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  • Dessus de ployant (fr)
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  • La composition en panneau du décor et son iconographie invitent à reconnaître dans cette œuvre un dessus de ployant, avec garniture du devant de l'assise, ce que semble confirmer l'existence d'un exemplaire parfaitement identique à Paris, dans les collections du musée de la Mode et du Textile, aux Arts décoratifs (inv. 18741), indiquant qu'il s'agissait d'une garniture pour une suite de sièges. Le dessin est tissé en écru, comme le fond satin du dessus de ployant. Il est formé par des plages de velours coupé, cernées de velours frisé, puis il a été peint après tissage. Cette particularité technique, appliquée à un textile d'ameublement, invite à y reconnaître une production d'Antoine Vauchelet, qui avait l'exclusivité de cette technique dont il était l'inventeur dans les dernières années de l'Empire. Né en 1762, Antoine Vauchelet, d'abord établi 28, rue Neuve-Saint-Nicolas, à Paris, élabore vers 1808 une technique qui lui permet de peindre sur velours de soie, de laine ou de coton. Il soumet son procédé à la Société d'encouragement pour l'industrie nationale. Les rapporteurs désignés sont Bardel, au nom d'une Commission spéciale, et Mérimée, et leur rapport est présenté au Conseil d'administration de la Société le 4 janvier 1809 et publié dans le Bulletin de la même année : « Vous nous avez chargés, M. Mérimée et moi, de vous rendre compte d’un nouveau genre de peinture sur étoffe, présenté par M. Vauchelet ; voici notre rapport à ce sujet. M. Vauchelet est parvenu à fixer sur toutes sortes d’étoffes ces couleurs solides, au moyen desquelles il forme différents dessins agréables, plus ou moins corrects, en raison des soins qu’il peut donner à leur exécution. Il y a longtemps qu’on s’est occupé de peindre et d’appliquer des couleurs sur les étoffes, soit au pinceau, soit à la planche d’impression, soit à l’aide de vignettes en cuivre découpées. Ces différents moyens ont eu et ont encore chacun leur mérite suivant les circonstances, c’est-à-dire suivant que la mode ou le bas prix en ont déterminé l’usage : car le genre d’étoffe dont il s’agit a été jusqu’ici employé pour les ajustements de mode qu’il n’a eu une destination fixe et stable, à cause du peu de solidité des couleurs qu’on y appliquait, celles à l’eau perdant bientôt leur éclat, et celles à l’huile ayant d’autres inconvénients. M. Vauchelet semble avoir vaincu toutes ces difficultés. Ses couleurs sont vives, et paraissent avoir toute la solidité désirable. Il peut les employer avec avantage sur des étoffes de laine, de coton ou de soie ; mais elles ne ressortent bien que sur le velours. Il a trouvé le moyen de fixer l’huile qui sert à la préparation de manière qu’elle ne s’épanche pas sur les étoffes au-delà des traits du dessin. Il assure que l’action de l’air, le frottement, l’humidité, ne peuvent sensiblement les altérer. Il nous a paru en effet qu’elles doivent résister autant que les couleurs réputées solides, leur composition ayant pour base l’huile et l’essence. Cependant, nous pensons que le temps seul déterminera jusqu’à quel point les étoffes de M. Vauchelet peuvent être comparées, pour la solidité des couleurs, aux belles et bonnes teintures de nos étoffes de soie pour meubles. M. Vauchelet ne s’est point borné au seul genre des modes et des ameublements ; il a copié des figures, des paysages, qu’il a exécutés sur des écrans, et dont il a fait de fort jolis tableaux. La Société pourra juger des bons effets qu’ils produisent par ceux qui sont maintenant sous ses yeux. Cet artiste peut exécuter dans un temps très court et à des prix modérés tous les sujets qui lui seraient demandés. Il peut aussi leur donner un grand degré de perfection, et porter très loin l’exactitude de l’imitation ; mais, dans ce cas, le prix de ses ouvrages serait plus élevé, et dès lors, l’art du peintre, qu’il n’a pas la prétention de remplacer, serait préférable. Il convient mieux par conséquent aux intérêts de M. Vauchelet de ne pas viser à la grande perfection, et de s’en tenir aux ameublements et aux tableaux de fantaisie. C’est, en effet, le genre d’ouvrages qu’il a adopté. Nous concluons à ce que le Conseil témoigne à cet artiste sa satisfaction sur les succès qu’il a obtenus, et que la connaissance de cette nouvelle production de l’industrie française soit répandue par l’insertion au Bulletin du présent rapport. » Le 13 septembre 1809, le fabricant soumet à la Société d'encouragement pour l'industrie nationale « un portrait d'Henri IV, afin qu'elle puisse juger de la solidité des couleurs qu'il emploie. » Le 7 février 1810, il prend un brevet d'invention de cinq ans « pour un procédé pour peindre sur velours de soie, applicable au velours de coton. On prend du papier lucidonique, que l'on étend sur un objet que l'on veut copier, et sur lequel on calque le dessin avec un poinçon ; on rougit l'envers de ce calque, dans toute son étendue, avec de la laque fine réduite en poudre ; on applique ce calque sur une feuille de parchemin bien lisse, et on décalque avec un poinçon chaque objet séparément, en employant autant de feuilles de parchemin qu'il y a d'objets et de couleurs différentes dans le dessin. On découpe ensuite à jour toutes les feuilles de parchemin, dans la forme du trait que lui a donné le décalcage ; toutes les découpures faites, on prend le morceau de velours que l'on veut peindre, on l'étend sur une table couverte d'un tapis vert ; on prend chaque planche de parchemin l'une après l'autre, on la pose sur le velours à l'endroit même où doit être la partie du dessin qu'elle représente ; on prend avec un pinceau de la couleur convenable à celle qui se trouve sur la même partie dans le dessin, et on l'applique sur la partie du velours que le parchemin laisse à découvert. On en fait autant pour chaque feuille de parchemin séparément, de cette manière on obtient le dessin tout entier. L'exécution de ce procédé demande beaucoup de soin et d'attention pour ne pas effacer le dessin, car il s'exécute de suite en entier, sans attendre que la partie que l'on vient de peindre soit sèche pour en commencer une autre ; on raccorde ensuite au pinceau, ou au moyen de