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  • Panneau de velours dentelle pour une robe destinée à la Reine Victoria (fr)
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  • Le panneau a été donné au musée d'Art et d'Industrie par la maison Bérard et Ferrand. Il s'agit du premier don concédé par la maison, établie sous cette raison commerciale depuis l'association, en 1870, d'Ernest Bérard et de Pierre-Joseph Ferrand. Le siège de la maison était au 2, quai de Retz. Elle succédait à la maison Bérard, Poncet et Cie puis Poncet, Papillon et Girodon, dont les productions avaient été remarquées aux Expositions universelles ou internationales de Paris, en 1855, de Londres, en 1862, de Paris, en 1867 et du Havre, en 1868. Le panneau de velours avait précisément été présenté à l'Exposition universelle de Londres, en 1862. Alfred Darcel, qui commente l'événement pour L'Illustration, lui réserve même quelques lignes : « Le système de trompe-l'œil s'exagère encore, dans la magnifique exposition de MM. Bérard, Poncet et Cie. Après avoir fait quelques réserves, que l'on a dû pressentir déjà, en faveur du goût absolu que doit guider la raison, nous avouons très volontiers que nous considérons comme des chefs-d'œuvre de fabrication les robes exposées par ces messieurs. Ainsi, il y a une robe en taffetas bleu ornée de rubans de dentelle rattachés par des volubilis brochés en couleurs avec feuilles de velours noir ; puis une autre robe en gros de Tours jaune, recouverte d'une dentelle blanche avec attaches de volubilis noirs et de fleurs de couleur, obtenues ainsi du premier coup au métier, et qui dépassent tout ce que l'on peut concevoir comme effets de tissage » (p. 131). C'est Ernest Bérard lui-même qui a probablement souhaité faire don de cet exemple prestigieux de sa propre production, qu'il a accompagné des indications relatives aux circonstances de sa création : la laize avait été commandée à la maison Bérard, Poncet et Cie par la maison Bonnet, Thomas frères et Julmasse de Paris, successeurs de la maison Delisle, établis 13, rue de Grammont et 12, rue de Choiseul, « fournisseurs-brevetés de S. M. l'Impératrice et de S. M. la Reine d'Angleterre », comme le précise l'Almanach de la Cour, de la Ville et des départements pour 1861, publié à Paris en 1860. Le 24 janvier 1855, Jacques-Isidore Bonnet, négociant, Martial-Camille Thomas et son frère, Jean-Baptiste-Prosper Thomas, tous deux commis-négociants, Jean-Marie Gulielmazi, dit Julmasse, négociant, s'associaient sous la raison sociale Bonnet, Thomas frères et Julmasse pour l'exploitation du fonds de commerce de nouveautés, à Paris, 13, rue de Grammont, connu sous le nom de maison Delisle et Cie. Cette dernière avait été établie le 1er juillet 1837, par Angélique-Amélie Esnault-Pelterie, veuve de Jean-Armand Delisle, négociant demeurant au 13, rue de Grammont, avec Charles-Joseph Pussey, négociant demeurant au 15, rue de Choiseul, et avec François Delisle, fils de la veuve Delisle, pour l'exploitation de la maison de nouveautés connue sous le nom de maison Delisle et portant pour enseigne À Sainte Anne. Cette maison, fondée en 1813 par Jean-Armand Delisle, a ouvert en 1836 de nouveaux magasins vers le boulevard des Capucines, rue de Grammont. Elle s'est dès lors imposée comme l'une des premières enseignes de nouveauté comme l'indique la vicomtesse de Renneville — Olympe Vallée, épouse Paul Descubes de Lascaux —, célèbre chroniqueuse de mode, dans le Courrier de la Mode : « La maison Delisle, en plantant son drapeau industriel au centre le plus luxueux et le plus aristocratique de Paris, et sur l'emplacement de l'ancien hôtel Osmond, a conquis tout d'un coup une nouvelle importance et une nouvelle splendeur. Quand le siècle marche et que les habitudes d'élégance changent de niveau et se transforment, il faut aussi aller en avant et chercher le progrès, l'intelligence et la lumière. C'est ce qu'a fait la maison Delisle. Ses nouveaux magasins du boulevard des Capucines sont à la hauteur de sa renommée. Cette ancienne maison n'avait pas besoin d'éblouir la foule par l'éclat des dorures et d'un luxe trompeur. Elle est restée fidèle à sa devise : simplicité et élégance. Le décor des magasins est d'une sobriété de style qui décèle un certain orgueil. Que vient-on chercher, en effet, dans la maison Delisle ? Sont-ce des