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| - Échantillon d'étoffe pour ameublement, tissu de verre (fr)
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| - L'échantillon, qui présente une lisière sur son côté gauche, s'inspire, par ses couleurs et son décor, des lampas italiens brochés d'or de la fin du XVIe siècle et de la première moitié du XVIIe siècle. Sur un fond carmin se déploie un réseau formé par des palmettes, disposées en quinconce, prolongées par des enroulements de cuirs découpés et par des tigelles feuillues. L'échantillon se distingue néanmoins singulièrement par l'usage de trames de verre lancées, de couleur jaune, imitant les trames en or brochées des originaux, associées aux trames de coton du fond. Il s'agit ici d'un des premiers exemples des « tissus de verre », inventés et commercialisés par Ignace-Charles-Romain Dubus-Bonnel, fabricant spécialisé dans la teinture du fil, à partir de 1836-1837.
Un premier brevet d'invention de cinq ans (n° 10674) avait été pris le 29 décembre 1836 par Dubus-Bonnel et son associé Wattel-Bajeux, négociant à Roubaix, « pour le tissage du verre rendu malléable par la vapeur, pur ou mélangé avec la soie, laine, coton ou lin. » Le procédé, alors totalement inédit, est décrit dans le brevet :
« Le verre ordinaire est soumis à l'action du feu produit par une lampe d'émailleur, pour être filé très fin sur une roue, et il est ensuite placé dans une caisse où l'on introduit de la vapeur à la plus haute température possible. Le verre, sortant par une très petite ouverture, se dévide sur une navette, elle-même brûlante ou chauffée de 40° à 50° C. Le verre est ensuite tissé sur un métier à la Jacquard, dans un appartement chauffé de 30° à 35° Réaumur. Le peigne et le rot d'acier sont posés sur un tube en cuivre chauffé de même à 80° ; cela suffit pour rendre le verre filé malléable au point de le tisser comme la soie et autres produits avec lesquels il peut être réuni. »
La technique fut rapidement perfectionnée, comme en témoigne le brevet d'addition et de perfectionnement pris le 17 août 1837. Par la même occasion, le brevet était prorogé de dix ans, jusqu'au 29 décembre 1851. Le 19 décembre 1837, enfin, Dubus-Bonnel devenait cessionnaire de tous les droits de son associé sur le brevet qu'ils avaient pris ensemble le 29 décembre 1836. Les dispositions principales du brevet d'addition et de perfectionnement étaient les suivantes : « Le perfectionnement consiste à ne plus utiliser ni vapeur, ni chaleur pour le tissage du verre. Le verre, d'abord filé à la lampe d'émailleur, est ensuite posé par mèches (de 2 à 3 millimètres environ de grosseur, et longues de toute la largeur du tissu) sur une barre en bois léger qui contient une gorge propre à retenir les fils de verre. Cette barre, large de 4 centimètres et longue de 3 mètres environ, est garnie de roulettes, afin de glisser sur la chaîne comme une navette. Un support en bois est garni d'un couloir dans lequel glisse la barre de bois, avant que d'être lancée sur le métier à la Jacquard. Une corde est attachée à la barre, et la fait revenir à son point de départ, après qu'elle a eu distribué le verre sur le métier. Travail. — Un aide-ouvrier, après avoir placé une mèche de verre sur la barre, la lance entre les fils de chaîne. L'ouvrier qui est sur le métier saisit le verre ; l'aide retire la barre au moyen de la corde, et, tandis qu'il la garnit d'une autre mèche de verre, le tisserand exécute son travail. Il est facile de comprendre que ce moyen très simple doit activer la fabrication de l'étoffe et la perfectionner par sa régularité. Il fallait auparavant employer des crochets, dont le moindre inconvénient était de déchirer les fils de chaîne. »