nouvelles planches, les parties qui ne seraient pas bien venues. Préparation de l'huile dans ce genre de peinture : Je broie en poussière très fine 20 grains sel ammoniaque, 20 grains sel de prunelle. Je jette cette poussière dans une livre d'huile de lin la plus clarifiée possible, et je fais bouillir pendant trois heures. Une heure avant de retirer l'huile de dessus le feu, j'y mets un morceau de pain tendre, que j'ai eu soin de bien imbiber d'huile de vitriol, et trois gros oignons coupés en morceaux. Lorsque ce pain est presque calciné, et que les oignons sont fondus, je retire l'huile que je passe dans un torchon neuf ; je la mets en bouteilles, et je m'en sers pour broyer les couleurs au fur et à mesure que j'en ai besoin pour peindre, observant de l'employer avec ménagement, pour que les couleurs broyées ne soient pas coulantes sur la glace, mais en consistance de beurre. Ces huiles ne s'étendent pas sur le velours au-delà des traits du dessin. » Antoine Vauchelet, après le dépot de son brevet, s'associe à la société Delaneuville et Cie, établie 50, rue des Saints-Pères. Il y est directeur des travaux de la manufacture de velours peints. Le Garde-Meuble impérial s'intéresse rapidement aux perspectives offertes par le nouveau procédé. Les Rapport et observations du Mobilier de la Couronne du 12 9bre 1810 sur les ouvrages de peinture sur étoffes, conservés aux Archives nationales (AN. O2535), détaillent la technique élaborée par Vauchelet, concluent à son intérêt pour les arts industriels et soulignent qu'elle n'a rien de commun avec le procédé exploité par Gaspard Grégoire. Antoine Vauchelet reçoit une première commande d'un meuble en velours de soie, panneaux et couvertures de sièges peints à bouquets sur fond jaune destinés au salon du Seigneur au hameau du Petit Trianon. Ils sont exposés au public à l'été 1810, dans les salons de l'hôtel de Pons, rue des Saints-Pères. L'année suivante, les mêmes salons accueillent une autre exposition remarquable de la manufacture de velours peint. Il s'agit d'une commande, destinée au salon du roi de Rome au palais du Luxembourg, passée par le Sénat à Louis-Joseph Leroy, représentant de la société Delaneuville et Cie, et Antoine Vauchelet, pour commémorer la naissance du roi de Rome. Le compte rendu de l'exposition est publié dans le Journal des Arts, des Sciences et des Lettres : « Exposition d’une tenture en drap, et d’un meuble en velours, représentant les monuments de la ville de Rome et de ses environs. Dans le courant de l’été dernier, un meuble en velours de soie, magnifique produit de cette manufacture, fut exposé à la curiosité publique. Ce meuble était destiné pour le petit Trianon. On se souvient que les peintures réunissaient au plus haut degré la précision des contours, l’élégance des formes, la vivacité des couleurs, et qu’elles offraient à l’œil un certain moelleux impossible à définir, dû sans doute en partie à l’étoffe qui leur servait de fond. Aujourd’hui, le public est rappelé dans le même établissement pour une nouvelle exposition qui n’a pas moins d’intérêt que la précédente. Les amateurs s’y rendent en foule ; ils viennent admirer une tenture et un meuble représentant les monuments de Rome ancienne et moderne. Ce bel assortiment a été commandé par le Sénat, et doit décorer une des salles de son palais. La tenture est composée de huit pièces de haute-lisse : la place de l’église Saint-Pierre et le Vatican ; le pont et le château Saint-Ange ; le Colysée (sic) et l’Arc de Constantin ; le Ponte-Mole ; le Panthéon d’Agrippa ; la place du Peuple et le Capitole sont les sujets représentés, en grandes dimensions, dans ces tableaux peints sur laine. Cette galerie, d’un genre neuf, est ouverte, et comme inaugurée, par un tableau traité allégoriquement dans le grand style de l’histoire. Le sujet est un hommage au roi de Rome, dont la naissance a été à la fois l’occasion et l’objet de la commande du Sénat. Les canapés, les fauteuils et les chaises sont en velours de coton. Ces meubles présentent, tant sur leur siège que sur leur dossier, une suite de vues pittoresques prises dans l’intérieur de Rome même, ou dans les environs. L’exécution a été confiée à des artistes d’un mérite reconnu. Les édifices, les ruines, les ciels, les eaux, les riches et nombreux paysages, les figures d’hommes et d’animaux, ne laissent rien à désirer. Un parfait accord règne dans l’ensemble, et les détails, remarquables par un faire expéditif et une grande facilité de pinceau, portent l’empreinte du talent dirigé par le goût. Mais ce qui donne un prix infini à tout ce travail, c’est son inaltérabilité, garantie par l’application du procédé de M. Vauchelet. Cette découverte doit faire époque dans les annales de l’industrie française. Elle consiste dans la préparation des couleurs ; celles que M. Vauchelet emploie ont tout l’éclat des plus brillantes teintures ; elles ont de plus une telle fixité qu’elles sont à l’épreuve du blanchissage et qu’elles paraissent résister à l’action destructive du soleil. On chercherait vainement ailleurs cette solidité, même dans les tapisseries les plus précieuses et les tissus les mieux soignés. En ce point, les nouveaux produits l’emportent incontestablement sur tout ce qu’on connaît dans les arts. Sous le rapport du dessin et du coloris, ils soutiennent la concurrence avec les plus beaux résultats des métiers de haute et basse lisse, puisqu’ils ne sont point une imitation de la peinture, mais la peinture même. Il serait presque dérisoire de les rapprocher de la broderie, quelque parfaite qu’on la suppose ; l’aiguille et le crochet restent trop au-dessous du pinceau, relativement aux nuances, pour que ce genre de travail puisse donner lieu à une comparaison. Comme le procédé de M. Vauchelet s’applique à toutes les espèces de tissus en laine, soie ou coton, et que le prix des nouveaux produits ne varie qu’à raison de la valeur intrinsèque de l’étoffe, ces produits sont à la portée de toutes les fortunes, et on pourra désormais se procurer un meuble très solide et d’un excellent goût, à moins de frais qu’un meuble ordinaire. Une étonnante célérité dans la main d’œuvre, la facilité d’exécuter tous les sujets proposés, et de reproduire même les chefs-d’œuvre de la peinture, la