frises dorées, des fresques ou des candélabres supportés par des nymphes ? Non, certes. On lui demande, à chaque renouvellement de saison, la nouveauté la plus riche et du meilleur goût. On attend ses décrets pour choisir telle robe, tel tissu ou telle confection. Il s'agissait donc d'édifier une ornementation simple et sévère, qui fût en rapport avec ses titres de noblesse. Le chêne, le noyer, le palissandre et l'ébène sont les bois qui décorent chaque salon et qui leur donne un cachet unique. Les découpures en chêne ont la légèreté de la guipure. On dirait que chaque panneau est surmonté d'un gracieux volant. Je ne sais rien de plus coquet que le salon tout en ébène destiné aux dentelles. Ce salon est une merveille, une grande dame en ferait son boudoir. L'Alençon, le Bruxelles et le Chantilly s'y reposent, en reines qu'elles sont. D'autres salons non moins remarquables, en bois de palissandre, sont réservés aux cachemires. On peut hautement les considérer comme le premier comptoir indien en France, car la maison Delisle a pour associé l'un des plus riches négociants de Lahore, M. Peer Burkhehs, qui a affranchi le cachemire des Indes de la banalité courante, en lui donnant toute la fantaisie du goût parisien. Notez, je vous prie, que je dis salons, en parlant des magasins de la maison Delisle. On n'y voit pas ces longues et tristes galeries sentant le bazar, en rentrant, dans l'infortunité des autres maisons de nouveautés. Chaque spécialité est chez elle. Rien que l'entrée des magasins, sur le boulevard, indique chez qui l'on va. D'élégantes colonnes supportent une espèce de portique. On pressent presque le palais grec ; mais de radieuses vitrines étalent avec magnificence toutes les primeurs de la saison d'automne, et l'art s'efface devant l'industrie. On est, chez Delisle, dans le Parthénon de la mode. Plus tard, une seconde entrée se trouvera rue Lafayette, alors que les projets grandioses du plan de Paris seront réalisés, et que cette ligne importante sera tracée. Fidèle à ses traditions, la maison Delisle s'est restreinte aux spécialités qui ont établi sa gloire et sa vogue, et n'a pas voulu changer le genre aristocratique de ses affaires, en établissant de nouveaux comptoirs, qui eussent été indépendants du goût, de la toilette et de la mode. En concentrant tous ses capitaux et toutes ses forces intelligentes sur les soieries, les châles, les dentelles, les robes de bal et de ville, les tissus de fantaisie, la confection et la lingerie, la maison Delisle leur a donné une valeur centuple et précieuse, au point de vue de la fabrication, de la distinction, du goût et du prix d'achat. Tout article compris et fabriqué sur une très grande échelle commerciale coûte nécessairement moins cher, en raison de la quantité produite, et offre en outre un choix plus étendu et plus varié de marchandises. De cette sage entente des affaires, il résulte que la maison Delisle, tout en continuant à éditer les plus beaux articles de nouveauté luxueuse, qui lui ont acquis une réputation universelle, complète également son œuvre progressive, en mettant en vente des étoffes simplettes en rapport avec toutes les bourses et toutes les positions sociales. On aura donc pour rien, désormais, le cachet et la signature de la maison Delisle. J'aurais bien voulu pouvoir décrire la riche simplicité de chaque salon, mais c'eût été presque un petit voyage à entreprendre dans l'Empire de la fantaisie. (...) Je me suis contentée aujourd'hui d'appeler l'attention généreuse sur cette maison, qui mérite d'être visitée, comme on visite un musée contenant des objets d'art, n'ayant pas deux exemplaires. » Bonnet, Thomas frères et Julmasse, successeurs de la maison Delisle, ont continué de s'adresser aux meilleurs fabricants pour satisfaire les plus exigeantes des élégantes, notamment l'impératrice Eugénie et la reine Victoria. C'est pour cette dernière qu'ils s'adressent à la maison Bérard, Poncet et Cie de Lyon, et Ernest Bérard lui-même fournit le dessin. Né à Lyon le 20 octobre 1829, d'un père commis-négociant à Lyon, Denis-Joseph-Ernest Bérard étudie à l'École des Beaux-Arts de Lyon, puis auprès du peintre Louis-Jean-Baptiste Guy (1824-1888). Il travaille comme dessinateur de fabrique, notamment pour des étoffes d'ameublement, des ornements d'église et des articles pour le Levant. Ernest Bérard est