. "2021-02-10T00:00:00"^^ . . "En 1787, l'abb\u00E9 Pierre Bertholon, dans son ouvrage Du commerce et des manufactures distinctives de la ville de Lyon, publi\u00E9 \u00E0 Montpellier, rappelle les progr\u00E8s que Philippe de Lasalle, dessinateur, fabricant et n\u00E9gociant, a introduits dans le tissage des \u00E9toffes riches, par ses talents de dessinateur et par ses inventions (p. 195-196) : \u00AB Cet illustre dessinateur et fabricant, bien digne des honneurs et des bienfaits que le Souverain a vers\u00E9s sur lui, profitant des coups de lumi\u00E8re que Revel avait donn\u00E9s, se fraya une route nouvelle par des nuances m\u00E9lang\u00E9es r\u00E9sultantes de la multiplication des lacs. On vit alors sur les \u00E9toffes, ce qui \u00E9tonna, des fleurs et des fruits imitant parfaitement la nature, des p\u00EAches avec leur velout\u00E9, des raisins avec leur transparent, des oiseaux avec toute la richesse et la pompe de leur coloris, des paysages charmants o\u00F9 les lointains habilement plac\u00E9s faisoient l'illusion la plus ravissante. Jusqu'\u00E0 lui, on avait jamais ex\u00E9cut\u00E9 ces brillantes repr\u00E9sentations avec cette correction, cette l\u00E9g\u00E8ret\u00E9 et cette fra\u00EEcheur dans le dessin qui le caract\u00E9risent. \u00BB L'abb\u00E9 Bertholon rappelle ensuite les plus grands chefs-d'\u0153uvre sortis des m\u00E9tiers de Philippe de Lasalle : \u00AB De cette Manufacture sont sortis les ornements pour le Sacre de Louis XVI, les belles \u00E9toffes connues sous le nom de la Renomm\u00E9e, du Jardinier, de la Bouqueti\u00E8re, etc... charmantes compositions ; mais pour l'effet et la magnificence, rien n'est comparable au faisan et au paon de la Chine. \u00BB Il ajoute : \u00AB Cet habile n\u00E9gociant a aussi ex\u00E9cut\u00E9 sur le m\u00E9tier les portraits de Louis XV, celui de Madame et de l'Imp\u00E9ratrice de Russie, avec une v\u00E9rit\u00E9 \u00E9tonnante. Ce n'est plus la palette et le pinceau qui, par le secours des couleurs, repr\u00E9sentent les traits des Personnes ch\u00E9ries, c'est l'humble navette sous les doigts m\u00EAme de l'ouvrier le plus ignorant, et presque sous ceux d'un automate. Pour tracer sur le m\u00E9tier un portrait de la plus parfaite ressemblance, m\u00EAme sans la magie des couleurs, il n'emploie que le blanc et le gris nuanc\u00E9 avec art, c'est-\u00E0-dire le blanc jusqu'au gris fonc\u00E9 qui forme cinq gradations. Les cinq nuances de gris en forment dix par la mani\u00E8re de peindre le portrait sur le papier r\u00E9gl\u00E9, en formant les hachures. Par ce moyen si simple, le bas-relief est si bien imit\u00E9 et l'illusion est tellement compl\u00E8te qu'on a peine \u00E0 en revenir, lors m\u00EAme qu'on en est averti. \u00BB \nPhilippe de Lasalle est toujours actif au moment o\u00F9 ce texte est \u00E9crit, et sa r\u00E9putation est telle qu'on associe son nom, chose in\u00E9dite alors, \u00E0 des \u00E9toffes que chacun peut reconna\u00EEtre, portant m\u00EAme des titres (La Renomm\u00E9e, Le Jardinier, La Bouqueti\u00E8re, Le faisan et le paon de Chine...) comme s'il s'agissait de v\u00E9ritables \u0153uvres d'art. La comparaison avec les