multiplicité des applications, qui en effet s’étendent à toutes sortes d’objets, sont encore, aux yeux des amateurs, autant de titres qui recommandent la manufacture de la rue des Saints-Pères. Parmi les objets exposés, il en est plusieurs qu’il serait très agréable d’offrir en cadeau d’étrennes, et sur lesquels il convient, pour cette raison, d’appeler l’attention des curieux aux approches du jour de l’an. En récapitulant tous ces avantages, on voit dans la découverte de M. Vauchelet le principe d’une industrie très importante, qui doit devenir pour son inventeur une source de gloire et de richesse, pour le commerce une nouvelle branche de spéculation, et pour l’état un nouveau moyen de prospérité. » Caroline Murat, reine de Naples, commande alors un ameublement analogue avec des vues de Paris pour son palais de Capodimonte. Dès 1810, Jean-François Bony, célèbre dessinateur de fabrique et brodeur lyonnais, semble lui aussi s'être intéressé au procédé d'Antoine Vauchelet, comme en témoigne une laize de satin décorée en broderies d'application et en broderie de soie et de chenille conservée au musée des Tissus, peut-être commandée pour l'impératrice douairière (inv. MT 2832), peut-être le seul exemple de la collaboration des deux fabricants. Le dessus de ployant du musée des Tissus a sans doute été réalisé peu de temps après le dépôt du brevet d'Antoine Vauchelet, et avant la chute de l'Empire. Son iconographie est, en effet, caractéristique des années 1810. Elle présente deux Amours qui, s'éloignant vers les petits côtés du panneau en se tournant le dos, portent sur l'épaule les extrémités d'une lourde guirlande de fleurs où l'on reconnaît des roses et des zinnias, fleurs exotiques originaires du Mexique. Un papillon du type vanesse occupe le centre de la composition. En partie inférieure, une bordure comprend un médaillon central, rectangulaire, occupé par une rosette, et des culots d'acanthe qui donnent naissance à des tiges fleuries. Les roses sont similaires aux fleurs qui apparaissent dans les couronnes qui ornent des écrans produits par Antoine Vauchelet et déposés par le Mobilier national au musée des Tissus de Lyon (inv. GMMP 767, GMMP 768, GMMP 769 et GMMP 770), et les zinnias à ceux qui rehaussent les guirlandes des tentures commandées pour le salon du roi de Rome au palais du Luxembourg. La vanesse apparaît, par exemple, sur l'étoffe pour sièges commandée à Lacostat et Trollier, à Lyon, pour le deuxième salon des Grands Appartements du Palais de Meudon en 1808, en gros de Tours blanc broché soie nuée, livrée en 1810 (Paris, Mobilier national, inv. GMMP 883), ou sur les sièges commandés à la Manufacture de Beauvais pour le premier salon de l'Empereur au Palais des Tuileries en 1808, exécutés d'après un dessin d'Auguste Générelly, livrés en 1810 (Paris, Mobilier national, inv. GMMP 447). Le 11 mai 1814, Antoine Vauchelet présente à nouveau les produits de sa fabrique au Conseil d'administration de la Société d'encouragement pour l'industrie nationale. « M. Antoine Vauchelet, breveté, demeurant rue des Saints-Pères, n° 50, avait exposé de superbes velours peints de sa fabrique, représentant des paysages, des animaux, des figures, etc., applicables à l’ameublement, et qui sont très recherchés, à raison de leur solidité et de leur bas prix. Ils offrent le moyen de pouvoir improviser, pour ainsi dire, les sujets les plus agréables, qui ont presque tout le charme de la peinture, sans qu’on soit sujet à la lenteur de ses opérations. On remarquait entre autres des draperies en velours cramoisi avec des ornements imitant des broderies d’or, qui produisent un effet très riche. Le même artiste a fait hommage à la société d’un portrait de sa majesté l’empereur Alexandre, peint sur velours de soie d’après ses procédés. Ce portrait, exécuté en manière de camée sur un fond couleur d’or, étonne par son fini, surtout quand on songe aux difficultés que présente l’application des couleurs sur une étoffe aussi mobile que le velours. » Dans la séance du 12 avril 1815 de la même instance, il renouvelle l'opération : « on a remarqué avec intérêt un portrait en buste de S. M. l’Empereur, dont M. Vauchelet a fait hommage à la Société. C’est une copie de la gravure de Morghen ; ce genre de peinture est peut-être ce qu’il y a de plus difficile à exécuter sur velours, attendu la multiplicité des détails. M. Vauchelet s’occupe d’un portrait semblable, grand comme nature, qu’il placera dans le local de la Société. » Le portrait de Napoléon Ier d'après la gravure de Raffaello Morghen a été soumis durant les Cent-Jours. Il est probable que la chute de l'Empereur et l'avènement de la Restauration n'ont pas permis l'exécution du portrait en pied imaginé par Antoine Vauchelet. À cette date, le brevet de l'inventeur arrive à terme. C'est la raison pour laquelle, sans doute, il présente des réalisations exceptionnelles à la Société d'encouragement pour l'industrie nationale. Vauchelet conserve, de fait, l'exclusivité de son procédé jusqu'à sa mort en 1819, puisque son brevet ne sera pas publié avant 1823. Son fils et sa fille poursuivent l'activité de leur père. Ils sont établis au 19, rue Charlot, et leur production est présentée à la Société d'encouragement pour l'industrie nationale en 1821. On reconnaît alors que leurs étoffes « soutiennent, par l'éclat des couleurs et par leur soigneuse exécution, la réputation que s'était acquise dans ce genre M. Vauchelet père, breveté d'invention. » Ils sont également présents parmi les participants à l'Exposition des produits de l'industrie française de 1824 : « M. et Mlle Vauchelet, à Paris, rue Charlot, n° 19, ont exposé un tableau de fleurs peint sur velours, dont l’effet est agréable et les couleurs bien mariées. Feu M. Vauchelet, leur père, est le premier qui ait employé le velours peint en étoffes pour meubles et comme objet de décoration. La solidité des couleurs dont il se servait est constatée par l’état de conservation où se trouvent encore quelques-uns des produits sortis de sa fabrique depuis quinze à seize ans. Le jury a décerné une médaille d’argent à M. et Mlle Vauchelet. » Le procédé inventé par Antoine Vauchelet fait l'objet d'une polémique en 1826, animée par Claude Pajot-Descharmes, qui dénonce l'exclusivité détenue