"Le go\u00FBt de la cour de Louis XVI pour les v\u00EAtements brod\u00E9s avait consid\u00E9rablement d\u00E9velopp\u00E9 cette branche de l'industrie lyonnaise, au d\u00E9triment des manufactures d'\u00E9toffes riches. En 1779, les syndics et ma\u00EEtres gardes des marchands et ma\u00EEtres fabricants de Lyon pr\u00E9sentent un M\u00E9moire au Roi et au conseil du Commerce dans lequel ils rappellent que \u00AB tant que la France et plut\u00F4t la Cour et les Seigneurs ont consomm\u00E9 les Etoffes riches en soye et Dorures de la fabrique de Lyon, l'Etranger fid\u00E8le imitateur de nos go\u00FBts, y a conform\u00E9 le Sien. Nous consommions \u00E0 peine la dixi\u00E8me partie de nos manufactures et le danger imperceptible de ce luxe n\u00E9cessaire \u00E9tait abondamment compens\u00E9 par l'exportation du reste. La France a renonc\u00E9 volontairement \u00E0 cet Empire du go\u00FBt si avantageux au Commerce (...). On a substitu\u00E9 la Broderie et le pomponage des modes aux belles \u00E9toffes de Lyon, et d\u00E8s lors ces productions pr\u00E9tieuses d\u00E9daign\u00E9es par ceux m\u00EAme qui les poss\u00E9daient, ont \u00E9t\u00E9 m\u00E9pris\u00E9es ch\u00E9s l'Etranger, il s'est affranchi du tribut qu'il payait \u00E0 notre industrie, parce qu'on brode partout. \u00BB Rappelant qu'il s'agit \u00AB du sort de la seconde ville du Royaume, de l'existence d'un peuple immense \u00BB, les syndics demandent que le Roi et la Reine \u00AB daignent honorer les travaux de leurs Sujets, de leurs Enfants, en les employant \u00E0 leur usage. Cet exemple imit\u00E9 par la Cour sera bient\u00F4t suivi par l'Etranger. \u00BB\u00A0En d\u00E9cembre 1779, les syndics de Lyon s'adressent directement \u00E0\u00A0Marie-Antoinette pour l'avertir de la situation : \u00AB Plac\u00E9e sur le premier tr\u00F4ne du monde, Votre Majest\u00E9 r\u00E9unit l'Empire des Vertus, de la Beaut\u00E9 et du go\u00FBt. (...) Tant qu'elle a honor\u00E9 les travaux de la manufacture de Lyon en les employant \u00E0 son usage, le go\u00FBt des belles Etoffes s'est soutenu dans toutes les Cours. Les princesses \u00E9trang\u00E8res se sont efforc\u00E9es de se rapprocher de Votre Majest\u00E9 au moins par la ressemblance de la parure. (...) La Broderie et les modes ont remplac\u00E9 les Etoffes broch\u00E9es de Lyon. Il est r\u00E9sult\u00E9 de ce changement la perte d'un commerce avantageux avec l'\u00E9tranger. (...) Qu'il plaise \u00E0 Votre Majest\u00E9 d'observer que l'on Brode parfaitement ch\u00E9s l'Etranger ; qu'on ne fabrique les belles \u00E9toffes que dans la seule ville de Lyon. \u00BB En novembre 1781, \u00E0 l'occasion des f\u00EAtes pour la naissance du Dauphin, le Roi et la Reine prennent la r\u00E9solution d'employer \u00E0 l'avenir des \u00E9toffes riches des fabriques de Lyon. Cette r\u00E9solution semble avoir \u00E9t\u00E9 partiellement suffisante, puisqu'un nouveau M\u00E9moire, en 1783, d\u00E9plore une fois encore l'abandon des \u00E9toffes broch\u00E9es et demande \u00AB que la Cour en reprenne l'usage. Elle le fera si la Reine veut en donner l'exemple. Tout tient \u00E0 cel\u00E0. Versailles s'empressera d'imiter la Souveraine ; Paris d'imiter Versailles ; l'Europe ne tardera pas \u00E0 suivre celle-ci ; et la ville de Lyon devra \u00E0 un simple acte de complaisance de son Auguste Ma\u00EEtresse le r\u00E9tablissement de son ancienne splendeur. \u00BB\nEn janvier 1790, c'est \u00E0 l'Assembl\u00E9e nationale que la Soci\u00E9t\u00E9 philanthropique de Lyon expose le \u00AB triste \u00E9tat \u00BB de la fabrique. Plusieurs facteurs an\u00E9antissent le commerce de Lyon, mais on d\u00E9plore\u00A0aussi que \u00AB l'Etiquette comme un fl\u00E9au suspendu sur nos t\u00EAtes vienne encore nous frapper et mettre le comble \u00E0 notre d\u00E9tresse. Les Deuils de la Cour occasionnent fr\u00E9quemment des suspensions calamiteuses. D\u00E8s que la destin\u00E9e termine ou menace les jours d'un Prince en Europe le travail est arr\u00EAt\u00E9, les commissions deviennent rares ; les exp\u00E9ditions sont suspendues. (...) La m\u00E9moire des grands de la terre peut elle \u00EAtre honor\u00E9e des souffrances du peuple ? (...) Veuillez, Messieurs, repr\u00E9senter au Roi les inconv\u00E9nients de l'usage \u00E9tabli. Sa Majest\u00E9, toujours empress\u00E9e d'adoucir et d'am\u00E9liorer l'\u00E9tat de son peuple, agr\u00E9era nos r\u00E9clamations.