Beaux-Arts est m\u00EAme clairement \u00E9tablie lorsque l'auteur \u00E9voque le Portrait de Louis XV, celui de la comtesse de Provence et celui de Catherine II. \nLe m\u00E9daillon avec un d\u00E9cor all\u00E9gorique figurant V\u00E9nus couronnant la fid\u00E9lit\u00E9, s'il ne figure pas dans la liste des \u00E9toffes \u00E9tablie par l'abb\u00E9 Bertholon, est cependant repr\u00E9sentatif des innovations apport\u00E9es par Philippe de Lasalle, tant du point de vue du dessin que de celui de la technique. C'est d'abord pour avoir renouvel\u00E9 le dessin de fabrique que Philippe de Lasalle acquiert une certaine r\u00E9putation. \nD\u00E8s le 8 d\u00E9cembre 1758, il obtient sa premi\u00E8re pension annuelle, qui s'\u00E9l\u00E8ve \u00E0 six cents livres, pour encourager ce renouveau qu'il est en train d'op\u00E9rer. Le contr\u00F4leur g\u00E9n\u00E9ral des finances, dans une lettre adress\u00E9 \u00E0 Jean-Baptiste-Fran\u00E7ois de la Michodi\u00E8re, intendant de Lyon, justifie ainsi cette gratification : \u00AB C'est moins pour r\u00E9compenser le S(ieu)r de la Salle fabriquant et dessinateur \u00E0 Lyon de son exacte probit\u00E9 et de son z\u00E8le et des talents sup\u00E9rieurs dans l'art de dessiner les \u00E9toffes dont j'ay re\u00E7u de touttes parts les t\u00E9moignages les plus avantageux et dont j'ay rendu compte au Roy que pour luy en t\u00E9moigner sa satisfaction et luy donner preuves en m\u00EAme temps de sa protection, que sa majest\u00E9 veut bien [...] luy accorder une pension annuelle [...]. \u00BB Dans la r\u00E9ponse que Philippe de Lasalle fait au contr\u00F4leur g\u00E9n\u00E9ral pour le remercier, il t\u00E9moigne d\u00E9j\u00E0 de ses difficult\u00E9s financi\u00E8res \u2014 elles seront r\u00E9currentes au cours de sa carri\u00E8re \u2014 mais il se dit \u00AB heureux si cette premi\u00E8re faveur me met \u00E0 m\u00EAme d'en m\u00E9riter de plus importantes a ma situation et aux pertes ou l'ardeur d'acqu\u00E9rir quelque gloire dans mon talent par des routes nouvelles m'avoit imprudemment conduit. J'ay trouv\u00E9 mon refuge dans l'appui que vous avez accord\u00E9s aux arts et aux talents, et je dois \u00E0 votre Grandeur de m'avoir emp\u00EAch\u00E9 de succomber enti\u00E8rement. \u00BB Le 27 d\u00E9cembre 1758, Philippe de Lasalle obtient en plus une gratification de deux mille livres pour ses d\u00E9penses pendant un s\u00E9jour \u00E0 Paris, somme prise sur le produit des droits des \u00E9toffes \u00E9trang\u00E8res qui se per\u00E7oivent \u00E0 Lyon. \nUne autre pension lui est encore accord\u00E9e le 1er f\u00E9vrier 1760 pour la prise en charge d'\u00E9l\u00E8ves dessinateurs. Il succ\u00E8de dans cette fonction \u00E0 Dacier, sp\u00E9cialis\u00E9 dans les damas \u2014 dessins pour ameublement en deux et trois couleurs \u2014 auquel le surintendant de Machault avait accord\u00E9, par une lettre adress\u00E9e de Versailles au Consulat lyonnais le 6 mai 1756, une pension annuelle de six cents livres pour accueillir six \u00E9l\u00E8ves avec la possibilit\u00E9 de toucher, s'il y a lieu, une gratification. Dacier \u00E9tait alors poursuivi par ses cr\u00E9anciers. Son coll\u00E8gue