par le fabricant au-delà de l'expiration de son brevet d'invention dans une Notice sur la peinture sur velours de coton publiée dans le vingt-troisième tome des Annales de l'industrie nationale et étrangère ou Mercure technologique : « Tout le monde connaît la beauté des peintures sur velours pour meubles, par M. Vauchelet ; l’admiration qu’excitent ces produits a fait désirer que les procédés relatifs à cette nouvelle industrie rentrassent dans le domaine public, aussitôt après l’expiration du brevet de leurs auteurs. Le fait suivant va démontrer que, quoique ce brevet expiré depuis 1815 ait été publié en 1823, M. Vauchelet ne continue pas moins d’être privilégié exclusif. Une personne de ma connaissance qui désirait faire usage du procédé pour peindre sur velours, dont M. Vauchelet passe pour inventeur, procédé qui a été breveté pour cinq ans à dater de 1810, et qui se trouve inséré dans le tome V des brevets publiés en 1823. Cette personne, dis-je, après avoir fait en vain l’essai de ce procédé, vint me faire part de son désappointement en m’assurant l’avoir suivi de point en point d’après la description donnée par son auteur. Elle me pria de répéter en sa présence l’essai du même procédé, afin de reconnaître en quoi elle aurait pu se tromper : je m’empressai de répondre à ses instances ; mais quelle fut ma surprise, quand après avoir exécuté très exactement le procédé dont il s’agit, je reconnus qu’en effet il était non seulement impraticable pour l’objet indiqué par M. Vauchelet, mais encore que son emploi serait infiniment préjudiciable, quand même l’un des deux vices dont il est attaché n’existerait pas. Ces vices sont : 1 – dans la préparation de l’huile qui, par l’action des ingrédients désignés, est rendue absolument noire ; 2 – dans son coulage sur l’étoffe, et le transpercement de celle-ci. Frappé de ces résultats que j’avais soupçonnés en partie, à la simple lecture de la description du brevet, je n’hésitais pas à croire que, pour perpétuer sa jouissance, l’inventeur avait substitué tout autre procédé véritable, et que, par ce moyen, il ne pouvait avoir aucune crainte sur la non conservation de sa propriété. Après que j’ai eu cette conviction, je conseillai à la personne le procédé suivant : 1 – d’étendre avec un pinceau sur son velours, tant à son envers qu’à son endroit, une couche de dissolution de gomme adragante la plus blanche possible ; 2 – d’amalgamer ses couleurs avec de l’huile de lin épurée et clarifiée. L’expérience en ayant été faite de suite, il fut reconnu que non seulement les couleurs vives et délicates conservaient leur nuance, mais encore que l’huile ne s’étendait pas au-delà des couleurs appliquées, et ne transperçait pas l’étoffe. De cette épreuve, il résulterait : 1 – que ce nouveau procédé remplacerait avantageusement celui de M. Vauchelet ; 2 – que celui que cet auteur a décrit ne saurait être appliqué à l’emploi qu’il a indiqué, emploi qui serait d’ailleurs très dommageable à la personne qui en ferait usage ; 3 – que le gouvernement et le public ont été induits en erreur par suite de leur confiance dans les pétitionnaires qui sont intéressés, dans le cas de discussions judiciaires, à ne rien déguiser sur leurs procédés, sous peine de déchéance. Cette réticence ou suppression dont je viens de faire voir toute la nocuité, me suggère la réflexion suivante, savoir que pour obvier désormais à un pareil inconvénient, peut-être conviendrait-il que, préalablement à la délivrance du brevet sollicité, il fût procédé par une commission expresse, et aux frais du pétitionnaire, non seulement à la vérification de l’intelligence de la description de ses procédés, mais encore à celle de leur composition lorsqu’il s’agirait de compositions chimiques, l’une et l’autre vérification constatées par certificats qui ne porteraient nullement (aux termes de la loi) sur le mérite de l’invention. Au moyen de ces dispositions, il me semble que ni le gouvernement, ni le public, ne courraient plus le risque d’être trompés, le premier en accordant un privilège indéfini, en quelque sorte, quoique limité par le brevet délivré, pour un objet déguisé par celui que l’auteur aurait décrit dans sa demande de brevet, et le second, en voulant mettre à profit des procédés qu’il croit exacts, et qui tout au contraire l’exposent à des pertes diverses plus ou moins considérables. Le long intervalle qui s’est écoulé entre l’expiration du brevet de M. Vauchelet et sa publication a donné lieu à cette autre réflexion : c’est que cet intervalle qui, à l’égard de M. Vauchelet, a été d’environ huit ans, a plus que doublé la durée de son privilège qui ne lui était accordé que pour cinq ans, il résulte donc d’un retard aussi prolongé dans la publication des brevets, 1 – le grand désavantage de priver le domaine public des diverses inventions plus ou moins utiles, dont l’industrie pourrait profiter ; 2 – que le breveté continue indûment de jouir de son privilège. Pour éviter ce double inconvénient, il me semble qu’il y aurait un moyen bien simple : ce serait de faire connaître au public, par la voie de l’impression, l’expiration des brevets, au fur et à mesure qu’elle aurait lieu, et ce dans le mois qui la suivrait, en annonçant en outre que chacun pourrait venir les consulter soit à Paris, au bureau du Directeur du Conservatoire des Arts et Métiers, soit dans les chefs-lieux des départements, au bureau des Archives de la préfecture, où ils sont déposés. Le Directeur du Conservatoire des Arts et Métiers serait en conséquent tenu de dresser chaque mois la liste des brevets expirés le mois précédent, liste que Son Exc. Le ministre de l’Intérieur pourrait adresser à chacun de messieurs les préfets. Ces magistrats ordonneraient de suite l’insertion dans le mémorial ou journal de la préfecture. Il paraît évident que par suite de ces diverses mesures les inconvénients qui viennent d’être signalés et qui vraisemblablement sont plus communs qu’on ne le pense n’existeraient plus. » Pourtant, la technique de Vauchelet est encore mentionnée dans les précis techniques jusqu'à l'aube des années 1840. Elle tombe ensuite dans l'oubli, avec son inventeur, dont le ployant du musée des Tissus est une des rares productions conservée dans les collections publiques. Maximilien Durand (fr)