\u00A0\u00BB\nLes r\u00E9solutions prises par les souverains en 1781 semblent cependant avoir eu des cons\u00E9quences sur la production de broderies \u00E0 Lyon jusqu'\u00E0 la R\u00E9volution, si l'on en croit l'\u00E9tat dress\u00E9 en l'an IX (1800) de cette branche de l'industrie par le premier pr\u00E9fet du d\u00E9partement du Rh\u00F4ne, Raymond de Verninac de Saint-Maur (1762-1822), dans sa Description physique et politique du d\u00E9partement du Rh\u00F4ne, publi\u00E9e \u00E0 Lyon (p. 72-73) : \u00AB La broderie occupait dans Lyon, au moment de la R\u00E9volution, 6000 individus. Depuis 1782 jusqu'\u00E0 1791, cette partie du commerce de cette ville avait baiss\u00E9 de pr\u00E8s de moiti\u00E9. \u00BB\nLa R\u00E9volution, on le sait, a \u00E9t\u00E9 particuli\u00E8rement \u00E9prouvante pour les manufactures et l'industrie textile en g\u00E9n\u00E9ral \u00E0 Lyon, surtout apr\u00E8s le Si\u00E8ge de la ville en 1793. Plusieurs dessinateurs, fabricants, ouvriers ou\u00A0m\u00E9caniciens\u00A0trouv\u00E8rent la mort entre 1793 et 1794 ou \u00E9migr\u00E8rent. Parmi les victimes lyonnaises de la R\u00E9volution, on compte quelques brodeurs\u00A0: le 15 frimaire an II (5 d\u00E9cembre 1793), Claude Mariotte, natif de Saint-L\u00E9ger (C\u00F4te-d'Or), demeurant rue du Buisson, marchand brodeur \u00E2g\u00E9 de trente-huit ans ; le 21 frimaire an II (11 d\u00E9cembre 1793), Jean-Baptiste Bernard, natif de Lyon, demeurant rue de la Vieille-Monnaie, brodeur, \u00E2g\u00E9 de quarante-quatre ans ; le 25 frimaire an II (15 d\u00E9cembre 1793), Claude Bernard, natif de Lyon, demeurant quai Saint-Clair, marchand brodeur, \u00E2g\u00E9 de cinquante-trois ans ; le 28 frimaire an II (18 d\u00E9cembre 1793), Beno\u00EEt Lacroze, natif de Lyon, demeurant rue Longue, brodeur, \u00E2g\u00E9 de trente-deux ans ; le 5 niv\u00F4se an II (25 d\u00E9cembre 1793), Jean-Baptiste Boudet, natif de Montpellier, demeurant rue Pizay, marchand brodeur, \u00E2g\u00E9 de cinquante-six ans ; le 18 niv\u00F4se an II (7 janvier 1794), Andr\u00E9 Debilly, natif de Lentilly, demeurant place Saint-Vincent, brodeur, \u00E2g\u00E9 de cinquante ans ; le 20 niv\u00F4se an II (9 janvier 1794), Jacques Hodieu, natif de Lyon, brodeur ; le 23 niv\u00F4se an II (12 janvier 1794), Adrien-Antoine Sonel, natif de Paris, demeurant rue Longue, brodeur, \u00E2g\u00E9 de trente-quatre ans ;\u00A0en niv\u00F4se an II, \u00E9galement, Jean-Marie Gaugelin, natif de Lyon, demeurant Grande-C\u00F4te, brodeur, \u00E2g\u00E9 de cinquante-et-un ans ; le 23 pluvi\u00F4se an II (11 f\u00E9vrier 1794), Henri Prost, natif de Lyon, rue Belle-Cordi\u00E8re, commis-brodeur, \u00E2g\u00E9 de vingt-deux ans ; le 29 pluvi\u00F4se an II (17 f\u00E9vrier 1794), Jean-Baptiste Guichard, natif de Lyon, demeurant rue du Puits-du-Sel, brodeur, \u00E2g\u00E9 de cinquante-huit ans ;\u00A0le 16 germinal an II (5 avril 1794), \u00C9tiennette dite \u00AB Ti\u00E9non \u00BB\u00A0Myotte, native de Tarare, demeurant rue de la ci-devant Douane, brodeuse, \u00E2g\u00E9e de trente-six ans. Jean-Fran\u00E7ois Dufour, natif de Chamb\u00E9ry, demeurant faubourg Saint-Clair, marchand brodeur \u00E2g\u00E9 de cinquante-cinq ans, fut enfin condamn\u00E9 par contumace puisqu'il s'\u00E9tait \u00E9vad\u00E9 de sa prison.