Antoine-Nicolas Joubert de l'Hiberderie (1715-1770), dans son ouvrage Le dessinateur, pour les fabriques d'\u00E9toffes d'or, d'argent et de soie, publi\u00E9 \u00E0 Lyon en 1765, d\u00E9clare que \u00AB ses desseins \u00E9toient marqu\u00E9s \u00E0 ce coin de perfection & de grandeur qui caract\u00E9risent le g\u00E9nie, & o\u00F9 jamais aucun Dessinateur n'a pu atteindre : aussi la Ville de Lyon a-t-elle r\u00E9compens\u00E9 ses talens par une pension dont il a peu joui. \u00BB \nQuant \u00E0 Philippe de Lasalle, il s'attache, durant cette p\u00E9riode, \u00E0 perfectionner le dessin des \u00E9toffes broch\u00E9es pour meubles. Dans une lettre dat\u00E9e du 3 janvier 1760, il \u00E9voque une imitation de fourrure qu'il a ex\u00E9cut\u00E9e quatre ans plus t\u00F4t et qui \u00E9tait alors extr\u00EAmement innovante, et l'introduction, dans le tissage, des motifs de paysages, d'oiseaux ou de personnages : \u00AB Vous n'ignorez point que l'art s'acquiert par l'\u00E9mulation, et les grands exemples ; le travail et mes observations sur les ouvrages de ceux qui se sont distingu\u00E9s dans la carri\u00E8re que je suis ont seuls form\u00E9 mes talents ; plus d'ardeur encore \u00E0 m\u00E9riter la protection que vous leur accordez peut leur procurer un jour cette c\u00E9l\u00E9brit\u00E9 qui offre des mod\u00E8les \u00E0 imiter et excite d'autres g\u00E9nies qui la surpassent : ainsi parmi nous d\u00E8s qu'un morceau frappant est sorti de la main d'un artiste habile il est lev\u00E9 et port\u00E9 sous les yeux de chaque concurrent qui cherche les moyens de se le procurer et fournit souvent par son caract\u00E8re ou la mode de la saison ou l'exemple d'un beau sujet. Lorsque j'eus trait\u00E9 en 1756 une peau de tigre travaill\u00E9e avec un peu d'art sur un fond d'or, on vit \u00E9clore dans chaque fabrique des desseins pleins de go\u00FBt repr\u00E9sentant diverses fourrures ; il en fut de m\u00EAme en d'autres temps lorsque j'introduisis des paysages, oiseaux et personnages. \u00BB \nPhilippe de Lasalle caract\u00E9rise donc son travail, en 1760, par l'\u00E9laboration de dessins nouveaux et leur traitement avec art, et notamment par l'introduction de personnages dans le tissage des \u00E9toffes fa\u00E7onn\u00E9es. Il indique dans cette m\u00EAme lettre qu'il pr\u00E9pare \u00AB une \u00E9tude all\u00E9gorique pour la venue du Roy \u00E0 Lyon et de celui des Deux-Siciles. \u00BB Philippe de Lasalle n'eut malheureusement pas l'occasion d'exposer la composition en question, comme il l'avait imagin\u00E9, puisque le s\u00E9jour \u00E0 Lyon de Louis XV et sa rencontre avec Charles de Bourbon fut annul\u00E9e. Le mus\u00E9e des Tissus conserve cependant cette composition (inv. MT 2891), intitul\u00E9e La Renomm\u00E9e. Il s'agit d'une laize de satin jaune (satin de 8, cha\u00EEne, d\u00E9cochement 3), orn\u00E9e d'un d\u00E9cor en cama\u00EFeu violet \u00E0 quatre lats (deux lats de liser\u00E9, deux lats de broch\u00E9 \u00E0 liage repris, en serg\u00E9 de 3 lie 1, S, par un sixi\u00E8me des fils). Le motif principal pr\u00E9sente un treillage enguirland\u00E9, somm\u00E9 d'une colombe prot\u00E9geant ses oisillons et \u00E9rig\u00E9 