. "La laize, un taffetas \u00E0 fil double de couleur cr\u00E8me, est peinte de rayures de couleur jaune\u00A0citron (dix) qui contiennent alternativement une tige sinueuse, charg\u00E9e de fleurs,\u00A0\u00E9panouies ou en boutons, de feuilles et de fruits, et d'un d\u00E9licat sem\u00E9 de\u00A0fleurs, boutons et fruits.\nLe\u00A0taffetas fil double, la nature des lisi\u00E8res et la largeur de la laize, mais aussi la technique de peinture utilis\u00E9e et le\u00A0type de d\u00E9cor d\u00E9signent une production chinoise, probablement cantonnaise, faite pour l'export, \u00E0 destination du march\u00E9 europ\u00E9en. L'alternance de bandes peintes jaunes et de bandes en r\u00E9serve de taffetas cr\u00E8me, o\u00F9 se d\u00E9ploient les\u00A0d\u00E9licats motifs floraux, imite probablement des productions chinoises plus prestigieuses, elles aussi destin\u00E9es au march\u00E9 occidental, fond taffetas et bandes satin, peintes de rinceaux fleuris et de fleurs d\u00E9tach\u00E9es, comme celle utilis\u00E9e vers 1796 dans la chambre du roi Fr\u00E9d\u00E9ric-Guillaume II de Prusse au ch\u00E2teau de Charlottenburg, d\u00E9truite durant la Seconde Guerre mondiale, mais dont la Fondation Abegg de Riggisberg conserve un exemplaire tr\u00E8s comparable (inv. Nr. 80 a).\nLa laize g\u00E9n\u00E9reusement offerte au mus\u00E9e\u00A0des Tissus par Xavier Bonnet a peut-\u00EAtre \u00E9t\u00E9 produite\u00A0plus t\u00F4t que l'exemplaire de la Fondation Abegg, comme le sugg\u00E8re le dessin des rinceaux sinueux ou du\u00A0sem\u00E9 de fleurs. Le donateur a signal\u00E9 une certaine proximit\u00E9, dans l'alternance de\u00A0rayures jaunes et de motifs de tige fleurie,\u00A0avec l'\u00E9toffe constituant la robe \u00AB \u00E0 la turque \u00BB d'une femme anonyme peinte par Louis-Michel Van Loo (1707-1771) en 1758 sur une toile conserv\u00E9e au Hillwood Museum de Washington (inv. 51.3).\nLes soies peintes \u00E0 Canton et export\u00E9es vers l'Europe \u00E9taient d\u00E9sign\u00E9es sous le terme de \u00AB p\u00E9kins \u00BB\u00A0(on pense, par exemple, au \u00AB p\u00E9kin fond citron \u00E0 fleurs\u00A0\u00BB provenant du Garde-Meuble employ\u00E9 en avril 1785 pour garnir le lit \u00E0 la polonaise \u00E0 deux chevets cintr\u00E9s de la chambre des bains de Louis XVI \u00E0 Compi\u00E8gne, et confectionner le meuble de cette m\u00EAme chambre,\u00A0utilis\u00E9 entre avril et juin 1786 pour la chambre de l'archiduc Ferdinand, fr\u00E8re de la reine, lors de so passage \u00E0 Versailles,\u00A0puis finalement en 1787 dans la chambre des bains du roi \u00E0 Fontainebleau en 1787 ; voir Soieries de Lyon. Commandes royales au XVIIIe si\u00E8cle (1730-1800), Les dossiers du mus\u00E9e des Tissus, 2, Lyon, mus\u00E9e des Tissus, 1988, n\u00B0 39, p. 120). Plus tard, le terme \u00AB p\u00E9kin \u00BB d\u00E9signera un tissu \u00E0 bandes d'armures diff\u00E9rentes, dispos\u00E9es parall\u00E8lement \u00E0 la cha\u00EEne. C'est peut-\u00EAtre le d\u00E9cor peint de ces \u00E9toffes chinoises \u00E0 rayures (bandes satin sur fond taffetas ou simulation de bandes en peinture) qui explique ce glissement s\u00E9mantique.\nMaximilien Durand"@fr . . .