. "Plusieurs bandes et galons, d\u00E9coup\u00E9s dans une m\u00EAme \u00E9toffe de soie, constituaient les parements d\u2019un v\u00EAtement d\u2019apparat. Les fragments sont encore, pour la plupart, bord\u00E9s d\u2019un repli de couture et de traces de piq\u00FBre d\u2019aiguille. Albert Gayet annonce pour la premi\u00E8re fois la d\u00E9couverte de manteaux d\u2019homme d\u00E9cor\u00E9s de soieries en mai 1897, dans la Revue de l\u2019art ancien et moderne. Quelques semaines plus tard, l\u2019arch\u00E9ologue publie dans les Annales du mus\u00E9e Guimet une br\u00E8ve description de ces manteaux : \u00AB Chacun est rev\u00EAtu du costume qu\u2019il avait l\u2019habitude de porter, costume fort riche souvent, et de couleurs \u00E9clatantes. Celui des hommes est identique aux mod\u00E8les que nous montrent les vieilles fresques : manteaux longs, aux manches \u00E9vas\u00E9es sur la main, et bord\u00E9s, sur tout leur pourtour, de larges bandes de soieries broch\u00E9es (sic). \u00BB En novembre, il r\u00E9dige sous le pseudonyme d\u2019Albert de Fl\u00E9e, dans La Nouvelle Revue, un article sur les fouilles men\u00E9es par le mus\u00E9e Guimet \u00E0 Antino\u00E9. Il y mentionne encore le \u00AB manteau long, avec col et revers, aux manches \u00E9vas\u00E9es \u00BB ; il d\u00E9crit aussi plus pr\u00E9cis\u00E9ment un v\u00EAtement dont les applications de soieries sont aujourd\u2019hui au Louvre (inv. E 29212) et au mus\u00E9e des Tissus (inv. MT 26812.8, MT 40310 et 40311). Mal \u00E9quip\u00E9 durant sa campagne de 1897, il ne peut emporter qu\u2019un exemplaire complet de manteau, bri\u00E8vement d\u00E9crit dans les Annales du mus\u00E9e Guimet : \u00AB manteau d\u2019homme, tissu cha\u00EEne lin (sic), trame laine, teint couleur pourpre avec parements et revers laine bleue, broch\u00E9e de fleurettes brun rouge. \u00BB Des autres, il n\u2019emporte \u00E0 Paris que les parements de soierie, bien souvent sous forme de fragments qui sont rapidement dispers\u00E9s.\nUn vestige de l\u2019exemplaire lyonnais fait partie de la collection du mus\u00E9e du Louvre. Il est d\u00E9pos\u00E9 au mus\u00E9e des Tissus (inv. E 29393). Une gouache d'\u00C9mile Chazot, dat\u00E9e de 1909 et repr\u00E9sentant la soierie, est \u00E9galement conserv\u00E9e au mus\u00E9e du Louvre. D\u2019autres fragments de ce samit ont \u00E9t\u00E9 donn\u00E9s au dessinateur Jules-Paul G\u00E9rard. Ils sont aujourd\u2019hui conserv\u00E9s \u00E0 Los Angeles, dans la Llyod Cotsen Textile Traces Collection (inv. T. 1370 a-d). \u00C0 Lyon, les bandes les plus larges peuvent avoir garni les revers d\u2019un manteau de laine gratt\u00E9e. Les galons devaient longer les bordures du v\u00EAtement ou recouvrir ses coutures, dans le dos. Malheureusement, on ne sait rien du manteau d\u2019origine. Le samit fa\u00E7onn\u00E9 pr\u00E9sente un d\u00E9cor ivoire, ocre et vert, dispos\u00E9 en registres superpos\u00E9s sur un fond bleu fonc\u00E9. Une succession de masques aux longues m\u00E8ches ondul\u00E9es, le front couronn\u00E9 d\u2019un haut diad\u00E8me en \u00E9ventail et le menton soulign\u00E9 d\u2019une feuille trilob\u00E9e, compose un premier registre. Sur le second apparaissent des tiges feuillues qui s\u2019entrouvrent pour donner naissance \u00E0 deux protomes de griffon. Les monstres se regardent, une aile d\u00E9ploy\u00E9e derri\u00E8re leur t\u00EAte. Les deux registres, superpos\u00E9s, se r\u00E9p\u00E9taient verticalement.