sur un parapet de marbre et cantonn\u00E9e de fleurs, branches de lilas ou bouquets dans des vases. Sous la treille, la figure de la Renomm\u00E9e couronne un buste du roi Henri IV, l'anc\u00EAtre commun de Louis XV et de Charles de Bourbon. Trois m\u00E9daillons contenant des oiseaux (coq, poules, colombes) occupent la partie inf\u00E9rieure de la laize, suspendus \u00E0 des rubans, des guirlandes de fleurs ou soutenant des rangs de perles. Deux grands vases fleuris encadrent la composition. Le tissage a \u00E9t\u00E9 ex\u00E9cut\u00E9 sur un m\u00E9tier \u00E0 deux chemins \u00E0 pointe et b\u00E2tard. \nPlusieurs \u00E9l\u00E9ments constitutifs du r\u00E9pertoire ornemental de Philippe de Lasalle sont d\u00E9j\u00E0 pr\u00E9sents sur cette laize, comme le treillage, les guirlandes fleuries, les rangs de perles ou les couples d'oiseaux, et la composition en m\u00E9daillons. La figure de la Renomm\u00E9e brandissant une couronne pr\u00E9figure d\u00E9j\u00E0 celle du\u00A0m\u00E9daillon figurant V\u00E9nus couronnant la fid\u00E9lit\u00E9. Mais en 1760, Philippe de Lasalle, qui est mentionn\u00E9 dans une lettre de Jean-Baptiste-Fran\u00E7ois de la Michodi\u00E8re, intendant de Lyon, \u00E0 l'intendant g\u00E9n\u00E9ral des finances et conseiller du Commerce, en date du 18 janvier 1760, est \u00AB regard\u00E9 comme le premier dessinateur de Lyon \u00BB, n'a pas encore apport\u00E9 au m\u00E9tier les innovations d\u00E9cisives auxquelles il travaille \u00E0 partir de 1769-1770. \nElles sont op\u00E9rationnelles en 1771, lorsqu'il imagine de r\u00E9aliser le Portrait de Catherine II, dont le mus\u00E9e des Tissus conserve un exemplaire (inv. MT 2869). Probablement ex\u00E9cut\u00E9 sur la suggestion de Voltaire, le Portrait de Catherine II est transmis \u00E0 la souveraine par ce dernier, avec une autre \u00E9toffe au d\u00E9cor all\u00E9gorique pr\u00E9sentant l'imp\u00E9ratrice sous les traits de Minerve, remettant l'ordre de Saint-Georges au comte Alexe\u00EF Grigorievitch Orlov-Chesmensky (il re\u00E7ut cette distinction le 26 septembre 1770). Les deux \u00E9toffes envoy\u00E9es \u00E0 l'imp\u00E9ratrice sont conserv\u00E9es au mus\u00E9e de l'Ermitage \u00E0 Saint-P\u00E9tersbourg (inv. T 6920 et T 6921). Pour la premi\u00E8re fois, Philippe de Lasalle imagine de dissocier le tissage des m\u00E9daillons, ex\u00E9cut\u00E9s ind\u00E9pendamment, de celui du fond. Le mus\u00E9e des Tissus conserve la mise en carte du fond avec l'entour de fleurs (inv. MT 1701) sur lequel les m\u00E9daillons ont \u00E9t\u00E9 rapport\u00E9s par broderie. Les deux m\u00E9daillons, avec le portrait de l'imp\u00E9ratrice et la sc\u00E8ne all\u00E9gorique, ont certainement \u00E9t\u00E9 ex\u00E9cut\u00E9s sur le m\u00E9tier que Philippe de Lasalle vient d'inventer, \u00E0 semple mobile, qui permet de pr\u00E9parer une seule cha\u00EEne et de programmer, gr\u00E2ce au changement de semple, des dessins diff\u00E9rents. Catherine II semble avoir \u00E9t\u00E9 tr\u00E8s satisfaite de ces envois, puisque Philippe de Lasalle a livr\u00E9 de nombreuses \u00E9toffes pour les palais de la souveraine, en 1773, 1776, 1778 et 1780, notamment. Ces