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  • La composition en panneau du décor et son iconographie invitent à reconnaître dans cette œuvre un dessus de ployant, avec garniture du devant de l'assise, ce que semble confirmer l'existence d'un exemplaire parfaitement identique à Paris, dans les collections du musée de la Mode et du Textile, aux Arts décoratifs (inv. 18741), indiquant qu'il s'agissait d'une garniture pour une suite de sièges. Le dessin est tissé en écru, comme le fond satin du dessus de ployant. Il est formé par des plages de velours coupé, cernées de velours frisé, puis il a été peint après tissage. Cette particularité technique, appliquée à un textile d'ameublement, invite à y reconnaître une production d'Antoine Vauchelet, qui avait l'exclusivité de cette technique dont il était l'inventeur dans les dernières années de l'Empire. Né en 1762, Antoine Vauchelet, d'abord établi 28, rue Neuve-Saint-Nicolas, à Paris, élabore vers 1808 une technique qui lui permet de peindre sur velours de soie, de laine ou de coton. Il soumet son procédé à la Société d'encouragement pour l'industrie nationale. Les rapporteurs désignés sont Bardel, au nom d'une Commission spéciale, et Mérimée, et leur rapport est présenté au Conseil d'administration de la Société le 4 janvier 1809 et publié dans le Bulletin de la même année : « Vous nous avez chargés, M. Mérimée et moi, de vous rendre compte d’un nouveau genre de peinture sur étoffe, présenté par M. Vauchelet ; voici notre rapport à ce sujet. M. Vauchelet est parvenu à fixer sur toutes sortes d’étoffes ces couleurs solides, au moyen desquelles il forme différents dessins agréables, plus ou moins corrects, en raison des soins qu’il peut donner à leur exécution. Il y a longtemps qu’on s’est occupé de peindre et d’appliquer des couleurs sur les étoffes, soit au pinceau, soit à la planche d’impression, soit à l’aide de vignettes en cuivre découpées. Ces différents moyens ont eu et ont encore chacun leur mérite suivant les circonstances, c’est-à-dire suivant que la mode ou le bas prix en ont déterminé l’usage : car le genre d’étoffe dont il s’agit a été jusqu’ici employé pour les ajustements de mode qu’il n’a eu une destination fixe et stable, à cause du peu de solidité des couleurs qu’on y appliquait, celles à l’eau perdant bientôt leur éclat, et celles à l’huile ayant d’autres inconvénients. M. Vauchelet semble avoir vaincu toutes ces difficultés. Ses couleurs sont vives, et paraissent avoir toute la solidité désirable. Il peut les employer avec avantage sur des étoffes de laine, de coton ou de soie ; mais elles ne ressortent bien que sur le velours. Il a trouvé le moyen de fixer l’huile qui sert à la préparation de manière qu’elle ne s’épanche pas sur les étoffes au-delà des traits du dessin. Il assure que l’action de l’air, le frottement, l’humidité, ne peuvent sensiblement les altérer. Il nous a paru en effet qu’elles doivent résister autant que les couleurs réputées solides, leur composition ayant pour base l’huile et l’essence. Cependant, nous pensons que le temps seul déterminera jusqu’à quel point les étoffes de M. Vauchelet peuvent être comparées, pour la solidité des couleurs, aux belles et bonnes teintures de nos étoffes de soie pour meubles. M. Vauchelet ne s’est point borné au seul genre des modes et des ameublements ; il a copié des figures, des paysages, qu’il a exécutés sur des écrans, et dont il a fait de fort jolis tableaux. La Société pourra juger des bons effets qu’ils produisent par ceux qui sont maintenant sous ses yeux. Cet artiste peut exécuter dans un temps très court et à des prix modérés tous les sujets qui lui seraient demandés. Il peut aussi leur donner un grand degré de perfection, et porter très loin l’exactitude de l’imitation ; mais, dans ce cas, le prix de ses ouvrages serait plus élevé, et dès lors, l’art du peintre, qu’il n’a pas la prétention de remplacer, serait préférable. Il convient mieux par conséquent aux intérêts de M. Vauchelet de ne pas viser à la grande perfection, et de s’en tenir aux ameublements et aux tableaux de fantaisie. C’est, en effet, le genre d’ouvrages qu’il a adopté. Nous concluons à ce que le Conseil témoigne à cet artiste sa satisfaction sur les succès qu’il a obtenus, et que la connaissance de cette nouvelle production de l’industrie française soit répandue par l’insertion au Bulletin du présent rapport. » Le 13 septembre 1809, le fabricant soumet à la Société d'encouragement pour l'industrie nationale « un portrait d'Henri IV, afin qu'elle puisse juger de la solidité des couleurs qu'il emploie. » Le 7 février 1810, il prend un brevet d'invention de cinq ans « pour un procédé pour peindre sur velours de soie, applicable au velours de coton. On prend du papier lucidonique, que l'on étend sur un objet que l'on veut copier, et sur lequel on calque le dessin avec un poinçon ; on rougit l'envers de ce calque, dans toute son étendue, avec de la laque fine réduite en poudre ; on applique ce calque sur une feuille de parchemin bien lisse, et on décalque avec un poinçon chaque objet séparément, en employant autant de feuilles de parchemin qu'il y a d'objets et de couleurs différentes dans le dessin. On découpe ensuite à jour toutes les feuilles de parchemin, dans la forme du trait que lui a donné le décalcage ; toutes les découpures faites, on prend le morceau de velours que l'on veut peindre, on l'étend sur une table couverte d'un tapis vert ; on prend chaque planche de parchemin l'une après l'autre, on la pose sur le velours à l'endroit même où doit être la partie du dessin qu'elle représente ; on prend avec un pinceau de la couleur convenable à celle qui se trouve sur la même partie dans le dessin, et on l'applique sur la partie du velours que le parchemin laisse à découvert. On en fait autant pour chaque feuille de parchemin séparément, de cette manière on obtient le dessin tout entier. L'exécution de ce procédé demande beaucoup de soin et d'attention pour ne pas effacer le dessin, car il s'exécute de suite en entier, sans attendre que la partie que l'on vient de peindre soit sèche pour en commencer une autre ; on raccorde ensuite au pinceau, ou au moyen de nouvelles planches, les parties qui ne seraient pas bien