\nRaymond de Verninac de Saint-Maur\u00A0indique, \u00E0 propos de la broderie :\u00A0\u00AB Aucune autre branche de l'industrie lyonnaise n'a autant souffert de la R\u00E9volution. Le luxe des c\u00E9r\u00E9monies religieuses, le faste de la Cour, l'orgueil des grandes fortunes, tout lui a manqu\u00E9 \u00E0 la fois. L'interruption de nos rapports avec l'\u00E9tranger, suite de la guerre, a achev\u00E9 sa ruine. \u00BB Il ajoute :\u00A0\u00AB Elle occupe aujourd'hui 600 personnes \u00BB et voit dans cette branche du commerce de grandes perspectives. \u00AB Rien ne serait plus convenable que de lui rendre la vie. En ouvrage de broderie, presque tout est b\u00E9n\u00E9fice ; c'est le triomphe de l'industrie. Elle offre aux femmes, pour lesquelles il existe si peu de ressources, un travail parfaitement relatif \u00E0 leur faiblesse, \u00E0 leur go\u00FBt et \u00E0 leur sexe. Le moyen de relever le commerce de broderie \u00E9tant de r\u00E9tablir la consommation, c'est aux premiers cercles de la R\u00E9publique \u00E0 donner le mouvement. Il faut observer cependant que Lyon trouvera dans la ville de Paris une concurrence tr\u00E8s dangereuse en ce qui concerne la broderie en m\u00E9tal. L'art, sur ce point, est tr\u00E8s parfait dans la capitale, qui d'ailleurs emploie des mati\u00E8res fort brillantes.\u00A0\u00BB\u00A0\u00A0\n\u00C0 l'Exposition des produits de l'industrie fran\u00E7aise de l'an X qui se tient au Louvre durant\u00A0six jours dont les compl\u00E9mentaires (16-21 septembre 1802)\u00A0et qui r\u00E9unit cinq cent quarante exposants, le jury d\u00E9cerne une m\u00E9daille d'or \u00E0 Camille Pernon (1753-1808) \u00AB fabricant \u00E0 Lyon, ayant un d\u00E9p\u00F4t \u00E0 Paris, rue de Cl\u00E9ry, chez M. Grognard. A expos\u00E9 des \u00E9toffes de la plus grande magnificence, et dignes de la haute r\u00E9putation de la ville de Lyon, pour les soieries et les broderies ; on y remarquait : 1 - une robe de mousseline fran\u00E7aise, brod\u00E9e en soie et dorure, sans envers, imitant parfaitement les belles broderies des Indes ; elle a \u00E9t\u00E9 ex\u00E9cut\u00E9e dans les ateliers de M. Rivet, brodeur \u00E0 Lyon ; 2 - un velours soie, teint en \u00E9carlate, nuance qu'on n'avait pu obtenir jusqu'ici sur cette mati\u00E8re, et un damas appr\u00EAt\u00E9 en un blanc qui ne coule jamais : ces deux chefs-d'\u0153uvre ont \u00E9t\u00E9 ex\u00E9cut\u00E9s par les proc\u00E9d\u00E9s de M. Gonin fils, teinturier \u00E0 Lyon ; 3 - des satins et des taffetas grande largeur, sans envers. Le Jury a remarqu\u00E9 dans les broderies et les broch\u00E9s une grande vari\u00E9t\u00E9 et un bon choix de dessin. La broderie broch\u00E9e est si bien ex\u00E9cut\u00E9e qu'elle imite la broderie \u00E0 l'aiguille. Le jury a d\u00E9cern\u00E9 \u00E0 M. Pernon une m\u00E9daille d'or\u00A0\u00BB (Proc\u00E8s verbal des op\u00E9rations du jury nomm\u00E9 par le ministre de l'Int\u00E9rieur pour examiner les produits de l'industrie fran\u00E7aise mis \u00E0 l'exposition des jours compl\u00E9mentaires de la dixi\u00E8me ann\u00E9e de la R\u00E9publique, Paris, 1802, p. 20-21). Apr\u00E8s le s\u00E9jour effectu\u00E9 \u00E0 Lyon par le Premier Consul en compagnie de son \u00E9pouse entre le 21 niv\u00F4se (11 janvier) et le 8 pluvi\u00F4se an X (28 janvier 1802), le Conseil municipal, dans sa s\u00E9ance du 22 pluvi\u00F4se (11 f\u00E9vrier 1802)\u00A0suivant, d\u00E9cide de faire ex\u00E9cuter pour Jos\u00E9phine Bonaparte \u00AB par les citoyens Rivet et Cie, marchand brodeur de cette ville [celui-l\u00E0 m\u00EAme qui travaille pour Camille Pernon], une robe sur mousseline brod\u00E9e \u00E0 deux faces, un dolman aussi brod\u00E9, un fichu et un demi-fichu\u00A0\u00BB, le tout pour un montant de trois mille francs.\n\u00C0 l'Exposition des produits de l'industrie fran\u00E7aise suivante, en 1806, qui dure vingt-quatre jours au Louvre et r\u00E9unit mille quatre cent vingt-deux exposants, les fabricants d'\u00E9toffe de Lyon sont particuli\u00E8rement bien repr\u00E9sent\u00E9s. Une section r\u00E9unit la \u00AB Broderie et Passementerie \u00BB : Fran\u00E7ois Bal expose \u00AB des \u00E9chantillons d'habits brod\u00E9s \u00BB, Placy et Cie, \u00AB des \u00E9chantillons d'habits brod\u00E9s, et un \u00E9chantillon de robe sur satin blanc brod\u00E9e, soie nu\u00E9e \u00BB, Favre, \u00AB un cadre repr\u00E9sentant une plante imp\u00E9riale, un aigle et divers ornements en application \u00BB, Madame Veuve Chevron (\u00C9tiennette Rivet), \u00AB un mouchoir grande largeur, perkale blanc, brod\u00E9 en laine \u00BB, Duperret, \u00AB un schal grande largeur, madras, brod\u00E9 en laine \u00BB, Fabry et Cie, \u00AB des \u00E9chantillons d'habits brod\u00E9s en soie, or fin et pierres \u00BB, Lequin l'a\u00EEn\u00E9, \u00AB des \u00E9chantillons de velours brod\u00E9s \u00BB, Edme Martin, \u00AB un cadre repr\u00E9sentant diff\u00E9rentes all\u00E9gories en ornements et applications \u00BB, Hodieu et Cie, \u00AB un \u00E9cran brod\u00E9 en soie \u00BB, Madame Joly, Mademoiselle Devun, demeurant chez Madame Cosway, \u00AB deux cadres sous glace renfermant, en broderie de soie, nuanc\u00E9e au pass\u00E9, l'un, deux roses li\u00E9es par une pens\u00E9e, fond gros de Tours blanc, et l'autre, deux arbrisseaux au milieu desquels se trouve un coq ayant une perle \u00E0 ses pieds \u00BB, Madame Belliscer, \u00AB un \u00E9cran en satin et velours, appliqu\u00E9 sur un fond de tulle, et contenant un bouquet de fleurs, surmont\u00E9 par un aigle. Ce dernier ouvrage est ex\u00E9cut\u00E9 avec un soin extr\u00EAme et Madame Belliscer d\u00E9sire qu'apr\u00E8s l'exposition, il soit offert en hommage \u00E0 Sa Majest\u00E9 l'Imp\u00E9ratrice. \u00BB\u00A0Le Bulletin de la Soci\u00E9t\u00E9 d'encouragement pour l'industrie nationale n\u00B0 XXXVIII (sixi\u00E8me ann\u00E9e, ao\u00FBt 1807), dans son compte rendu de la production textile pr\u00E9sent\u00E9e \u00E0\u00A0l'Exposition de 1806, indique : \u00AB De toutes les fabrications qui ont rendu c\u00E9l\u00E8bre l'industrie des habitants de Lyon, la plus importante est celle qui s'exerce sur la soie. Les tissus form\u00E9s de cette pr\u00E9cieuse mati\u00E8re, unis, broch\u00E9s, fa\u00E7onn\u00E9s, m\u00E9lang\u00E9s d'or ou d'argent, orn\u00E9s de broderie, etc., appropri\u00E9s au go\u00FBt des consommateurs nationaux\u00A0et \u00E9trangers, et \u00E0 tous les besoins du v\u00EAtement et de l'ameublement, se distinguent tant\u00F4t par la richesse et la magnificence, tant\u00F4t par des formes neuves, \u00E9l\u00E9gantes et vari\u00E9es, et toujours par le go\u00FBt qui en dirige l'ex\u00E9cution. M. Camille Pernon, fabricant \u00E0 Lyon, fut jug\u00E9 digne, en l'an X, de la m\u00E9daille d'or, pour des \u00E9toffes de soie brod\u00E9es en or et en argent, des velours de soie et des satins qu'il avait pr\u00E9sent\u00E9s ; ces \u00E9toffes se recommandent par la richesse et la perfection du travail. Le jury a d\u00E9cern\u00E9 \u00E0 M. Joseph Mali\u00E9, de Lyon, une m\u00E9daille d'or, pour du satin remarquable par son \u00E9clat et sa souplesse ; du taffetas de qualit\u00E9 sup\u00E9rieure ; des velours trois poils et des velours l\u00E9gers, tr\u00E8s bons et tr\u00E8s beaux. Il a accord\u00E9 des m\u00E9dailles d'argent de premi\u00E8re classe \u00E0 M. Beauvais, de Lyon, pour des velours, des velout\u00E9s, et autres \u00E9toffes de tr\u00E8s belle qualit\u00E9 ; (...) \u00E0 M. Bissardon, de Lyon, pour ses \u00E9toffes soie et or de toute esp\u00E8ce, de soie m\u00E9lang\u00E9e de coton, des velours cisel\u00E9s en dorure, bien fabriqu\u00E9s ; \u00E0\u00A0MM. Debarre, Th\u00E9oleyre et Dutilleul, aussi de Lyon, pour des \u00E9toffes fa\u00E7onn\u00E9es, d'excellente fabrication ; \u00E0 Madame veuve Jacob, de la m\u00EAme ville, pour des satins liser\u00E9s et des taffetas ; \u00E0 M. Lagrive, de Lyon, pour la beaut\u00E9 de ses\u00A0satins et de ses \u00E9toffes unies ; \u00E0 MM. S\u00E9guin et Pujol, de la m\u00EAme ville, pour leurs brocarts, leurs lustrines, et leurs gazes broch\u00E9es or et argent ; \u00E0 MM. S\u00E9riziat et Aymar, pour leurs satins et leurs \u00E9toffes fa\u00E7onn\u00E9es ; enfin, \u00E0 M. Terret, pour des schals, des \u00E9toffes fa\u00E7onn\u00E9es et chin\u00E9es, de qualit\u00E9s tr\u00E8s vari\u00E9es et excellentes. (...) La broderie en soie, en or et en argent sur toutes sortes d'\u00E9toffes est port\u00E9e \u00E0 Lyon au plus haut degr\u00E9 de perfection. Les dessins sont de bon go\u00FBt et tr\u00E8s bien ex\u00E9cut\u00E9s. On a vu \u00E0 la derni\u00E8re exposition plusieurs tableaux brod\u00E9s en soie, en or et en argent, qui offrent une r\u00E9union de talents rares et qui ont fait l'admiration des connaisseurs. Le jury a distingu\u00E9 par des m\u00E9dailles d'argent de deuxi\u00E8me classe\u00A0les broderies imitant le velours de M. Fleury Delorme, de Paris, et celles de Madame veuve Vitte, et de M. Bony, de Lyon, qui sont tr\u00E8s belles.