u00A0brodeuses, comme Rose Paulet ou Marie-Anne Haug, \u00E9pouse Leroudier (1838-1908).\nL'ornement Salvatoris conna\u00EEt un succ\u00E8s\u00A0comparable \u00E0 celui de l'ornement ang\u00E9lique qui le pr\u00E9c\u00E8de de quelques ann\u00E9es. Il en est d'ailleurs, en quelque sorte, le pendant douloureux. L'ornement ang\u00E9lique\u00A0r\u00E9sumait l'histoire du Salut par le choix de quelques \u00E9v\u00E9nements joyeux ou glorieux de la vie du Christ (Nativit\u00E9 et Recouvrement au Temple, ainsi que\u00A0Remise des clefs \u00E0 saint Pierre et Entr\u00E9e \u00E0 J\u00E9rusalem pour les dalmatiques, Incarnation et Ascension pour la chasuble, Couronnement de la Vierge et Assembl\u00E9e des saints pour la chape). L'ensemble Salvatoris adopte une iconographie li\u00E9e \u00E0 la c\u00E9l\u00E9bration eucharistique, avec la repr\u00E9sentation du Sacrifice\u00A0parfait par la Crucifixion et la\u00A0D\u00E9ploration sur le corps du Christ. Les formules iconographiques\u00A0inaugur\u00E9es avec l'ornement ang\u00E9lique\u00A0y sont renouvel\u00E9es : l'ornementation figur\u00E9e recouvre enti\u00E8rement la surface des diff\u00E9rents \u00E9l\u00E9ments, les sc\u00E8nes sont accompagn\u00E9es par une foule d'anges, de ch\u00E9rubins ou de s\u00E9raphins, et la partie centrale de chaque\u00A0composition est occup\u00E9e par une mandorle rayonnante, or et argent. Certains dessins, comme pour l'\u00E9tole et le manipule, sont directement reproduits de l'ornement ang\u00E9lique, d'autres sont adapt\u00E9s, comme pour le voile de calice, o\u00F9 la composition est identique \u00E0 celle du voile ang\u00E9lique, \u00E0 l'exception des instruments de musique qui ont \u00E9t\u00E9 supprim\u00E9s de la main des anges, afin de s'adapter \u00E0 l'iconographie douloureuse de l'ensemble Salvatoris. Tandis que l'ornement ang\u00E9lique \u00E9tait de couleur or, l'ensemble Salvatoris est d'une riche polychromie, enrichie d'argent et d'or.\nElle\u00A0a s\u00FBrement contribu\u00E9 au succ\u00E8s de l'ornement Salvatoris. C'est aussi le cas de la technique elle-m\u00EAme, qui constitue une caract\u00E9ristique de la maison Henry J.-A., donnant, par le tissage,\u00A0un effet visuel proche des broderies \u00E0 l'or nu\u00E9 ex\u00E9cut\u00E9es aux XVe et XVIe si\u00E8cles. Cette technique, appel\u00E9e par le fabricant \u00AB point de Gobelins \u00BB,\u00A0d\u00E9signe\u00A0dans les ann\u00E9es 1870\u00A0un taffetas fa\u00E7onn\u00E9, dominante trame, \u00E0 d\u00E9cor par trame compl\u00E9mentaire en soie polychrome et fil\u00E9s m\u00E9talliques argent et or.\nLe premier ornement r\u00E9alis\u00E9 au \u00AB point de Gobelins \u00BB consign\u00E9 dans le livre de patrons, qui porte le num\u00E9ro 1001, est une croix de chasuble et une bande d'orfroi repr\u00E9sentant les Sept Sacrements, dat\u00E9e de janvier 1871. Le fabricant pr\u00E9cise alors dans le livre :\u00A0\u00AB Ce tissu qui ne s'est jamais [fait] \u00E0 Lyon avant ce jour est d\u00E9pos\u00E9 [au Conseil des Prud'hommes] pour 15 ans. \u00BB Le mus\u00E9e des Tissus conserve un exemplaire de la \u00AB chasuble au point des Gobelins, repr\u00E9sentant les Sept Sacrements, style XVe si\u00E8cle \u00BB (inv. MT 2015.5.7), g\u00E9n\u00E9reusement donn\u00E9e par la famille Truchot, qui est probablement celui pr\u00E9sent\u00E9 par la maison Henry J.