venues. Préparation de l'huile dans ce genre de peinture : Je broie en poussière très fine 20 grains sel ammoniaque, 20 grains sel de prunelle. Je jette cette poussière dans une livre d'huile de lin la plus clarifiée possible, et je fais bouillir pendant trois heures. Une heure avant de retirer l'huile de dessus le feu, j'y mets un morceau de pain tendre, que j'ai eu soin de bien imbiber d'huile de vitriol, et trois gros oignons coupés en morceaux. Lorsque ce pain est presque calciné, et que les oignons sont fondus, je retire l'huile que je passe dans un torchon neuf ; je la mets en bouteilles, et je m'en sers pour broyer les couleurs au fur et à mesure que j'en ai besoin pour peindre, observant de l'employer avec ménagement, pour que les couleurs broyées ne soient pas coulantes sur la glace, mais en consistance de beurre. Ces huiles ne s'étendent pas sur le velours au-delà des traits du dessin. » Antoine Vauchelet, après le dépot de son brevet, s'associe à la société Delaneuville et Cie, établie 50, rue des Saints-Pères. Il y est directeur des travaux de la manufacture de velours peints. Le Garde-Meuble impérial s'intéresse rapidement aux perspectives offertes par le nouveau procédé. Les Rapport et observations du Mobilier de la Couronne du 12 9bre 1810 sur les ouvrages de peinture sur étoffes, conservés aux Archives nationales (AN. O2535), détaillent la technique élaborée par Vauchelet, concluent à son intérêt pour les arts industriels et soulignent qu'elle n'a rien de commun avec le procédé exploité par Gaspard Grégoire. Antoine Vauchelet reçoit une première commande d'un meuble en velours de soie, panneaux et couvertures de sièges peints à bouquets sur fond jaune destinés au salon du Seigneur au hameau du Petit Trianon. Ils sont exposés au public à l'été 1810, dans les salons de l'hôtel de Pons, rue des Saints-Pères. L'année suivante, les mêmes salons accueillent une autre exposition remarquable de la manufacture de velours peint. Il s'agit d'une commande, destinée au salon du roi de Rome au palais du Luxembourg, passée par le Sénat à Louis-Joseph Leroy, représentant de la société Delaneuville et Cie, et Antoine Vauchelet, pour commémorer la naissance du roi de Rome. Le compte rendu de l'exposition est publié dans le Journal des Arts, des Sciences et des Lettres : « Exposition d’une tenture en drap, et d’un meuble en velours, représentant les monuments de la ville de Rome et de ses environs. Dans le courant de l’été dernier, un meuble en velours de soie, magnifique produit de cette manufacture, fut exposé à la curiosité publique. Ce meuble était destiné pour le petit Trianon. On se souvient que les peintures réunissaient au plus haut degré la précision des contours, l’élégance des formes, la vivacité des couleurs, et qu’elles offraient à l’œil un certain moelleux impossible à définir, dû sans doute en partie à l’étoffe qui leur servait de fond. Aujourd’hui, le public est rappelé dans le même établissement pour une nouvelle exposition qui n’a pas moins d’intérêt que la précédente. Les amateurs s’y rendent en foule ; ils viennent admirer une tenture et un meuble représentant les monuments de Rome ancienne et moderne. Ce bel assortiment a été commandé par le Sénat, et doit décorer une des salles de son palais. La tenture est composée de huit pièces de haute-lisse : la place de l’église Saint-Pierre et le Vatican ; le pont et le château Saint-Ange ; le Colysée (sic) et l’Arc de Constantin ; le Ponte-Mole ; le Panthéon d’Agrippa ; la place du Peuple et le Capitole sont les sujets représentés, en grandes dimensions, dans ces tableaux peints sur laine. Cette galerie, d’un genre neuf, est ouverte, et comme inaugurée, par un tableau traité allégoriquement dans le grand style de l’histoire. Le sujet est un hommage au roi de Rome, dont la naissance a été à la fois l’occasion et l’objet de la commande du Sénat. Les canapés, les fauteuils et les chaises sont en velours de coton. Ces meubles présentent, tant sur leur siège que sur leur dossier, une suite de vues pittoresques prises dans l’intérieur de Rome même, ou dans les environs. L’exécution a été confiée à des artistes d’un mérite reconnu. Les édifices, les ruines, les ciels, les eaux, les riches et nombreux paysages, les figures d’hommes et d’animaux, ne laissent rien à désirer. Un parfait accord règne dans l’ensemble, et les détails, remarquables par un faire expéditif et une grande facilité de pinceau, portent l’empreinte du talent dirigé par le goût. Mais ce qui donne un prix infini à tout ce travail, c’est son inaltérabilité, garantie par l’application du procédé de M. Vauchelet. Cette découverte doit faire époque dans les annales de l’industrie française. Elle consiste dans la préparation des couleurs ; celles que M. Vauchelet emploie ont tout l’éclat des plus brillantes teintures ; elles ont de plus une telle fixité qu’elles sont à l’épreuve du blanchissage et qu’elles paraissent résister à l’action destructive du soleil. On chercherait vainement ailleurs cette solidité, même dans les tapisseries les plus précieuses et les tissus les mieux soignés. En ce point, les nouveaux produits l’emportent incontestablement sur tout ce qu’on connaît dans les arts. Sous le rapport du dessin et du coloris, ils soutiennent la concurrence avec les plus beaux résultats des métiers de haute et basse lisse, puisqu’ils ne sont point une imitation de la peinture, mais la peinture même. Il serait presque dérisoire de les rapprocher de la broderie, quelque parfaite qu’on la suppose ; l’aiguille et le crochet restent trop au-dessous du pinceau, relativement aux nuances, pour que ce genre de travail puisse donner lieu à une comparaison. Comme le procédé de M. Vauchelet s’applique à toutes les espèces de tissus en laine, soie ou coton, et que le prix des nouveaux produits ne varie qu’à raison de la valeur intrinsèque de l’étoffe, ces produits sont à la portée de toutes les fortunes, et on pourra désormais se procurer un meuble très solide et d’un excellent goût, à moins de frais qu’un meuble ordinaire. Une étonnante célérité dans la main d’œuvre, la facilité d’exécuter tous les sujets proposés, et de reproduire même les chefs-d’œuvre de la peinture, la multiplicité des applications, qui en effet s’étendent à toutes sortes