\nLa coupe des pr\u00E9cieux manteaux d\u00E9crits par Albert Gayet elle-m\u00EAme semble \u00E9trang\u00E8re \u00E0 l\u2019Empire romain et byzantin, tout comme le r\u00E9pertoire de leurs soieries, avec des masques, des animaux passants, des palmettes, des protomes de cr\u00E9atures, ou la r\u00E9p\u00E9tition des motifs en registres appartiennent au vocabulaire ornemental de la Perse sassanide. Les mat\u00E9riaux constitutifs de ces v\u00EAtements, aussi, la laine cachemire, les teintures \u00E0 la cochenille d\u2019Arm\u00E9nie et au kerm\u00E8s et jusqu\u2019\u00E0 la soie elle-m\u00EAme, paraissent d\u00E9signer une production ext\u00E9rieure \u00E0 l\u2019\u00C9gypte. La question de l\u2019origine de ces v\u00EAtements et du lieu de production de leurs garnitures a donc largement \u00E9t\u00E9 d\u00E9battue. L\u2019\u00E9toffe des bandes et des galons lyonnais partage de nombreux points communs avec plusieurs fragments d\u00E9couverts \u00E0 Antino\u00E9 en 1897, mais aussi avec les manchettes pr\u00E9sent\u00E9es dans le meuble \u00E0 volet de l\u2019exposition de 1898 ou les parements de certains des manteaux \u00E0 longues manches r\u00E9v\u00E9l\u00E9s au m\u00EAme moment au mus\u00E9e Guimet. Tous rel\u00E8vent manifestement d\u2019une tradition de tissage commune, puisqu\u2019il s\u2019agit de samits fa\u00E7onn\u00E9s, dont les cha\u00EEnes pr\u00E9sentent un fil pi\u00E8ce pour un fil de liage ; ils ont \u00E9t\u00E9 tiss\u00E9s avec quatre lats dont certains sont latt\u00E9s ou interrompus ; le d\u00E9cor est ivoire, ocre et vert sur fond bleu fonc\u00E9 ou bleu fonc\u00E9, ivoire et vert sur fond ocre, et le r\u00E9pertoire est toujours inspir\u00E9 par la Perse sassanide, mais fortement r\u00E9interpr\u00E9t\u00E9 ; les m\u00EAmes irr\u00E9gularit\u00E9s dans le passage entre le fond et le d\u00E9cor sont visibles d\u2019un exemplaire \u00E0 l\u2019autre. Ces caract\u00E9ristiques semblent bien exclure une production orientale. Elles appartiennent pleinement \u00E0 la tradition de tissage m\u00E9diterran\u00E9enne et plus sp\u00E9cifiquement \u00E9gyptienne.\nQuelques exemples de soieries similaires ou identiques d\u00E9couvertes dans des tombes diff\u00E9rentes laissent m\u00EAme supposer que des ateliers pouvaient r\u00E9pondre largement aux engouements suscit\u00E9s par la mode. Une soierie identique aux bandes et aux galons du mus\u00E9e des Tissus, par exemple, orne encore les bordures et les revers du manteau de couleur carmin port\u00E9 par la d\u00E9pouille du \u00AB dignitaire byzantin \u00BB qui repose au mus\u00E9e Bertrand de Ch\u00E2teauroux (inv. D 1218). Pourtant les fragments du mus\u00E9e des Tissus n\u2019ont pas \u00E9t\u00E9 pr\u00E9lev\u00E9s sur ce v\u00EAtement, puisqu\u2019ils ont \u00E9t\u00E9 d\u00E9couverts durant la campagne de 1897. Ils sont d\u00E9j\u00E0 mentionn\u00E9s dans le premier catalogue de la collection lyonnaise, paru en janvier 1902, alors que la s\u00E9pulture du \u00AB dignitaire byzantin \u00BB n\u2019\u00E9tait pas m\u00EAme mise au jour. Elle ne sera d\u00E9couverte que l\u2019ann\u00E9e suivante, au cours de la huiti\u00E8me campagne.\nSi la majorit\u00E9 de ces soieries a \u00E9t\u00E9 tiss\u00E9e sur une cha\u00EEne beige, quelques exemplaires ont \u00E9t\u00E9 r\u00E9alis\u00E9s avec des fils brun-rouge, \u00E0 l\u2019imitation, probablement, des \u00E9toffes d\u2019Asie Centrale dont quelques rares exemplaires, exhum\u00E9s \u00E0 Antino\u00E9, r\u00E9v\u00E8lent qu\u2019elles \u00E9taient aussi import\u00E9es dans la ville et qu\u2019elles servaient probablement de source d\u2019inspiration, sinon de mod\u00E8les. C\u2019est le cas des bandes et des galons du mus\u00E9e des Tissus, mais aussi du parement qui garnissait le manteau de l\u2019occupant de la tombe B 114, par exemple. Une datation au radiocarbone situe la r\u00E9alisation de ce dernier entre 420 et 580. \nMaximilien Durand"@fr . . "2021-02-10T00:00:00"^^ .