-A. au salon des Arts d\u00E9coratifs de Lyon de 1884, avec d'autres \u00E9l\u00E9ments tiss\u00E9s au \u00AB point de Gobelins \u00BB, le dais de Notre-Dame de la Salette (dont les quatre pentes sont conserv\u00E9es au mus\u00E9e des Tisssus, inv. MT 49287.1 \u00E0 MT 49287.4, ainsi qu'un autre exemplaire de la pente orientale, inv. MT 2015.5.10, donn\u00E9 par la famille Truchot, qui constituait un \u00E9chantillon de d\u00E9monstration),\u00A0\u00AB\u00A0deux figurines, style Henri II\u00A0\u00BB, une \u00AB\u00A0Vierge\u00A0\u00BB\u00A0et une\u00A0autre \u00AB\u00A0Vierge [...], d'apr\u00E8s Doger, encadr\u00E9e\u00A0\u00BB. \nC'est effectivement avec l'exceptionnel dais pour le sanctuaire de Notre-Dame de la Salette, mis en \u0153uvre entre 1874 et 1876, que le \u00AB point de Gobelins \u00BB invent\u00E9 par Joseph-Alphonse Henry trouve son accomplissement le plus remarquable. Ce dais pr\u00E9sente sur ses quatre pentes quatre-vingt-huit figures de l'Histoire chr\u00E9tienne de la France. Elles avancent en cort\u00E8ges, conduits par les anges portant les eulogies ou la grappe du raisin de Canaan.\u00A0Les cort\u00E8ges convergent, sur la pente d'Orient, autour\u00A0de la Vierge douloureuse, soutenant le corps de son Fils au pied de la Croix, et, sur la pente d'Occident, autour du tr\u00F4ne du pape Pie IX. Les dessins ont \u00E9t\u00E9 fournis par Th\u00E9odore-Nicolas-Pierre Maillot. Le mus\u00E9e des Arts d\u00E9coratifs de Lyon conserve le dessin pr\u00E9paratoire pour la figure de Pie IX (inv. MAD 3431). La mise en carte du dais a \u00E9t\u00E9 ex\u00E9cut\u00E9e par Jean Leroudier. Les cartes sont conserv\u00E9es au mus\u00E9e des Tissus (inv. MT 49271.1 \u00E0 MT 49271.22). Dans le fascicule publi\u00E9 \u00E0 Lyon en 1876 par Joseph-Alphonse Henry pour pr\u00E9senter son dais artistique, le fabricant indique que \u00AB le point des Gobelins en soie et or fin est celui employ\u00E9 dans cet ouvrage. Le proc\u00E9d\u00E9 est nouveau et pour la premi\u00E8re fois en usage dans notre fabrique lyonnaise. \u00BB La qualit\u00E9 du dais de la Salette est si grande que le fabricant r\u00E9utilisera plusieurs des figures qui le composent dans d'autres r\u00E9alisations : les anges portant les eulogies ou la grappe de Canaan, par exemple, ont \u00E9t\u00E9 adapt\u00E9s pour les mises en carte 1127 et 1128 (conserv\u00E9es dans les archives de la maison Prelle, \u00E0 Lyon), en novembre 1875.\nC'est Joanny Coquillat qui fournit les dessins pour l'ornement Salvatoris. Ancien \u00E9l\u00E8ve de l'\u00C9cole des Beaux-Arts de Lyon, il est dessinateur de fabrique et illustrateur. Le mus\u00E9e des Tissus conserve deux dessins pr\u00E9paratoires pour le devant (inv. MT 49281.1) et pour le dos (inv. MT 49281.2) de la chasuble. Le devant pr\u00E9sente, au centre, la Vierge assise dans une mandorle rayonnante de couleur argent. Le corps mort de son Fils repose entre\u00A0ses genoux.\u00A0De la main droite, elle soutient le poignet de J\u00E9sus et \u00E9l\u00E8ve, de la gauche, la couronne d'\u00E9pines. De part et d'autre des galons verticaux se tiennent deux groupes de saints personnages, \u00E0 gauche de la composition, Marie-Madeleine \u00E9plor\u00E9e et les myrrhophores, \u00E0 droite, un homme barbu, Joseph d'Arimathie (plut\u00F4t que\u00A0Nicod\u00E8me) qui d\u00E9roule les bandelettes pour l'embaumement,\u00A0et saint Jean. En partie inf\u00E9rieure et au-dessus de la mandorle se pressent des anges, priant ou pleurant. Tous les personnages sont nimb\u00E9s d'or. Joanny Coquillat adapte plusieurs figures cr\u00E9es par Th\u00E9odore-Nicolas-Pierre Maillot pour le dais de la Salette ou Gaspard Poncet\u00A0pour l'ornement ang\u00E9lique. La figure de la Vierge est directement reprise de la pente orientale du dais. Les anges sont des adaptations plus libres de l'assembl\u00E9e c\u00E9leste qui appara\u00EEt sur les diff\u00E9rents \u00E9l\u00E9ments de l'ornement ang\u00E9lique.\nLe dos de la chasuble est orn\u00E9 de la Croix o\u00F9 J\u00E9sus repose, les yeux clos, sur un fond de mandorle rayonnante. Elle est dress\u00E9e sur le Golgotha, devant lequel se presse une foule. Au pied de la croix se tiennent sainte Marie-Madeleine, face contre terre, la Vierge et les saintes femmes, \u00E0 gauche, et saint Jean avec les soldats, \u00E0 droite. Des anges en pleurs entourent la mandorle et des ch\u00E9rubins occupent les \u00E9paules de la chasuble.