d’objets, sont encore, aux yeux des amateurs, autant de titres qui recommandent la manufacture de la rue des Saints-Pères. Parmi les objets exposés, il en est plusieurs qu’il serait très agréable d’offrir en cadeau d’étrennes, et sur lesquels il convient, pour cette raison, d’appeler l’attention des curieux aux approches du jour de l’an. En récapitulant tous ces avantages, on voit dans la découverte de M. Vauchelet le principe d’une industrie très importante, qui doit devenir pour son inventeur une source de gloire et de richesse, pour le commerce une nouvelle branche de spéculation, et pour l’état un nouveau moyen de prospérité. » Caroline Murat, reine de Naples, commande alors un ameublement analogue avec des vues de Paris pour son palais de Capodimonte. Dès 1810, Jean-François Bony, célèbre dessinateur de fabrique et brodeur lyonnais, semble lui aussi s'être intéressé au procédé d'Antoine Vauchelet, comme en témoigne une laize de satin décorée en broderies d'application et en broderie de soie et de chenille conservée au musée des Tissus, peut-être commandée pour l'impératrice douairière (inv. MT 2832), peut-être le seul exemple de la collaboration des deux fabricants. Le dessus de ployant du musée des Tissus a sans doute été réalisé peu de temps après le dépôt du brevet d'Antoine Vauchelet, et avant la chute de l'Empire. Son iconographie est, en effet, caractéristique des années 1810. Elle présente deux Amours qui, s'éloignant vers les petits côtés du panneau en se tournant le dos, portent sur l'épaule les extrémités d'une lourde guirlande de fleurs où l'on reconnaît des roses et des zinnias, fleurs exotiques originaires du Mexique. Un papillon du type vanesse occupe le centre de la composition. En partie inférieure, une bordure comprend un médaillon central, rectangulaire, occupé par une rosette, et des culots d'acanthe qui donnent naissance à des tiges fleuries. Les roses sont similaires aux fleurs qui apparaissent dans les couronnes qui ornent des écrans produits par Antoine Vauchelet et déposés par le Mobilier national au musée des Tissus de Lyon (inv. GMMP 767, GMMP 768, GMMP 769 et GMMP 770), et les zinnias à ceux qui rehaussent les guirlandes des tentures commandées pour le salon du roi de Rome au palais du Luxembourg. La vanesse apparaît, par exemple, sur l'étoffe pour sièges commandée à Lacostat et Trollier, à Lyon, pour le deuxième salon des Grands Appartements du Palais de Meudon en 1808, en gros de Tours blanc broché soie nuée, livrée en 1810 (Paris, Mobilier national, inv. GMMP 883), ou sur les sièges commandés à la Manufacture de Beauvais pour le premier salon de l'Empereur au Palais des Tuileries en 1808, exécutés d'après un dessin d'Auguste Générelly, livrés en 1810 (Paris, Mobilier national, inv. GMMP 447). Le 11 mai 1814, Antoine Vauchelet présente à nouveau les produits de sa fabrique au Conseil d'administration de la Société d'encouragement pour l'industrie nationale. « M. Antoine Vauchelet, breveté, demeurant rue des Saints-Pères, n° 50, avait exposé de superbes velours peints de sa fabrique, représentant des paysages, des animaux, des figures, etc., applicables à l’ameublement, et qui sont très recherchés, à raison de leur solidité et de leur bas prix. Ils offrent le moyen de pouvoir improviser, pour ainsi dire, les sujets les plus agréables, qui ont presque tout le charme de la peinture, sans qu’on soit sujet à la lenteur de ses opérations. On remarquait entre autres des draperies en velours cramoisi avec des ornements imitant des broderies d’or, qui produisent un effet très riche. Le même artiste a fait hommage à la société d’un portrait de sa majesté l’empereur Alexandre, peint sur velours de soie d’après ses procédés. Ce portrait, exécuté en manière de camée sur un fond couleur d’or, étonne par son fini, surtout quand on songe aux difficultés que présente l’application des couleurs sur une étoffe aussi mobile que le velours. » Dans la séance du 12 avril 1815 de la même instance, il renouvelle l'opération : « on a remarqué avec intérêt un portrait en buste de S. M. l’Empereur, dont M. Vauchelet a fait hommage à la Société. C’est une copie de la gravure de Morghen ; ce genre de peinture est peut-être ce qu’il y a de plus difficile à exécuter sur velours, attendu la multiplicité des détails. M. Vauchelet s’occupe d’un portrait semblable, grand comme nature, qu’il placera dans le local de la Société. » Le portrait de Napoléon Ier d'après la gravure de Raffaello Morghen a été soumis durant les Cent-Jours. Il est probable que la chute de l'Empereur et l'avènement de la Restauration n'ont pas permis l'exécution du portrait en pied imaginé par Antoine Vauchelet. À cette date, le brevet de l'inventeur arrive à terme. C'est la raison pour laquelle, sans doute, il présente des réalisations exceptionnelles à la Société d'encouragement pour l'industrie nationale. Vauchelet conserve, de fait, l'exclusivité de son procédé jusqu'à sa mort en 1819, puisque son brevet ne sera pas publié avant 1823. Son fils et sa fille poursuivent l'activité de leur père. Ils sont établis au 19, rue Charlot, et leur production est présentée à la Société d'encouragement pour l'industrie nationale en 1821. On reconnaît alors que leurs étoffes « soutiennent, par l'éclat des couleurs et par leur soigneuse exécution, la réputation que s'était acquise dans ce genre M. Vauchelet père, breveté d'invention. » Ils sont également présents parmi les participants à l'Exposition des produits de l'industrie française de 1824 : « M. et Mlle Vauchelet, à Paris, rue Charlot, n° 19, ont exposé un tableau de fleurs peint sur velours, dont l’effet est agréable et les couleurs bien mariées. Feu M. Vauchelet, leur père, est le premier qui ait employé le velours peint en étoffes pour meubles et comme objet de décoration. La solidité des couleurs dont il se servait est constatée par l’état de conservation où se trouvent encore quelques-uns des produits sortis de sa fabrique depuis quinze à seize ans. Le jury a décerné une médaille d’argent à M. et Mlle Vauchelet. » Le procédé inventé par Antoine Vauchelet fait l'objet d'une polémique en 1826, animée par Claude Pajot-Descharmes, qui dénonce l'exclusivité détenue par le fabricant au-delà de l'expiration de son brevet d'invention