certainement une personnalité hors du commun, comme le prouve le travail qu'il accomplit d'abord sous diverses raisons sociales, puis au sein de sa maison Bérard et Ferrand. À l'Exposition universelle de 1889, à Paris, celle-ci confirme le succès qu'elle avait rencontré depuis 1870 et triomphe par la qualité de ses façonnés. Parallèlement à son activité de dessinateur et de fabricant, Ernest Bérard a aussi mené une carrière de peintre en exposant régulièrement des toiles aux Salons lyonnais, entre 1878 et 1903, qui représentent essentiellement des vues de l'Ain, du Dauphiné ou des pays orientaux dans lesquels il a accompli de nombreux voyages commerciaux, pour développer le marché du Levant, créant des succursales à Bagdad, Smyrne et Bombay. Il mena en outre une importante carrière politique. Républicain en 1848, il milita à Lyon sous l'Empire comme membre de l'association phalanstérienne et, sous la République, fut élu Conseiller municipal du sixième arrondissement de Lyon en 1884 et en 1888, député du Rhône en 1889, réélu en 1893. Il siégea à la gauche radicale et fit partie de diverses Commissions, notamment de la Commission d'enquête sur l'affaire de Panama (en 1892 et 1893), de la Commission de révision de la loi sur les protêts, de la Commission d'examen des propositions sur la participation des ouvriers aux bénéfices, enfin de la Commission chargée d'examiner les projets relatifs aux colonies. Il déposa en 1890 une proposition de loi sur la retraite des ouvriers de l'agriculture et de l'industrie et, en 1898, une proposition de loi relative à la création de livrets de travail et d'épargne. Il réclama aussi la bonification des pensions et retraites liquidées pour incapacité de travail prématurée. Il intervint dans la discussion de projets relatifs aux expositions internationales de Lyon, d'Anvers, de Bruxelles et d'un projet concernant des encouragements spéciaux accordés à la sériciculture et à la filature de la soie. Il ne fut pas réélu en 1898. Il mourut à Lyon le 8 février 1914. La laize réalisée pour la reine Victoria est un exemple précoce de ces étoffes riches, pour robe, qui ont confirmé la suprématie lyonnaise dans le domaine de l'habillement. La technique elle-même est remarquable — le livre d'inventaire du musée indique, en 1872, que cette étoffe est « d'une curieuse fabrication » — puisqu'il s'agit d'un velours ciselé quatre corps, nuancé, sur un fond taffetas, qui figure en trompe-l'œil des volants de dentelle, maintenus en forme de draperies par des bouquets de fleurs au naturel, qui s'enroulent autour de guirlandes noires de volubilis. Le velours frisé et le velours coupé jouent sur le fond de taffetas crème pour donner l'illusion du relief et faire jouer la lumière. Destinée à la confection d'une robe, cette étoffe doit évidemment être envisagée en mouvement pour en apprécier le raffinement et l'originalité. Pourtant, la composition et l'imitation de dentelle rappellent les modèles du XVIIIe siècle qu'Ernest Bérard connaissait parfaitement bien. Cette laize annonce les productions qui feront la gloire de la maison Bérard et Ferrand. En 1883, elle tisse le riche manteau broché d'or de Maria Feodorovna, née princesse Dagmar de Danemark, pour la cérémonie de son couronnement et de celui du tsar Alexandre III. La même année, les fabricants sont gratifiés d'un diplôme d'honneur à l'Exposition d'Amsterdam, et, par décret du 26 septembre 1883, Ernest Bérard est nommé chevalier de la Légion d'Honneur. À l'Exposition des Arts décoratifs de Lyon, en 1884, la maison Bérard et Ferrand présente plusieurs étoffes façonnées qui proclament le grand renouvellement de la soierie lyonnaise. À l'Exposition de 1889, elle est récompensée d'un Grand prix. À la demande d'Édouard Aynard, alors vice-président de la Chambre de Commerce de Lyon, elle offre au musée d'Art et d'Industrie vingt-trois étoffes présentées lors de cet événement (inv. MT 24987 à MT 25009). Elles sont toutes conservées au musée des Tissus. Avec la pente de robe pour la reine Victoria, elles constituent un ensemble unique ; elles rendent surtout hommage à Ernest Bérard, qui contribua grandement à renouveler la production des étoffes façonnées à Lyon dans la seconde moitié du XIXe siècle, notamment par la grande inventivité de ses dessins et par les prouesses techniques qu'il a su accomplir au sein de ses ateliers. Maximilien Durand (fr)
