"2021-02-10T00:00:00"^^ . "La premi\u00E8re apparition de cet extraordinaire ouvrage de broderie est dans le Catalogue g\u00E9n\u00E9ral de l'Exposition universelle de Paris en 1867, o\u00F9 l'objet\u00A0est mentionn\u00E9\u00A0sous le num\u00E9ro 3843 (p. 465). Un an plus tard, il figure au\u00A0catalogue de la vente de la collection d'\u00C9douard Laforge, dispers\u00E9e \u00E0 Lyon, le lundi 16 novembre 1868 et jours suivants, dont il constitue le num\u00E9ro 40 du catalogue : \u00AB Corporalier en broderie soie et or. Dans le centre est repr\u00E9sent\u00E9e la sc\u00E8ne de l'Ecce Homo ; au bas se voit la multitude juive criant le tolle. Sur le volet gauche est saint Jean \u00E9crivant son \u00C9vangile ; sur la droite saint Fran\u00E7ois d'Assises (sic) recevant les stigmates. Ce bel \u00E9chantillon d'un art qui a \u00E9t\u00E9 port\u00E9 \u00E0 un si haut point de perfection au moyen \u00E2ge est sign\u00E9 Pierre Vigier, 1621 ; le dessin cependant et les compositions, \u00E0 notre avis, appartiennent encore au XVIe si\u00E8cle\u00A0\u00BB (Objets d'Art et d'Antiquit\u00E9s composant la collection de M. E. Laforge tels que meubles sculpt\u00E9s en bois et \u00E9b\u00E8ne des XVe, XVIe et XVIIe si\u00E8cles ; statuettes et bas-reliefs en ivoire, bronze, pierre, terre cuite et bois de m\u00EAmes \u00E9poques ; objets religieux ; belles pendules, glaces, lustres, chandeliers et objets d'ameublement des r\u00E8gnes de Louis XIV \u00E0 Louis XVI ; m\u00E9dailles et bijoux ; monuments anciens de l'art chinois et oriental ; tapis, broderies, \u00E9toffes, etc. ..., Lyon, 1868, p. 6). Acquis par le mus\u00E9e arch\u00E9ologique de la Ville de Lyon (inv. X-705), il a \u00E9t\u00E9 \u00E9chang\u00E9 avec le mus\u00E9e des Tissus de Lyon le 9 ao\u00FBt 1890.\nLes volets, sur leur plat externe, pr\u00E9sentent des vases \u00E0 la panse globulaire, au col \u00E9troit,\u00A0posant sur pi\u00E9douche et cantonn\u00E9s de deux anses en volute, orn\u00E9s de godrons, qui contiennent d'un c\u00F4t\u00E9 des \u0153illets et des fleurs de bourrache, de l'autre une rose et un lis martagon. Des papillons et une coccinelle compl\u00E8tent la nature morte. L'encadrement des volets et les tranches du bo\u00EEtier formant le triptyque sont couverts d'applications de satin cramoisi, brod\u00E9 en couchure, et rehauss\u00E9s d'un galon de passementerie. Une fois ouvert, le triptyque est garni, sur\u00A0les petits c\u00F4t\u00E9s de la partie centrale, d'un velours simple corps uni, cramoisi. La sc\u00E8ne principale d\u00E9crit la pr\u00E9sentation \u00E0 la foule\u00A0du Christ battu et couronn\u00E9 d'\u00E9pines. Au-dessus du personnage de Ponce Pilate, qui se tient \u00E0 droite de la composition, un phylact\u00E8re contient les paroles prononc\u00E9es par le pr\u00E9fet de Jud\u00E9e dans la traduction de la Vulgate de l'\u00E9vangile selon saint Jean (19, 5) : ECCE . HOMO, c'est-\u00E0-dire \u00AB Voici l'homme. \u00BB\u00A0Les paroles des habitants de J\u00E9rusalem, TOLLE . TOLLE . CRUCIGE (eum),\u00A0c'est-\u00E0-dire \u00AB \u00C0 mort ! \u00C0 mort ! Crucifie-le ! \u00BB (Jean, 19, 15), figurent sur la marche de l'estrade o\u00F9 se tient le Christ et ses bourreaux. Dans l'angle inf\u00E9rieur gauche, un personnage soutient la croix du supplice qui a d\u00E9j\u00E0 \u00E9t\u00E9 pr\u00E9par\u00E9e.\nLa sc\u00E8ne est ex\u00E9cut\u00E9e suivant le mod\u00E8le d'une gravure de Cornelis Cort (1533 ou 1536-1578), d'apr\u00E8s \u00C9tienne du P\u00E9rac, publi\u00E9e en 1572 (Paris, Biblioth\u00E8que nationale de France, d\u00E9partement des Estampes, Ec 34b).\nSur les volets, deux saints assistent \u00E0 la Passion du Christ : \u00E0 gauche, saint Jean, qui\u00A0a relat\u00E9\u00A0cet \u00E9pisode, ici figur\u00E9 sur l'\u00EEle de Patmos, r\u00E9digeant l'Apocalypse, comme l'indique l'apparition de la Vierge, envelopp\u00E9e par le Soleil, la Lune sous ses pieds ; \u00E0 droite, saint Fran\u00E7ois d'Assise recevant les stigmates, ex\u00E9cut\u00E9\u00A0en suivant le mod\u00E8le\u00A0d'une gravure de Justus Sadeler (1538-1620 ?) d'apr\u00E8s Camillo Procaccini (Paris, Biblioth\u00E8que nationale de France, d\u00E9partement des Estampes, Rd 2).\nSous\u00A0chacun des saints figure\u00A0une inscription, la signature, d'une part, F(ecit) PIERRE . VIGIER, c'est-\u00E0-dire \u00AB\u00A0Pierre Vigier l'a fait\u00A0\u00BB, et la date d'ex\u00E9cution,\u00A01621.\nLa pr\u00E9sence de la signature et de la date, ainsi que l'usage parfaitement ma\u00EEtris\u00E9 de l'or nu\u00E9 signale certainement ici un \u00AB\u00A0chef-d'\u0153uvre \u00BB pour l'obtention du brevet de ma\u00EEtrise. Il s'agirait alors plut\u00F4t\u00A0d'un triptyque de d\u00E9votion priv\u00E9e plut\u00F4t que du corporalier destin\u00E9 \u00E0 recevoir le linge b\u00E9ni, utilis\u00E9 par le pr\u00EAtre durant la messe. Les dimensions du triptyque, le mode d'ouverture, la disposition du d\u00E9cor et son iconographie\u00A0le laisseraient \u00E9galement penser. La diversit\u00E9 des points de broderie utilis\u00E9s plaident \u00E9galement en faveur de l'hypoth\u00E8se de l'ex\u00E9cution d'un \u00AB\u00A0chef-d'\u0153uvre \u00BB de ma\u00EEtrise.\nQuoi qu'il en soit, il s'agit ici d'un des plus remarquables t\u00E9moignages de l'activit\u00E9 des brodeurs sous le r\u00E8gne de Louis XIII, qui livre en plus le nom de Pierre Vigier.\nMaximilien Durand"@fr . . .