\nL'ensemble Salvatoris est mis sur le march\u00E9 en 1897.\u00A0Il est tiss\u00E9 \u00E0 la forme, chaque \u00E9l\u00E9ment (devant, dos, \u00E9tole, voile de calice, bourse) \u00E9tant plac\u00E9 dans la largeur des laizes afin d'optimiser la production. Pour confectionner la chasuble de forme \u00AB fran\u00E7aise\u00A0\u00BB (il a exist\u00E9 aussi des exemplaires de type \u00AB espagnol \u00BB), il suffisait de d\u00E9couper le dos et le devant et de les assembler par une couture au niveau de l'encolure. Le \u00AB\u00A0point de Gobelins\u00A0\u00BB a \u00E9volu\u00E9 depuis le dais de la Salette : il ne s'agit plus d'un taffetas fa\u00E7onn\u00E9, mais d'un lampas dont la cha\u00EEne pi\u00E8ce est en coton (elle est dissimul\u00E9e par les trames) et la cha\u00EEne de liage en soie rouge, lanc\u00E9 de soie polychrome\u00A0(schappe et soie tussah), de fil\u00E9s m\u00E9talliques et de lames or et argent. Les trames sont ensuite d\u00E9coup\u00E9es sur l'envers. Le liage vertical accentue le \u00AB\u00A0trompe-l'\u0153il \u00BB de broderie cr\u00E9\u00E9 par le tissage, de m\u00EAme que le model\u00E9 des figures, soulign\u00E9\u00A0par des effets de \u00AB bercl\u00E9. \u00BB\nLe mus\u00E9e des Tissus conserve deux panneaux de pr\u00E9sentation de l'Exposition universelle de Paris en 1900 qui contiennent respectivement le devant et le dos de la chasuble Salvatoris, g\u00E9n\u00E9reusement donn\u00E9s par la famille Truchot (inv. MT 2015.5.8 et MT 2015.5.9).\u00A0C'est l'Exposition\u00A0\u00E0 l'issue de laquelle la maison Henry J.-A. est gratifi\u00E9e d'un Grand prix, et durant laquelle elle\u00A0d\u00E9voile \u00E9galement la chape ang\u00E9lique.\u00A0dont le mus\u00E9e des Tissus conserve deux exemplaires, l'un mont\u00E9 (inv. MT 51441.1) et l'autre tomb\u00E9 du m\u00E9tier (inv. MT 2015.5.11), don de la famille Truchot.\nLes archives de la maison Henry J.-A., conserv\u00E9es par la manufacture Prelle, \u00E0 Lyon, pr\u00E9servent les donn\u00E9es techniques relatives au patron 2953, un \u00E9chantillon de tissage de la figure de la Vierge du devant de la chasuble, la mise en carte du voile de calice (faite de six morceaux en papier quadrill\u00E9 gouach\u00E9, mesurant 117 centim\u00E8tres par 117 centim\u00E8tres, et dat\u00E9e du 13 janvier 1898)\u00A0et six croquis de placement pour le tissage \u00E0 disposition des \u00E9l\u00E9ments de l'ornement, dont le plus r\u00E9cent date de 1927, ce qui r\u00E9v\u00E8le le succ\u00E8s commercial de l'ornement Salvatoris, tiss\u00E9 pendant trois d\u00E9cennies, malgr\u00E9 sa polychromie qui ne correspond \u00E0 aucune couleur liturgique (sans dominante de couleur,\u00A0l'ornement est sens\u00E9, d'apr\u00E8s le fabricant, pouvoir servir tous les jours de l'ann\u00E9e, ce qui va \u00E0 l'encontre des r\u00E8gles canoniques, la Sacr\u00E9e Congr\u00E9gation des Rites ayant rappel\u00E9 \u00E0 plusieurs reprises que\u00A0seul l'or peut se substituer au blanc, au rouge et au vert) et un d\u00E9faut faisant appara\u00EEtre, \u00E0 l'envers, les inscriptions grecques et latines du titulus de la croix du Christ.\nOutre le devant et le dos mont\u00E9s sur leurs panneaux de pr\u00E9sentation et cet exemplaire de la chasuble Salvatoris, le mus\u00E9e des Tissus conserve deux autres chasubles du m\u00EAme ornement (inv. MT 2015.5.12 et MT 2015.5.14), un manipule (inv. MT 2015.5.15) et une bourse (inv. MT 2015.5.16), tous donn\u00E9s g\u00E9n\u00E9reusement par la famille Truchot.\nMaximilien Durand"@fr . . . . . . "0.82020002603530883789"^^ . . "0.53609997034072875977"^^ . . . . . . . . . . . . . . . . "0.80629998445510864258"^^ . . . . . . "0.79470002651214599609"^^ . . . . "0.8069000244140625"^^ . . .