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  • Le panneau a été donné au musée d'Art et d'Industrie par la maison Bérard et Ferrand. Il s'agit du premier don concédé par la maison, établie sous cette raison commerciale depuis l'association, en 1870, d'Ernest Bérard et de Pierre-Joseph Ferrand. Le siège de la maison était au 2, quai de Retz. Elle succédait à la maison Bérard, Poncet et Cie puis Poncet, Papillon et Girodon, dont les productions avaient été remarquées aux Expositions universelles ou internationales de Paris, en 1855, de Londres, en 1862, de Paris, en 1867 et du Havre, en 1868. Le panneau de velours avait précisément été présenté à l'Exposition universelle de Londres, en 1862. Alfred Darcel, qui commente l'événement pour L'Illustration, lui réserve même quelques lignes : « Le système de trompe-l'œil s'exagère encore, dans la magnifique exposition de MM. Bérard, Poncet et Cie. Après avoir fait quelques réserves, que l'on a dû pressentir déjà, en faveur du goût absolu que doit guider la raison, nous avouons très volontiers que nous considérons comme des chefs-d'œuvre de fabrication les robes exposées par ces messieurs. Ainsi, il y a une robe en taffetas bleu ornée de rubans de dentelle rattachés par des volubilis brochés en couleurs avec feuilles de velours noir ; puis une autre robe en gros de Tours jaune, recouverte d'une dentelle blanche avec attaches de volubilis noirs et de fleurs de couleur, obtenues ainsi du premier coup au métier, et qui dépassent tout ce que l'on peut concevoir comme effets de tissage » (p. 131). C'est Ernest Bérard lui-même qui a probablement souhaité faire don de cet exemple prestigieux de sa propre production, qu'il a accompagné des indications relatives aux circonstances de sa création : la laize avait été commandée à la maison Bérard, Poncet et Cie par la maison Bonnet, Thomas frères et Julmasse de Paris, successeurs de la maison Delisle, établis 13, rue de Grammont et 12, rue de Choiseul, « fournisseurs-brevetés de S. M. l'Impératrice et de S. M. la Reine d'Angleterre », comme le précise l'Almanach de la Cour, de la Ville et des départements pour 1861, publié à Paris en 1860. Le 24 janvier 1855, Jacques-Isidore Bonnet, négociant, Martial-Camille Thomas et son frère, Jean-Baptiste-Prosper Thomas, tous deux commis-négociants, Jean-Marie Gulielmazi, dit Julmasse, négociant, s'associaient sous la raison sociale Bonnet, Thomas frères et Julmasse pour l'exploitation du fonds de commerce de nouveautés, à Paris, 13, rue de Grammont, connu sous le nom de maison Delisle et Cie. Cette dernière avait été établie le 1er juillet 1837, par Angélique-Amélie Esnault-Pelterie, veuve de Jean-Armand Delisle, négociant demeurant au 13, rue de Grammont, avec Charles-Joseph Pussey, négociant demeurant au 15, rue de Choiseul, et avec François Delisle, fils de la veuve Delisle, pour l'exploitation de la maison de nouveautés connue sous le nom de maison Delisle et portant pour enseigne À Sainte Anne. Cette maison, fondée en 1813 par Jean-Armand Delisle, a ouvert en 1836 de nouveaux magasins vers le boulevard des Capucines, rue de Grammont. Elle s'est dès lors imposée comme l'une des premières enseignes de nouveauté comme l'indique la vicomtesse de Renneville — Olympe Vallée, épouse Paul Descubes de Lascaux —, célèbre chroniqueuse de mode, dans le Courrier de la Mode : « La maison Delisle, en plantant son drapeau industriel au centre le plus luxueux et le plus aristocratique de Paris, et sur l'emplacement de l'ancien hôtel Osmond, a conquis tout d'un coup une nouvelle importance et une nouvelle splendeur. Quand le siècle marche et que les habitudes d'élégance changent de niveau et se transforment, il faut aussi aller en avant et chercher le progrès, l'intelligence et la lumière. C'est ce qu'a fait la maison Delisle. Ses nouveaux magasins du boulevard des Capucines sont à la hauteur de sa renommée. Cette ancienne maison n'avait pas besoin d'éblouir la foule par l'éclat des dorures et d'un luxe trompeur. Elle est restée fidèle à sa devise : simplicité et élégance. Le décor des magasins est d'une sobriété de style qui décèle un certain orgueil. Que vient-on chercher, en effet, dans la maison Delisle ? Sont-ce des frises dorées, des fresques ou des candélabres supportés par des nymphes ? Non, certes. On