. . "Cette robe de statuette d\u2019Enfant J\u00E9sus pr\u00E9sente plusieurs singularit\u00E9s. Elle est inscrite \u00E0 l\u2019inventaire du mus\u00E9e des Tissus, lors de son acquisition comme \u00E9tant un : \u00AB manteau de statuette, moire rouge, d\u00E9cor de rinceaux, application surbrod\u00E9e or et soies coulr. Fin XVIe si\u00E8cle. \u00BB Elle est, en effet, confectionn\u00E9e dans un taffetas moir\u00E9 \u00E0 l\u2019antique de couleur vieux rose. De forme \u00E9vas\u00E9e vers le bas, elle comporte des manches courtes et une encolure d\u00E9coup\u00E9e \u00E0 l\u2019avant et \u00E0 l\u2019arri\u00E8re pour faciliter l\u2019enfilage sur la statue. Dans la partie inf\u00E9rieure du v\u00EAtement, mais seulement sur l\u2019avant, et tout autour des manches, un d\u00E9cor d\u2019applications dessine des rinceaux feuillus, avec des fleurs color\u00E9es. Il s\u2019agit d\u2019une toile de lin ajour\u00E9e, brod\u00E9e au point lanc\u00E9 et au point de n\u0153ud, bord\u00E9e de couchures pour dessiner le motif en relief. Quelques d\u00E9tails sont r\u00E9alis\u00E9s avec un fil\u00E9 m\u00E9tallique double, dor\u00E9, des cannetilles lamin\u00E9es ou de petits bouillons. Sur l\u2019avant, l\u2019encolure est soulign\u00E9e par un galon fa\u00E7onn\u00E9. Cinq fleurs stylis\u00E9es en relief, r\u00E9alis\u00E9es en fil\u00E9 m\u00E9tallique, ponctuent le galon, et une fine tresse \u00E0 quatre brins dor\u00E9s barre la poitrine. \nIl est certain que la moire est attest\u00E9e d\u00E8s la Renaissance. Mais cette technique d\u2019ennoblissement, et non de tissage, qui consiste \u00E0 \u00E9craser les c\u00F4tes d\u2019une \u00E9toffe serr\u00E9e pr\u00E9sentant un grain suffisant pour y cr\u00E9er des plages planes renvoyant la lumi\u00E8re avec davantage de brillance, conna\u00EEt un essor important surtout \u00E0 partir du XVIIIe si\u00E8cle. La robe de l\u2019Enfant J\u00E9sus pr\u00E9sente les filets caract\u00E9ristiques des \u00E9toffes ayant subi ce traitement, mais elle a conserv\u00E9, surtout, sur l\u2019avant et sur le dos, le pli de moire caract\u00E9ristique. L\u2019\u00E9crasement se faisait au XVIIIe si\u00E8cle apr\u00E8s pliage longitudinal du l\u00E9 sur lui-m\u00EAme, lisi\u00E8re sur lisi\u00E8re (\u00AB dossage \u00BB), en faisant d\u00E9vier longitudinalement les c\u00F4tes pour les faire s\u2019\u00E9craser les unes sur les autres. C\u2019est le proc\u00E9d\u00E9 qu\u2019on d\u00E9signe aujourd\u2019hui sous le nom de \u00AB moire antique \u00BB. Le dessin est alors sym\u00E9trique de part et d\u2019autre du pli m\u00E9dian, sens cha\u00EEne. \nLa partie inf\u00E9rieure de la robe est orn\u00E9e d\u2019une broderie d\u2019application, faite de rinceaux \u00E0 bords festonn\u00E9s sur toile \u00E0 fond d\u00E9coup\u00E9. Des broderies de ce type, qui imitent les dentelles ont parfois \u00E9t\u00E9 attribu\u00E9es au d\u00E9but du XVIIe si\u00E8cle. En effet, les enroulements v\u00E9g\u00E9taux \u00E9voquent les productions de dentelles flamandes ou v\u00E9nitiennes. Mais on sait la permanence de ces motifs de rinceaux qui perdur\u00E8rent durant tout le XVIIIe si\u00E8cle et m\u00EAme au-del\u00E0. \nLes applications de galon fa\u00E7onn\u00E9, les tresses m\u00E9talliques et les canetilles diverses, ainsi que les fleurs en fil\u00E9 m\u00E9tallique paraissent bien improbables, sous cet aspect, \u00E0 la fin du XVIe si\u00E8cle, tout comme l\u2019usage d\u2019une moire antique brod\u00E9e d\u2019applications. Une datation plus tardive, dans les derni\u00E8res d\u00E9cennies du XVIIIe si\u00E8cle semblerait plus prudente. Elle correspondrait aussi \u00E0 une p\u00E9riode d\u2019intense d\u00E9votion \u00E0 l\u2019effigie de l\u2019Enfant J\u00E9sus, qu\u2019on prenait soin de v\u00EAtir, dans les couvents, de v\u00EAtements \u00E9voquant les ornements liturgiques. Or la forme de cette robe s\u2019apparente \u00E0 celle de la dalmatique. \nMaximilien Durand"@fr . .