dans une Notice sur la peinture sur velours de coton publiée dans le vingt-troisième tome des Annales de l'industrie nationale et étrangère ou Mercure technologique : « Tout le monde connaît la beauté des peintures sur velours pour meubles, par M. Vauchelet ; l’admiration qu’excitent ces produits a fait désirer que les procédés relatifs à cette nouvelle industrie rentrassent dans le domaine public, aussitôt après l’expiration du brevet de leurs auteurs. Le fait suivant va démontrer que, quoique ce brevet expiré depuis 1815 ait été publié en 1823, M. Vauchelet ne continue pas moins d’être privilégié exclusif. Une personne de ma connaissance qui désirait faire usage du procédé pour peindre sur velours, dont M. Vauchelet passe pour inventeur, procédé qui a été breveté pour cinq ans à dater de 1810, et qui se trouve inséré dans le tome V des brevets publiés en 1823. Cette personne, dis-je, après avoir fait en vain l’essai de ce procédé, vint me faire part de son désappointement en m’assurant l’avoir suivi de point en point d’après la description donnée par son auteur. Elle me pria de répéter en sa présence l’essai du même procédé, afin de reconnaître en quoi elle aurait pu se tromper : je m’empressai de répondre à ses instances ; mais quelle fut ma surprise, quand après avoir exécuté très exactement le procédé dont il s’agit, je reconnus qu’en effet il était non seulement impraticable pour l’objet indiqué par M. Vauchelet, mais encore que son emploi serait infiniment préjudiciable, quand même l’un des deux vices dont il est attaché n’existerait pas. Ces vices sont : 1 – dans la préparation de l’huile qui, par l’action des ingrédients désignés, est rendue absolument noire ; 2 – dans son coulage sur l’étoffe, et le transpercement de celle-ci. Frappé de ces résultats que j’avais soupçonnés en partie, à la simple lecture de la description du brevet, je n’hésitais pas à croire que, pour perpétuer sa jouissance, l’inventeur avait substitué tout autre procédé véritable, et que, par ce moyen, il ne pouvait avoir aucune crainte sur la non conservation de sa propriété. Après que j’ai eu cette conviction, je conseillai à la personne le procédé suivant : 1 – d’étendre avec un pinceau sur son velours, tant à son envers qu’à son endroit, une couche de dissolution de gomme adragante la plus blanche possible ; 2 – d’amalgamer ses couleurs avec de l’huile de lin épurée et clarifiée. L’expérience en ayant été faite de suite, il fut reconnu que non seulement les couleurs vives et délicates conservaient leur nuance, mais encore que l’huile ne s’étendait pas au-delà des couleurs appliquées, et ne transperçait pas l’étoffe. De cette épreuve, il résulterait : 1 – que ce nouveau procédé remplacerait avantageusement celui de M. Vauchelet ; 2 – que celui que cet auteur a décrit ne saurait être appliqué à l’emploi qu’il a indiqué, emploi qui serait d’ailleurs très dommageable à la personne qui en ferait usage ; 3 – que le gouvernement et le public ont été induits en erreur par suite de leur confiance dans les pétitionnaires qui sont intéressés, dans le cas de discussions judiciaires, à ne rien déguiser sur leurs procédés, sous peine de déchéance. Cette réticence ou suppression dont je viens de faire voir toute la nocuité, me suggère la réflexion suivante, savoir que pour obvier désormais à un pareil inconvénient, peut-être conviendrait-il que, préalablement à la délivrance du brevet sollicité, il fût procédé par une commission expresse, et aux frais du pétitionnaire, non seulement à la vérification de l’intelligence de la description de ses procédés, mais encore à celle de leur composition lorsqu’il s’agirait de compositions chimiques, l’une et l’autre vérification constatées par certificats qui ne porteraient nullement (aux termes de la loi) sur le mérite de l’invention. Au moyen de ces dispositions, il me semble que ni le gouvernement, ni le public, ne courraient plus le risque d’être trompés, le premier en accordant un privilège indéfini, en quelque sorte, quoique limité par le brevet délivré, pour un objet déguisé par celui que l’auteur aurait décrit dans sa demande de brevet, et le second, en voulant mettre à profit des procédés qu’il croit exacts, et qui tout au contraire l’exposent à des pertes diverses plus ou moins considérables. Le long intervalle qui s’est écoulé entre l’expiration du brevet de M. Vauchelet et sa publication a donné lieu à cette autre réflexion : c’est que cet intervalle qui, à l’égard de M. Vauchelet, a été d’environ huit ans, a plus que doublé la durée de son privilège qui ne lui était accordé que pour cinq ans, il résulte donc d’un retard aussi prolongé dans la publication des brevets, 1 – le grand désavantage de priver le domaine public des diverses inventions plus ou moins utiles, dont l’industrie pourrait profiter ; 2 – que le breveté continue indûment de jouir de son privilège. Pour éviter ce double inconvénient, il me semble qu’il y aurait un moyen bien simple : ce serait de faire connaître au public, par la voie de l’impression, l’expiration des brevets, au fur et à mesure qu’elle aurait lieu, et ce dans le mois qui la suivrait, en annonçant en outre que chacun pourrait venir les consulter soit à Paris, au bureau du Directeur du Conservatoire des Arts et Métiers, soit dans les chefs-lieux des départements, au bureau des Archives de la préfecture, où ils sont déposés. Le Directeur du Conservatoire des Arts et Métiers serait en conséquent tenu de dresser chaque mois la liste des brevets expirés le mois précédent, liste que Son Exc. Le ministre de l’Intérieur pourrait adresser à chacun de messieurs les préfets. Ces magistrats ordonneraient de suite l’insertion dans le mémorial ou journal de la préfecture. Il paraît évident que par suite de ces diverses mesures les inconvénients qui viennent d’être signalés et qui vraisemblablement sont plus communs qu’on ne le pense n’existeraient plus. » Pourtant, la technique de Vauchelet est encore mentionnée dans les précis techniques jusqu'à l'aube des années 1840. Elle tombe ensuite dans l'oubli, avec son inventeur, dont le ployant du musée des Tissus est une des rares productions conservée dans les collections publiques. Maximilien Durand (fr)
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