livraisons pour la Russie ont constitu\u00E9 une partie non n\u00E9gligeable des revenus du fabricant pendant quelques ann\u00E9es. Toutes ces \u00E9toffes ont \u00E9t\u00E9 ex\u00E9cut\u00E9es au moyen du semple mobile. La r\u00E9alisation la plus exceptionnelle tiss\u00E9e avec ce dispositif est assur\u00E9ment la tenture \u00AB au paon et au faisan \u00BB, dont le mus\u00E9e des Tissus conserve deux \u00E9l\u00E9ments originaux (inv. MT 1278, MT 2870) et une mise en carte pour le motif du paon (MT 22047). C'est \u00E9galement gr\u00E2ce \u00E0 ce m\u00E9tier de son invention que Philippe de Lasalle a d\u00E9velopp\u00E9 l'id\u00E9e d'ex\u00E9cuter des m\u00E9daillons orn\u00E9s d'animaux ou de figures, destin\u00E9s \u00E0 \u00EAtre rapport\u00E9s par broderie sur des meubles de soierie fa\u00E7onn\u00E9e. Les mod\u00E8les les plus c\u00E9l\u00E8bres sont Le Jardinier (inv. MT 1284) et La Bouqueti\u00E8re (inv. MT 2885). Ces derniers sont inspir\u00E9s par les \u0153uvres de Fran\u00E7ois Boucher (1703-1770) grav\u00E9es par Gilles Demarteau (1722-1776). \nLe m\u00E9daillon avec la repr\u00E9sentation de V\u00E9nus couronnant la fid\u00E9lit\u00E9 proc\u00E8de de ces diff\u00E9rentes \u00E9volutions initi\u00E9es par Philippe de Lasalle, c'est-\u00E0-dire le dessin \u00E0 figures pour les \u00E9toffes broch\u00E9es, l'utilisation du m\u00E9tier \u00E0 semple mobile et le tissage de m\u00E9daillons destin\u00E9s \u00E0 \u00EAtre rapport\u00E9 sur un fond de tenture tiss\u00E9 s\u00E9par\u00E9ment. Il est aussi directement inspir\u00E9 par une gravure de Gilles Demarteau, d\u00E9di\u00E9e \u00E0 Charles-Marin de La Haye des Foss\u00E9s, fermier g\u00E9n\u00E9ral du roi (1736-1790), d'apr\u00E8s un dessin provenant du cabinet de ce dernier,\u00A0r\u00E9alis\u00E9 par\u00A0Fran\u00E7ois Boucher. La gravure est ex\u00E9cut\u00E9e en mani\u00E8re de crayon, impression en sanguine. Elle montre une jeune femme faisant offrande d'un c\u0153ur et de guirlandes de roses sur un autel portant l'inscription AVTEL DE L'AMITIE ; deux amours se tiennent l'un pr\u00E8s de sa jambe,\u00A0le second\u00A0de l'autre c\u00F4t\u00E9 de l'autel (Paris, mus\u00E9e du Louvre, d\u00E9partement des Arts graphiques, inv. 19184 LR\u00A0et 19185 LR). La sc\u00E8ne a \u00E9galement \u00E9t\u00E9 grav\u00E9e avec quelques variantes par Ange-Laurent Lalive de Jully (1725-1779) sous le titre Amor et Gratitudo (Paris, mus\u00E9e du Louvre, d\u00E9partement des Arts graphiques, inv. 18761 LR), et peinte en miniature par Jacques Charlier (1706-1790)\u00A0(Paris, mus\u00E9e du Louvre, Cabinet des dessins, inv. RF 4271).\u00A0\nLe m\u00E9daillon\u00A0a \u00E9t\u00E9 tiss\u00E9 sur une cha\u00EEne en organsin de soie ciel (torsion S de deux bouts, 150-152 fils par centim\u00E8tres), en satin (de 8, cha\u00EEne, d\u00E9cochement 3), au moyen de deux lats liser\u00E9 et trois lats de broch\u00E9 \u00E0 liage repris en serg\u00E9 (de 3 lie 1, S, par un sixi\u00E8me des fils, soit 25 fils de liage repris par centim\u00E8tre) en soie (assembl\u00E9 sans torsion apparente de deux ou trois bouts) blanche, jaune clair, ocre jaune, brun clair et brun plus soutenu (23-25 pass\u00E9es par centim\u00E8tre, \u00E0 raison de deux coups de fond, un coup de chaque lat de liser\u00E9 ou de broch\u00E9 selon le d\u00E9cor ; d\u00E9coupure : 10 fils et une pass\u00E9e). Le dessin comprend des effets de \u00AB points rentr\u00E9s \u00BB ou \u00AB bercl\u00E9. \u00BB Ces caract\u00E9ristiques techniques confirment l'attribution du m\u00E9daillon \u00E0 Philippe de Lasalle, tout comme la nature du dessin lui-m\u00EAme.