Dès le début de l'année 1837, Ignace Dubus-Bonnel soumet ses étoffes de verre à l'Exposition annuelle de l'Association lilloise, dont le compte rendu a été publié dans la Revue du Nord. Archives de l'ancienne Flandre, tome 2 (p. 110) : « Un brevet d'invention a déjà signalé à l'intérêt général l'importante découverte de M. Dubus ; quant à nous, membres d'une commission spéciale des arts du dessin, qu'il nous soit permis de rappeler à cet habile industriel combien le bon goût du dessin et le choix des formes dans les ornements ajoute au prix de la matière, quelque précieuse qu'elle soit. »
Les étoffes de verre sont soumises également à la Société des Enfants du Nord, société savante et littéraire qui se réunit à Paris. Elles y suscitent des commentaires plus enthousiastes, comme l'indique le témoignage d'un de ses membres, Pierre-Théodore Virlet d'Aoust, publié dans L'Écho du monde savant et l'Hermès. Journal analytique des nouvelles et des cours scientifiques, 4e année (n° 208), 1ère division, Sciences physiques et historiques, n° 59, du 15 février 1837 :
« Il y a cent ans à peine que quiconque eût dit qu'on pouvait tisser le verre, la matière qui paraît la moins flexible et la moins susceptible de se prêter à un travail mécanique de ce genre, aurait passé, aux yeux de bien du monde, pour un illuminé ou pour un fou ; ce problème vient cependant d'être complètement réalisé par M. Dubus-Bonnel, de Lille, qui a présenté à la Société des Enfants du Nord, lors de sa dernière réunion générale, divers tissus de verre qui l'emportent de beaucoup par l'éclat des couleurs et les reflets de la lumière sur tout ce que la laine et la soie réunies à l'or et à l'argent peuvent offrir de plus brillant. Aussi semble-t-il, après cela, que désormais, dans les temps modernes où les arts et l'industrie réalisent chaque jour tant de choses regardées jusqu'alors comme impossibles, il n'y ait plus de limites où le génie de l'homme ne puisse atteindre. Qu'on se figure un appartement tout décoré avec des tentures en étoffes de verre et resplendissant de lumières ; il égalera tout ce que l'imagination peut concevoir de plus brillant ; il réalisera en un mot les merveilles des palais enchantés des contes des Milles et une nuits ; car les lumières, en se jouant et en se réfléchissant en tous sens à travers le tissu transparent auquel on peut donner toutes les couleurs comme toutes les nuances lui donnera l'apparence d'un appartement tout en perles, en nacre ou en diamants, ou composé de grenats, de saphirs, de topazes, de rubis, d'émeraudes, d'améthystes, etc., ou bien enfin de toutes ces pierres précieuses réunies et combinées de mille manières différentes, se mariant et se jouant en étoiles, en rosaces, en bouquets, en guirlandes, en festons et en ondulations gracieuses et variées à l'infini. Les anciens n'eussent pas manqué de décerner des couronnes à l'inventeur de pareilles merveilles ; nous nous bornerons, nous, dans ce siècle d'indifférence, à engager M. Dubus-Bonnel à poursuivre son œuvre avec persévérance, persuadé que ses étoffes, dont nous avons pu constater la solidité et la parfaite flexibilité, n'étant pas sujettes à se ternir comme tous les autres tissus, présentent ce qui vaut peut-être beaucoup mieux un grand avenir industriel, surtout si, comme il nous l'a assuré, il peut les livrer à des prix très modérés. »
La même année, Ignace Dubus-Bonnel reçoit une médaille d'or de la reine Marie-Amélie qui voit les tissus de verre exposés dans le Passage de l'Opéra.