lui demande, à chaque renouvellement de saison, la nouveauté la plus riche et du meilleur goût. On attend ses décrets pour choisir telle robe, tel tissu ou telle confection. Il s'agissait donc d'édifier une ornementation simple et sévère, qui fût en rapport avec ses titres de noblesse. Le chêne, le noyer, le palissandre et l'ébène sont les bois qui décorent chaque salon et qui leur donne un cachet unique. Les découpures en chêne ont la légèreté de la guipure. On dirait que chaque panneau est surmonté d'un gracieux volant. Je ne sais rien de plus coquet que le salon tout en ébène destiné aux dentelles. Ce salon est une merveille, une grande dame en ferait son boudoir. L'Alençon, le Bruxelles et le Chantilly s'y reposent, en reines qu'elles sont. D'autres salons non moins remarquables, en bois de palissandre, sont réservés aux cachemires. On peut hautement les considérer comme le premier comptoir indien en France, car la maison Delisle a pour associé l'un des plus riches négociants de Lahore, M. Peer Burkhehs, qui a affranchi le cachemire des Indes de la banalité courante, en lui donnant toute la fantaisie du goût parisien. Notez, je vous prie, que je dis salons, en parlant des magasins de la maison Delisle. On n'y voit pas ces longues et tristes galeries sentant le bazar, en rentrant, dans l'infortunité des autres maisons de nouveautés. Chaque spécialité est chez elle. Rien que l'entrée des magasins, sur le boulevard, indique chez qui l'on va. D'élégantes colonnes supportent une espèce de portique. On pressent presque le palais grec ; mais de radieuses vitrines étalent avec magnificence toutes les primeurs de la saison d'automne, et l'art s'efface devant l'industrie. On est, chez Delisle, dans le Parthénon de la mode. Plus tard, une seconde entrée se trouvera rue Lafayette, alors que les projets grandioses du plan de Paris seront réalisés, et que cette ligne importante sera tracée. Fidèle à ses traditions, la maison Delisle s'est restreinte aux spécialités qui ont établi sa gloire et sa vogue, et n'a pas voulu changer le genre aristocratique de ses affaires, en établissant de nouveaux comptoirs, qui eussent été indépendants du goût, de la toilette et de la mode. En concentrant tous ses capitaux et toutes ses forces intelligentes sur les soieries, les châles, les dentelles, les robes de bal et de ville, les tissus de fantaisie, la confection et la lingerie, la maison Delisle leur a donné une valeur centuple et précieuse, au point de vue de la fabrication, de la distinction, du goût et du prix d'achat. Tout article compris et fabriqué sur une très grande échelle commerciale coûte nécessairement moins cher, en raison de la quantité produite, et offre en outre un choix plus étendu et plus varié de marchandises. De cette sage entente des affaires, il résulte que la maison Delisle, tout en continuant à éditer les plus beaux articles de nouveauté luxueuse, qui lui ont acquis une réputation universelle, complète également son œuvre progressive, en mettant en vente des étoffes simplettes en rapport avec toutes les bourses et toutes les positions sociales. On aura donc pour rien, désormais, le cachet et la signature de la maison Delisle. J'aurais bien voulu pouvoir décrire la riche simplicité de chaque salon, mais c'eût été presque un petit voyage à entreprendre dans l'Empire de la fantaisie. (...) Je me suis contentée aujourd'hui d'appeler l'attention généreuse sur cette maison, qui mérite d'être visitée, comme on visite un musée contenant des objets d'art, n'ayant pas deux exemplaires. » Bonnet, Thomas frères et Julmasse, successeurs de la maison Delisle, ont continué de s'adresser aux meilleurs fabricants pour satisfaire les plus exigeantes des élégantes, notamment l'impératrice Eugénie et la reine Victoria. C'est pour cette dernière qu'ils s'adressent à la maison Bérard, Poncet et Cie de Lyon, et Ernest Bérard lui-même fournit le dessin. Né à Lyon le 20 octobre 1829, d'un père commis-négociant à Lyon, Denis-Joseph-Ernest Bérard étudie à l'École des Beaux-Arts de Lyon, puis auprès du peintre Louis-Jean-Baptiste Guy (1824-1888). Il travaille comme dessinateur de fabrique, notamment pour des étoffes d'ameublement, des ornements d'église et des articles pour le Levant. Ernest Bérard est certainement une personnalité hors du commun, comme le prouve le travail qu'il accomplit