\u00A0\u00BB\u00A0\u00A0Sur les trois m\u00E9dailles d'argent de deuxi\u00E8me classe accord\u00E9es dans la section \u00AB Broderie et Passementerie\u00A0\u00BB, un seul Parisien est r\u00E9compens\u00E9, Fleury Delorme,\u00A0pour avoir \u00AB pr\u00E9sent\u00E9 un nouveau genre de broderie imitant le velours, dont le commerce des modes peut tirer un parti avantageux. \u00BB\u00A0Le mus\u00E9e des Tissus conserve un exemplaire de ce type de broderie invent\u00E9 par Fleury Delorme (inv. MT 26321). Les deux autres exposants sont des Lyonnais, la veuve Vitte, qui \u00AB a imagin\u00E9 un nouveau point de broderie propre \u00E0 donner plus de correction \u00E0 ce genre de travail \u00BB et le fameux Jean-Fran\u00E7ois Bony (1754-1825), qui \u00AB a expos\u00E9 des broderies remarquables par leur beaut\u00E9. \u00BB\nLes prescriptions du Premier Consul, puis de l'Empereur,\u00A0concernant le costume officiel et les v\u00EAtements de cour ont fortement contribu\u00E9 \u00E0 d\u00E9velopper la branche de la broderie \u00E0 Lyon, tout comme l'\u00E9volution de la mode elle-m\u00EAme et le go\u00FBt des \u00E9l\u00E9gantes pour les robes, les dolmans, les ch\u00E2les, fichus ou demi-fichus brod\u00E9s. L'ann\u00E9e m\u00EAme de l'Exposition des produits\u00A0de l'industrie fran\u00E7aise de 1806, Claude Bonnard, fabricant de tulles, adresse un M\u00E9moire au ministre de l'Int\u00E9rieur,\u00A0dans lequel il pr\u00E9cise que la broderie \u00AB occupe \u00E0 Lyon plusieurs milliers de bras. \u00BB Il accompagne ce m\u00E9moire d'un Acte de notori\u00E9t\u00E9 publique\u00A0en faveur de ses tulles enregistr\u00E9 devant le notaire\u00A0Jean-Baptiste Masson le 26 avril 1806 et au Tribunal civil de Lyon le 3 mai suivant, qui donne la liste des principaux marchands brodeurs de la ville \u00E0 cette date, \u00E0 savoir : Gaspard Fabry, rue du Griffon ; Jacques Bernard, rue Sainte-Catherine, Beno\u00EEt Montalan, rue Royale ; Pierre Ferrand, rue D\u00E9sir\u00E9e ; Matthias Picard, place Croix-Paquet ; Antoine Saint-Didier, rue Royale ; \u00C9tienne Math\u00E9, mont\u00E9e de la Glaci\u00E8re ; Claude-Philippe-Bernard Vette, rue Royale ; Pierre Fournereau, rue D\u00E9sir\u00E9e ; Philippe Montalan, rue du Griffon ; Chaudon et Cie,\u00A0place de la Boucherie des Terreaux ; Antoine Villoud, chemin de Saint-Clair ; Claude Hodieu, rue Neuve des Ursulines ; Fran\u00E7ois-Claude Forest, rue de la Vieille-Monnaie ; Matthieu Furnion, rue Puits-Gaillot ; Claude-Barth\u00E9l\u00E9my George, rue Basse-Ville ; Veuve Boulard et Cie, rue Royale ; Marie Jaunant, femme Navier, rue des Deux-Angles ; \u00C9tiennette Rivet, veuve Neyret-Chevron, quai Saint-Clair ; Aline Alexandrin, veuve de Jean-Jacques Deaux, rue Clermont. Sont aussi mentionn\u00E9s des n\u00E9gociants :\u00A0Placy et Cie, rue Royale ; Roux p\u00E8re et fils, rue Clermont ; Fran\u00E7ois Bal, rue Pizay. Beaucoup ont particip\u00E9 \u00E0 l'Exposition des produits de l'industrie fran\u00E7aise, tout comme Claude Bonnard, d'ailleurs.\nDans cette liste pourtant n'apparaisent ni Jean-Fran\u00E7ois Bony ni la veuve Vitte.\nL'Almanach du commerce de Paris, d\u00E9partemens de l'Empire fran\u00E7ais et des principales villes du monde publi\u00E9 par Jean de la Tynna, membre de la Soci\u00E9t\u00E9 d'encouragement pour l'Industrie nationale, pour l'ann\u00E9e 1809, mentionne comme brodeurs \u00E0 Lyon : Artant et Cie [Artaud et Cie],\u00A0rue des Feuillants ; Chevreau, quai Saint-Clair ; Durand et Mattet [Math\u00E9], \u00E0 la Glaci\u00E8re ; Fillon et Cie, petite rue des Feuillants ; Fournereau, rue D\u00E9sir\u00E9e ; Furnion et Cie, \u00E0 la\u00A0Glaci\u00E8re ; Garcin, rue D\u00E9sir\u00E9e ;\u00A0Montalant fr\u00E8res, mont\u00E9e du Griffon ; Perrin et Boni (Bony), quai de Retz ; Picard, place du S\u00E9minaire ; Placi (Placy), quai Saint-Clair ; Roux et Vertier, rue des Feuillants.