"En ao\u00FBt 1730, alert\u00E9e par les dol\u00E9ances des fabricants de Lyon et par les interventions du d\u00E9put\u00E9 du Commerce de la ville, Jean-Joseph Palerne, et du pr\u00E9v\u00F4t des marchands et \u00E9chevins, \u00AB Sa Majest\u00E9 (Louis XV) veut estre inform\u00E9 de touttes les manufactures et fabriques de draps, serges et de touttes sortes d'estoffes et ouvrages de laine, de velours, damas, satin, taffetas et austres \u00E9toffes en dorure et soye et fil qui se font \u00E0 Lyon. \u00BB L'\u00E9tat de la Fabrique, les difficult\u00E9s qu'elle rencontrait et les solutions pr\u00E9conis\u00E9es furent expos\u00E9es dans un M\u00E9moire g\u00E9n\u00E9ral sur la Manufacture d'Etoffes de soye, or et argent qui se fabriquent dans la ville de Lyon, conserv\u00E9 \u00E0 la Biblioth\u00E8que nationale de France (Ms, fonds fr. 11855). Anonyme, ce rapport a \u00E9t\u00E9 r\u00E9dig\u00E9 par le marchand-fabricant lyonnais Barnier (tr\u00E8s certainement Jean-Jacques Barnier). Il fut remis en janvier 1731. Sans attendre les conclusions de l'enqu\u00EAte demand\u00E9e par le roi, et devant la gravit\u00E9 de la situation de la Fabrique, une importante commande fut pass\u00E9e \u00E0 la ville de Lyon par Gaspard-Mo\u00EFse Augustin de Fontanieu, contr\u00F4leur g\u00E9n\u00E9ral des meubles de la Couronne. La commande, ordonn\u00E9e \u00AB pour le service du Roy \u00BB, sans destination pr\u00E9cise,\u00A0fut r\u00E9partie entre plusieurs fabricants. La commande comprenait sept meubles, un \u00AB velours a ramages arabesques cramoisy fond d'or\u00A0[...] sans envers \u00BB par Chaussat et Garon,\u00A0et six brocarts : un brocart fond vert \u00E0 fleurs d'or, dessin de Lalli\u00E9, ex\u00E9cut\u00E9 par les fabricants Tisserand, Gabriel Rigod, Tissot et Delamare ; un brocart fond jonquille \u00E0 fleurs d'argent nu\u00E9es de pourpre, d'apr\u00E8s un dessin de Lalli\u00E9 par les fr\u00E8res Carre et Pullignieu ; un brocart \u00AB fond cramoisy\u00A0a fleurs, feuillage et compartiments\u00A0d'or, partie glac\u00E9 et partie friz\u00E9\u00A0\u00BB, dessin de Lalli\u00E9, par Fraisse, Duperrel, Navarre, Girardon, Courtois, Christin, Gayet et Labat ; un brocart \u00AB fond bleu \u00E0 fleurs, feuillages et compartiments d'or partie glac\u00E9 et partie friz\u00E9 \u00BB, dessin de Lalli\u00E9, par Hugues Pinet, Ferro\u00FCillat, Delafont et Lemoyne ; un \u00AB riche brocart fond cramoisy, broch\u00E9 or et argent d'une aune de large, dessin de Ringuet, fabrique de Bron et Ringuet. Le dessin est \u00E0 grands cartouches fond de mosa\u00EFque tout or friz\u00E9 et fond cramoisy avec feuilles et fruits des Indes, corbeilles de fleurs, palmettes grandes palmes argent et vert, et or et vert, fleurs et feuilles broch\u00E9es or et argent de diverses couleurs \u00BB ; et d'un \u00AB brocart fond cramoisy d'une aune de large, fabrique de Barnier, dessein de Roussel, \u00E0 cartouches, fruits des Indes, cornes d'abondance, guirlandes, feuilles et fleurs brochez d'or, partie glac\u00E9 et partie friz\u00E9, nu\u00E9s de soye verte et liserez de pourpre brun \u00BB, compl\u00E9t\u00E9 par dix-huit \u00AB pilastres cannel\u00E9s d'ordre corinthien, dessin de Germain, broch\u00E9 d'or, fond cramoisy, charg\u00E9 au milieu d'un troph\u00E9e d'armes, sur lequel il y a un bouclier aux armes de France, le troph\u00E9e surmont\u00E9 d'un casque avec lauriers et autres ornements, le tout sur fond brun nu\u00E9 de musc. Le Pilastre de treize pieds de haut sur 22 pouces de large. \u00BB Les \u00E9toffes furent r\u00E9alis\u00E9es dans des dimensions exceptionnelles, en g\u00E9n\u00E9ral des laizes de trois aunes et demi de haut (4 m 16) pour une aune de large (1 m 19) pour les deux brocarts fond cramoisi, les autres \u00E9toffes sur vingt pouces (54 cm), deux laizes assembl\u00E9es \u00E9tant n\u00E9cessaires pour constituer le motif, d'apr\u00E8s des dessins d'artistes lyonnais (Roussel) ou parisiens (Thomas Germain et Lalli\u00E9, peut-\u00EAtre Pierre-Germain Lalli\u00E9).\u00A0La premi\u00E8re laize d'\u00E9toffe pour tenture\u00A0du meuble de Barnier est livr\u00E9e\u00A0en avril 1731 au Garde-Meuble. Les livraisons se sont \u00E9chelonn\u00E9es jusqu'en mai 1733. Louis XV pr\u00E9voyait, en 1736, de l'employer pour le Salon de Mercure. Mais le brocart de Barnier ne fut employ\u00E9 qu'en 1785 avec les pilastres aux attributs de guerre de Thomas Germain pour servir dans la Grande Chambre \u00E0 coucher du roi, dite \u00AB de Louis XIV \u00BB. La r\u00E9alisation de cet ameublement fut dirig\u00E9e par Jean-D\u00E9mosth\u00E8ne Dugourc. En juillet 1796 (thermidor an IV), le meuble de la chambre du roi fut acquis par des n\u00E9gociants parisiens, Pin et Durand, tandis que les \u00E9toffes neuves du Garde-Meuble \u00E9taient livr\u00E9es en paiement de la dette nationale \u00E0 des capitaines grecs. Aujourd'hui, l'\u00E9l\u00E9ment conserv\u00E9 au mus\u00E9e des Tissus du meuble Barnier est le seul conserv\u00E9 dans les collections publiques.\nMaximilien Durand"@fr . . "2021-02-10T00:00:00"^^ . .