\nLa composition pr\u00E9sente la d\u00E9esse V\u00E9nus, drap\u00E9e dans un manteau qui lui d\u00E9couvre les \u00E9paules, la poitrine et une jambe, surgissant d\u2019une nu\u00E9e, pr\u00E9c\u00E9d\u00E9e par un couple de colombes, qui s\u2019appr\u00EAte \u00E0 couronner un chien faisant le beau, dress\u00E9 sur un f\u00FBt de colonne. Le d\u00E9cor est trait\u00E9 en cama\u00EFeu de beige sur un fond ciel.\nLe mus\u00E9e des Tissus conserve la mise en carte de ce m\u00E9daillon (inv. MT 2015.0.12), qui correspond \u00E0 la programmation du dessin sur un semple. Elle est peinte \u00E0 la gouache sur un papier r\u00E9gl\u00E9 de 8 en 11, directement dans les couleurs d\u00E9finitives du m\u00E9daillon, conform\u00E9ment \u00E0 l'habitude de Philippe de Lasalle. Elle compte trois cent trente-six cordes de carte (d\u00E9coupure cha\u00EEne, correspondant au nombre de cordes de rame au chemin qui a pu \u00EAtre calcul\u00E9 sur le m\u00E9daillon) et quatre cent cinquante-six coups de carte (correspondant au nombre de d\u00E9coupures trames au chemin sur le m\u00E9daillon). Le filet blanc qui, sur la mise en carte, constitue la bordure du m\u00E9daillon n'a pas \u00E9t\u00E9 tiss\u00E9 sur ce dernier.\nUn repli d'un demi centim\u00E8tre borde le m\u00E9daillon. Il est maintenu par couture au point avant au moyen d'un cordonnet de soie cr\u00E8me (retors S de trois ou quatre bouts de faible torsion S). Ce repli pr\u00E9pare l'application du m\u00E9daillon sur le fond pour lequel il \u00E9tait destin\u00E9. Le mus\u00E9e des Tissus conserve une laize de lampas, fond satin, broch\u00E9 nuances avec un m\u00E9daillon figurant V\u00E9nus couronnant la fid\u00E9lit\u00E9 rapport\u00E9 par broderie (inv. MT 2887).\u00A0\nMoins connu que\u00A0Le Jardinier ou La Bouqueti\u00E8re, le m\u00E9daillon avec V\u00E9nus couronnant la fid\u00E9lit\u00E9 est pourtant tout \u00E0 fait repr\u00E9sentatif du travail de Philippe de Lasalle dans les ann\u00E9es 1770-1780, \u00E0 l'apog\u00E9e de sa carri\u00E8re. Exceptionnellement conserv\u00E9 avec sa mise en carte, il permet aussi de mesurer les sp\u00E9cificit\u00E9s mises en \u0153uvre par le fabricant :\u00A0l'\u00E9laboration de dessins all\u00E9goriques, dans la continuit\u00E9 de La Renomm\u00E9e ou de Catherine II en Minerve, la confection de mises en carte aux couleurs de l'\u00E9toffe\u00A0finale, l'usage de cama\u00EFeu avec l'emploi des \u00AB points rentr\u00E9s \u00BB, comme sur les portraits de Catherine II, de Louis XV (inv. MT 45306), du comte (inv. MT 2856) et de la comtesse de Provence (inv. MT 45307) et du comte d'Artois (inv. MT 2857), et la rationalisation du tissage, gr\u00E2ce au semple mobile.\nMaximilien Durand"@fr .