\u00A0\nL'ann\u00E9e suivante, L'Indicateur de Lyon mentionne pr\u00E8s de cinquante marchands brodeurs \u00E0 Lyon, indiquant la vitalit\u00E9 de cette activit\u00E9 en 1810. Sont recens\u00E9s : Artaud et Cie, rue des Feuillants ;\u00A0Jacques Bellacla, 23, rue des Deux-Angles ;\u00A0L\u00E9on Bertrand, 122, quai Saint-Clair ;\u00A0Demoiselle Boissard, rue Vieille-Monnaie, maison Bertheon ;\u00A0Gabriel Bonnot et Cie, 128, rue Royale ;\u00A0Jean-Fran\u00E7ois Bony, 64, quai de Retz ;\u00A0L\u00E9on Cailhava, angle des rues Royale et des Deux-Angles, n\u00B0 109 ;\u00A0Veuve Chedel, 117, rue Royale ;\u00A0Aim\u00E9 Danguin, 121, quai Saint-Clair ;\u00A0Veuve Deaux, 21, rue Clermont ;\u00A0Veuve Desolme, marchande de modes et brodeuse, angle de grande et petite rue des Feuillants, n\u00B0 104 ;\u00A0Claude Despagnes, 56, rue des Bouchers ;\u00A0Veuve Dupont, 15, place du Lyc\u00E9e ;\u00A0Albert Eymard, 143, quai du Rh\u00F4ne ;\u00A0Gaspard Fabry, 77, rue du Griffon ;\u00A0Demoiselle Fayolle, rue Basse-Ville et du Garet, n\u00B0 142 ;\u00A0Jacques Ferlay, angle des rues Lanterne et de la Cage, 13 ;\u00A0Pierre Ferri\u00E8re, grande rue Longue, 126 ;\u00A0Claude Forest, 51, rue de la Vieille-Monnaie ;\u00A0Pierre Fournereau, 103 bis, place de la Croix-Paquet ;\u00A0Beno\u00EEt Froment, 108, rue des Deux-Angles ;\u00A0Matthieu Furnion, 86, rue de la Glaci\u00E8re ;\u00A0Fran\u00E7ois Garcin, 33, rue D\u00E9sir\u00E9e ;\u00A0Gervais s\u0153urs, 163, rue Lafont ;\u00A0Jacques Gubian, place des Capucins, maison Aimard ;\u00A0Claude Hodieu, rue neuve des Capucins, maison Santonax ;\u00A0Madame Joly, 119, quai Saint-Clair ;\u00A0Michel Julien, 27, place de Saint-Clair ;\u00A0Jean-Baptiste Maintigneux, rue neuve des Capucins, maison Thibi\u00E8re ;\u00A0Edme Martin, 101, place des Carmes ;\u00A0Matet (ou Mathet) [\u00C9tienne Math\u00E9], marchand brodeur, au 4, mont\u00E9e de la Glaci\u00E8re ;\u00A0Claude Mazoyer, rue neuve des Capucins, maison Santonax ;\u00A0Jean-Baptiste Montaland, 21, rue des Deux-Angles ;\u00A0Philippe Montaland a\u00EEn\u00E9, 11, rue du Griffon ;\u00A0Fran\u00E7ois Navier, 22, rue des Deux-Angles et Royale ;\u00A0Pierre Pavy, rue neuve des Capucins, maison Lebrument ;\u00A0Veuve Perrein, brodeuse, 6, grand rue Sainte-Catherine ;\u00A0Veuve Perrin et fils, 6, grande rue Sainte-Catherine ;\u00A0Matthias Picard, 103, place Croix-Paquet ;\u00A0Jean-Pierre Placy, 114, rue Royale ;\u00A0Madame Prodon, 47, place du Concert ;\u00A0Prost s\u0153urs, brodeuses au petit point, 118, rue Royale ;\u00A0Antoine Reydellet-Rolle, 110, rue des Deux-Angles ;\u00A0Jean-Claude Roussy, quai Saint-Clair et 122, rue Royale ;\u00A0Antoine Saint-Didier, 119, quai Saint-Clair ;\u00A0Sauveur s\u0153urs, marchandes de broderies et nouveaut\u00E9, 17, petite rue Merci\u00E8re ;\u00A0Veuve Thomassin, 3 petite rue Merci\u00E8re ;\u00A0Tournachon et Barras, 46, rue Vieille-Monnaie ;\u00A0Verthier, 104, grande rue des Feuillants ;\u00A0et Pierre Vibert, 163, rue Lafont.\nLeurs boutiques se situent\u00A0majoritairement dans un m\u00EAme quartier, entre le Rh\u00F4ne et la place Croix-Paquet, avec une forte concentration de maisons sur le quai Saint-Clair (actuel quai Andr\u00E9 Lassagne), dans les rues Royale,\u00A0des Deux-Angles (actuelle rue d'Alsace-Lorraine) et place Croix-Paquet, et autour de la place des Terreaux, dans les rues\u00A0des Feuillants, Vieille-Monnaie (actuelle rue Ren\u00E9-Leyraud), mont\u00E9e de la Glaci\u00E8re (actuelle rue Romarin), rue du Griffon, rue Sainte-Catherine.\nLe recensement de la population de Lyon, effectu\u00E9 en 1810 (Archives municipales de Lyon, 0784 WP 011), compte \u00E9galement des brodeuses de bas, environ deux cents, \u00E9tablies autour de la place Confort (actuelle place des Jacobins), des rues des Cordeliers, Basse-Ville, \u00C9corche-B\u0153uf, du Petit Soulier, Grenette, du M\u00E9ridien, Paradis, de l'H\u00F4pital et Raisin, et des brodeuses, environ trois cent quatre-vingt-dix, \u00E9tablies dans trois quartiers principalement : entre les rues Thomassin, de la Poulaillerie, Merci\u00E8re, Tupin et Palais-Grillet, d'abord ; puis entre les rues Grenette, Pizay, le quai de la P\u00EAcherie et la rue du Garet ; enfin, au pied de la Croix-Rousse, entre les rues D\u00E9sir\u00E9e, du Griffon, la mont\u00E9e de la Croix-Rousse et la rue Royale.