Établi désormais au 97, rue de Charonne, Ignace Dubus-Bonnel sollicite l'examen de ses tissus et ornements en verre par la Société d'encouragement pour l'industrie nationale. À l'Exposition des produits de l'industrie française de 1839, ses étoffes de verre sont très remarquées, comme en témoigne le Rapport du jury central (p. 314) : « Il nous reste à signaler un nouveau genre de broderie qui se fabrique au métier à la Jacquart, et qui, n'ayant pu être classé parmi les tissus ordinaires, à cause de son excentricité même, trouvera, par une sorte d'analogie, sa place naturelle à la suite des tissus de luxe dont il vient d'être question : nous voulons parler des étoffes dites de verre, exposées par M. Dubus-Bonnel. Plusieurs membres de la commission des tissus ont été visiter, dans le faubourg Saint-Antoine, les ateliers de fabrication de cet inventeur. Tout son secret consiste dans un moyen fort simple de donner au verre étiré à la lampe une flexibilité qui permet de l'employer comme fil de trame. Ce fil peut être coloré en jaune, en bleu, en vert, par les procédés ordinaires de l'art du verrier. Ainsi préparé et employé à faire des brochés par le métier à la Jacquart, le fil de verre imite avec un avantage apparent l'or et l'argent, et présente des reflets qu'on ne trouve pas toujours dans les plus magnifiques brocarts. M. Dubus-Bonnel s'en est servi pour obtenir des étoffes-tentures, des ornements d'église, des garnitures de fauteuils, sur lesquels il est à craindre qu'on ne puisse s'asseoir avec une parfaite sécurité, jusqu'à ce que l'inventeur ait fait disparaître certaines efflorescences inquiétantes. Tel qu'il est, cet essai hardi a paru au jury digne d'encouragement. » Le même rapport précise, un peu plus loin (p. 321) : « M. Dubus-Bonnel, à Paris, est l'inventeur des tissus de verre dont on vient de parler. L'effet de ces tissus a été généralement admiré ; ils brillent de l'éclat le plus vif, et il y a lieu d'espérer que l'usage en prévaudra pour la fabrication des ornements d'église, peut-être aussi pour les tentures fines, qui lancent de véritables feux à la clarté des bougies. Un salon ainsi éclairé a été visité par l'un des rapporteurs à la commission des tissus, et lui a paru mériter les éloges qui en avaient été faits. M. Dubus-Bonnel a d'ailleurs reçu, surtout de l'étranger, un très grands nombre de commandes, qu'il s'occupe à réaliser par le métier à la Jacquart. Le jury décerne à l'inventeur une mention honorable. »
L'Exposition de 1839 consacre l'invention d'Ignace Dubus-Bonnel. Elle lui vaut une commande du gouvernement pour les draperies du char funèbre de l'Empereur Napoléon Ier durant la cérémonie du Retour des Cendres, plusieurs commandes étrangères et des mentions dans diverses publications scientifiques, mais aussi dans des journaux, en France et à l'étranger. Le Recueil de la Société polytechnique ou Recueil industriel, manufacturier, agricole et commercial, de la Salubrité publique et des Beaux-Arts, et des actes de l'administration propres à encourager les diverses branches de l'économie publique, publié en 1840, par exemple, montre l'engouement que suscitent les étoffes de verre de Dubus-Bonnel (p. 89-91) : « C'est avec un intérêt d'à propos que nous rappellerons ici les éloges mérités que le public a accordé, lors de la dernière exposition, aux produits si remarquables et si curieux à la fois de MM. (sic) Dubus-Bonnel. En attendant que, dans le premier volume de la Description de cette exposition, que nous ne tarderons pas à faire paraître, nous puissions consacrer un long article à cette invention, nous nous contenterons de féliciter l'administration des pompes funèbres d'avoir eu le bon goût de vouloir que le char funèbre qui doit transporter les cendres de Napoléon fût décoré avec les étoffes de cette manufacture. Nul doute que le grand homme, qui a tant enrichi la France, et qui