d'abord sous diverses raisons sociales, puis au sein de sa maison Bérard et Ferrand. À l'Exposition universelle de 1889, à Paris, celle-ci confirme le succès qu'elle avait rencontré depuis 1870 et triomphe par la qualité de ses façonnés. Parallèlement à son activité de dessinateur et de fabricant, Ernest Bérard a aussi mené une carrière de peintre en exposant régulièrement des toiles aux Salons lyonnais, entre 1878 et 1903, qui représentent essentiellement des vues de l'Ain, du Dauphiné ou des pays orientaux dans lesquels il a accompli de nombreux voyages commerciaux, pour développer le marché du Levant, créant des succursales à Bagdad, Smyrne et Bombay. Il mena en outre une importante carrière politique. Républicain en 1848, il milita à Lyon sous l'Empire comme membre de l'association phalanstérienne et, sous la République, fut élu Conseiller municipal du sixième arrondissement de Lyon en 1884 et en 1888, député du Rhône en 1889, réélu en 1893. Il siégea à la gauche radicale et fit partie de diverses Commissions, notamment de la Commission d'enquête sur l'affaire de Panama (en 1892 et 1893), de la Commission de révision de la loi sur les protêts, de la Commission d'examen des propositions sur la participation des ouvriers aux bénéfices, enfin de la Commission chargée d'examiner les projets relatifs aux colonies. Il déposa en 1890 une proposition de loi sur la retraite des ouvriers de l'agriculture et de l'industrie et, en 1898, une proposition de loi relative à la création de livrets de travail et d'épargne. Il réclama aussi la bonification des pensions et retraites liquidées pour incapacité de travail prématurée. Il intervint dans la discussion de projets relatifs aux expositions internationales de Lyon, d'Anvers, de Bruxelles et d'un projet concernant des encouragements spéciaux accordés à la sériciculture et à la filature de la soie. Il ne fut pas réélu en 1898. Il mourut à Lyon le 8 février 1914. La laize réalisée pour la reine Victoria est un exemple précoce de ces étoffes riches, pour robe, qui ont confirmé la suprématie lyonnaise dans le domaine de l'habillement. La technique elle-même est remarquable — le livre d'inventaire du musée indique, en 1872, que cette étoffe est « d'une curieuse fabrication » — puisqu'il s'agit d'un velours ciselé quatre corps, nuancé, sur un fond taffetas, qui figure en trompe-l'œil des volants de dentelle, maintenus en forme de draperies par des bouquets de fleurs au naturel, qui s'enroulent autour de guirlandes noires de volubilis. Le velours frisé et le velours coupé jouent sur le fond de taffetas crème pour donner l'illusion du relief et faire jouer la lumière. Destinée à la confection d'une robe, cette étoffe doit évidemment être envisagée en mouvement pour en apprécier le raffinement et l'originalité. Pourtant, la composition et l'imitation de dentelle rappellent les modèles du XVIIIe siècle qu'Ernest Bérard connaissait parfaitement bien. Cette laize annonce les productions qui feront la gloire de la maison Bérard et Ferrand. En 1883, elle tisse le riche manteau broché d'or de Maria Feodorovna, née princesse Dagmar de Danemark, pour la cérémonie de son couronnement et de celui du tsar Alexandre III. La même année, les fabricants sont gratifiés d'un diplôme d'honneur à l'Exposition d'Amsterdam, et, par décret du 26 septembre 1883, Ernest Bérard est nommé chevalier de la Légion d'Honneur. À l'Exposition des Arts décoratifs de Lyon, en 1884, la maison Bérard et Ferrand présente plusieurs étoffes façonnées qui proclament le grand renouvellement de la soierie lyonnaise. À l'Exposition de 1889, elle est récompensée d'un Grand prix. À la demande d'Édouard Aynard, alors vice-président de la Chambre de Commerce de Lyon, elle offre au musée d'Art et d'Industrie vingt-trois étoffes présentées lors de cet événement (inv. MT 24987 à MT 25009). Elles sont toutes conservées au musée des Tissus. Avec la pente de robe pour la reine Victoria, elles constituent un ensemble unique ; elles rendent surtout hommage à Ernest Bérard, qui contribua grandement à renouveler la production des étoffes façonnées à Lyon dans la seconde moitié du XIXe siècle, notamment par la grande inventivité de ses dessins et par les prouesses techniques qu'il a su accomplir au sein de ses ateliers. Maximilien Durand (fr)
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