\u00A0Un petit nombre, \u00E9galement, est \u00E9tabli autour de la rue Saint-Jean, sans doute en raison de la proximit\u00E9 de la primatiale et des commandes du clerg\u00E9.\nL'\u00E9chantillon de broderie\u00A0appartenait a un ensemble de \u00AB cent trente-trois \u00E9chantillons de broderies soie nuanc\u00E9e, paillettes, dorures et pierreries pour v\u00EAtements (...) reli\u00E9s en 1 vol. in folio \u00BB (inv. MT 18499 \u00E0 MT 18631) acquis en 1866 de l'antiquaire Gallot, passage des Terreaux, \u00E0 Lyon, qui provenait du fonds d'un des marchands brodeurs mentionn\u00E9s par l'Almanach de 1810. Le d\u00E9cor, r\u00E9alis\u00E9 sur un serg\u00E9 de soie blanc, a \u00E9t\u00E9 brod\u00E9 au point lanc\u00E9, au point de chausson et au pass\u00E9 plat de lames, lames gaufr\u00E9es et cannetilles m\u00E9talliques dor\u00E9es. Le semis d'\u00E9toiles et de pois, dans le fond, et le courant de gramin\u00E9es, soulign\u00E9e par une frise en dents-de-scie enrichie de\u00A0chutes de rosettes, alternant avec des feuilles, permet de reconna\u00EEtre un projet pour bas de robe.\nParmi les\u00A0marchands\u00A0brodeurs mentionn\u00E9s dans l'Almanach de 1810, certains avaient acquis une notori\u00E9t\u00E9 plus importante dans le domaine de la broderie pour v\u00EAtements d'apparat, cat\u00E9gorie \u00E0 laquelle appartient l'\u00E9chantillon du mus\u00E9e des Tissus, en dorure sur fond blanc. En avril 1810, la maison Bony et Cie, par exemple, re\u00E7ut du Conseil municipal de Lyon\u00A0la commande d'un \u00AB manteau de satin blanc et (d')une robe ronde de tissu argent fin \u00BB, les deux v\u00EAtements \u00E9tant \u00AB brod\u00E9s richement en superbe dorure fine \u00BB et de mod\u00E8le exclusif pour un montant compris entre dix mille et douze mille francs afin d'\u00EAtre offerts \u00E0 l'Imp\u00E9ratrice Marie-Louise, pour comm\u00E9morer ses noces avec l'Empereur. Le mus\u00E9e des Tissus conserve une gouache de Jean-Fran\u00E7ois Bony, repr\u00E9sentant la robe et le manteau (inv. MT 18797.1) et l'essai de broderie qui correspond au bas de la robe (inv. MT 18797.2), ainsi qu'un projet \u00E0 la mine de plomb et la gouache pour cette m\u00EAme robe (inv. MT 2014.0.1), un projet \u00E0 la mine de plomb pour les broderies du manteau (inv. MT 2014.0.2) et deux gouaches \u00E0 l'\u00E9chelle 1 sur papier argent\u00E9 pour la broderie du bas de la robe (inv. MT 2014.0.3 et MT 2014.0.4). Quatre ans plus tard, \u00E0 l'occasion de la\u00A0r\u00E9ception \u00E0 Lyon de la duchesse d'Angoul\u00EAme, Jean-Fran\u00E7ois Bony est honor\u00E9 par Madame Royale\u00A0d'une visite \u00E0 son atelier. Il\u00A0s'engage \u00E0 lui remettre dans un d\u00E9lai de six semaines \u00AB une robe de cour \u00E0 grande queue sur une belle Levantine rose brod\u00E9e argent sur le dessin compos\u00E9 de fleurs naturelles li\u00E9es par des ornements recherch\u00E9s \u00BB et \u00AB une robe ronde sur tulle ray\u00E9 dont le dessin sera compos\u00E9 de roses, de renoncules et autres fleurs ex\u00E9cut\u00E9es dans les couleurs naturelles en soie unie, le fond de la robe sera \u00E0 colonnes et petits bouquets brod\u00E9s argent fin ; au bas de la robe sera un falbala brod\u00E9 aussi en argent. Prix convenu : 3000 francs. \u00BB\nEnfin, lors du s\u00E9jour \u00E0 Lyon, en 1816, de Marie-Caroline de Bourbon-Siciles, \u00E0 l'occasion de son mariage avec Charles-Ferdinand d'Artois, duc de Berry, Jean-Fran\u00E7ois Bony est\u00A0encore\u00A0sollicit\u00E9\u00A0puisqu'il r\u00E9alise une \u00AB robe longue sur satin blanc, brod\u00E9e richement en or fin \u00BB, tandis que\u00A0la maison Placy et Cie\u00A0ex\u00E9cute deux robes qui sont remises \u00E0 la duchesse avec la corbeille offerte par la Chambre de Commerce de la ville. La premi\u00E8re est une \u00AB robe tulle, mailles fixes ; le fond de la robe glac\u00E9 argent fin, la bordure form\u00E9e d'une guirlande de roses, brod\u00E9es soie avec feuillage ; au-dessous de la guirlande, une broderie en argent mate, le bas de la robe termin\u00E9 par une frange nuanc\u00E9e, la ceinture assortie \u00E0 la robe, la doublure est en satin blanc \u00BB ; la seconde, \u00AB une robe tulle, mailles fixes, brod\u00E9e soie blanche, le dessin compos\u00E9 d'une plante de muguet et de petites cloches, le fond de la robe \u00E0 colonnes se r\u00E9unissant dans le haut, compos\u00E9 d'un courant de cloches se liant dans le bas \u00E0 la plante de muguet. \u00BB La duchesse de Berry, invit\u00E9e \u00E0 assister \u00E0 un spectacle le soir m\u00EAme au Grand-Th\u00E9\u00E2tre, choisit la premi\u00E8re des deux robes de Placy pour para\u00EEtre en public.\nLa maison de Jean-Fran\u00E7ois Bony et la maison Placy et Cie sont alors les deux ateliers les plus susceptibles de r\u00E9aliser des v\u00EAtements de luxe, comme en t\u00E9moignent aussi,\u00A0par exemple,\u00A0deux \u0153uvres de Placy et Cie conserv\u00E9es au mus\u00E9e des Tissus,\u00A0\u00AB un morceau de bas d'une robe avec broderie, soie, chenille, dorure, etc., ex\u00E9cut\u00E9e pour l'imp\u00E9ratrice de Russie, 1801 \u00BB (inv. MT 20852) et un \u00AB autre morceau, bas d'une robe brod\u00E9e pour la cour, 1807 \u00BB (inv. MT 20853).\nL'usage des diff\u00E9rentes lames, lames gaufr\u00E9es, cannetilles dor\u00E9es sur l'\u00E9chantillon de bas de robe, sont comparable\u00A0aux effets\u00A0mis en \u0153uvre sur\u00A0l'\u00E9chantillon de la robe de Marie-Louise. Le mus\u00E9e des Tissus conserve aussi\u00A0un carnet de dessins de Jean-Fran\u00E7ois Bony, dans lequel figurent plusieurs projets de broderie ou de meubles fa\u00E7onn\u00E9s des ann\u00E9es 1802 \u00E0 1816 (inv. MT 27638), certains accompagn\u00E9s de pr\u00E9cieuses annotations manuscrites. Au folio 33, par exemple, un projet de broderie pour bas de robe est accompagn\u00E9 des indications \u00AB canetille \u00BB, \u00AB\u00A0fil\u00E9 \u00BB et \u00AB\u00A0lame \u00BB pour d\u00E9crire les diff\u00E9rents effets voulu par le brodeur. Au folio 11 est esquiss\u00E9e \u00E0 grands traits une robe de cour \u00E0 tra\u00EEne, avec d\u00E9cor de broderie en partie inf\u00E9rieure et sur un montant qui court jusqu'\u00E0 la ceinture. Elle est accompagn\u00E9e d'une autre esquisse des d\u00E9tails de la broderie, avec l'inscription \u00AB robe/ de Mme/ Murat. \u00BB Le d\u00E9cor or sur fond blanc de l'\u00E9chantillon de broderie du mus\u00E9e des Tissus r\u00E9v\u00E8le qu'il est destin\u00E9, pr\u00E9cis\u00E9ment, \u00E0 la confection d'une robe de cour. Aux folios 2 et 3, des croquis rapides pour bordures de v\u00EAtements pr\u00E9sentent la m\u00EAme feuille dentel\u00E9e que la frise sur l'\u00E9chantillon, et le folio 6 utilise le motif du panache de gramin\u00E9e pour un courant de bas de robe. Au folio 128, un projet montre des enroulements de feuilles et de fleurs aux inflorescences en grappes qui rappellent la composition de\u00A0l'\u00E9chantillon.\u00A0Les analogies techniques et stylistiques entre les \u0153uvres de la main de Jean-Fran\u00E7ois Bony et l'\u00E9chantillon de broderie du mus\u00E9e des Tissus\u00A0autorisent l'attribution de ce dernier au c\u00E9l\u00E8bre brodeur.\nLa plupart des \u00E9chantillons acquis en 1866 \u00E0 l'antiquaire Gallot sont d'ailleurs attribuables avec certitude \u00E0 Jean-Fran\u00E7ois Bony, puisqu'ils pr\u00E9sentent de nombreuses analogies avec les\u00A0esquisses \u00E0 la gouache pour broderies conserv\u00E9es au mus\u00E9e des Tissus ou avec les croquis\u00A0\u00E0 la mine de plomb ou \u00E0 l'encre\u00A0de la main de l'artiste qui figurent\u00A0dans le carnet de dessins \u00E9galement conserv\u00E9 au mus\u00E9e des Tissus ou dans un autre carnet de mod\u00E8les de broderie, au mus\u00E9e des Arts d\u00E9coratifs de Paris (inv. CD 2830).\nMaximilien Durand"@fr . . . "2021-02-10T00:00:00"^^ .