a versé dans ses coffres tant de millions, ne méritât bien que l'or et l'argent massif fussent employés aux décorations indiquées par le programme des cérémonies. Mais, d'une part, le crédit ouvert par les Chambres traçait des limites, et, de l'autre, le temps accordé pour les travaux était trop court pour qu'on tentât de mettre, par exemple, en broderies d'or tout ce qui semblait l'exiger. Il fallait donc y suppléer d'une manière heureuse et chercher à faire illusion à ces milliers d'yeux d'une foule qui contemplera le char funèbre... Tout indiquait, pour ce choix, les étoffes si moelleuses et si brillantes que MM. Dubus-Bonnel sont parvenus à fabriquer dans leurs ateliers. Le très beau dessin, qu'on doit aux talents si bien connus de MM. Visconti et Labrousse (sic), sera rendu avec une perfection admirable. Nous en avons déjà vu une partie ; et si quelques rayons du soleil d'Austerlitz viennent à éclairer cette scène funèbre, le reflet des draperies fabriquées permettra aux plus incrédules de croire qu'on a semé l'or à pleines mains. Un de nos correspondants nous a fait part d'une anecdote qui prouve jusqu'à quel point MM. Dubus-Bonnel sont parvenus à fasciner les yeux. Il n'est certes pas de pays où l'on apprécie mieux qu'en Orient les tissus d'or et d'argent ; c'est le nécessaire indispensable de tout ameublement. S. M. le roi des Français a eu l'idée d'envoyer en présent au schah de Perse, par la dernière ambassade, plusieurs tentures exécutées en verre filé. Elles ont été reçues avec un empressement marqué par ce souverain ; mais, malgré toutes les assurances données par les personnes de l'ambassade, le schah est resté convaincu qu'on le trompait en lui disant que les tissus offerts n'étaient pas brodés en or. Il n'a jamais pu se rendre compte de ces merveilles de l'art... On voit que si les distances n'étaient pas si grandes, MM. Dubus et Bonnel pourraient assurer leur fortune, en établissant un dépôt à Ispahan ou à Bagdad. Ajoutons enfin que des souverains bien connus en Europe par leur goût, tels que le roi de Bavière, ont voulu juger de l'effet de ces belles tentures, en en faisant décorer les salles de leurs palais. »
La Revue du Nord de la France, dans un article intitulé « Coup d'œil sur l'industrie française, à propos de l'Exposition », dans la 5e livraison publiée en juillet 1839, réserve les mêmes louanges aux tissus de verre révélés à l'Exposition de 1839 (tome second, Lille, 1840, p. 300) : « C'est avec un plaisir bien vif et même avec un certain orgueil que nous avons vu, durant tout le cours de l'exposition, la foule se porter devant les tissus de verre que fabrique notre compatriote, M. Dubus-Bonnel. Chacun s'ébahissait à la vue de ses tentures où la substance la plus friable, teinte des plus belles couleurs, s'est assouplie à l'excès. On peut louer sans restriction les dessins et les dispositions de ces belles productions d'une industrie à peine naissante et déjà parvenue à une rare perfection. Le verre, aussi éblouissant que l'or, conserve une transparence toute particulière qui doit faire un grand effet à la lueur des bougies. Les encouragements et les récompenses ne peuvent manquer de prouver à M. Dubus-Bonnel que le gouvernement s'associe à l'admiration générale. »
À l'issue de l'Exposition, les étoffes de verre pouvaient être commandées à la Maison de Commission Lassalle, comme en témoigne la livraison du 1er juin 1839 du Journal des Modes (p. 272-273) : « Si vous avez des salles d'apparat à meubler, à qui pouvez-vous mieux vous adresser qu'à M. Lassalle en relation avec M. Bonnel, l'inventeur des tissus de verre ? Vous seriez roi ou empereur que je vous défierais de trouver de plus somptueuses, de plus flexibles, de plus éclatantes étoffes que ces merveilleux tissus : le prodige, le nec plus ultra de l'exposition de 1839. Et pour les ornements d'église, pour les chasubles, pour les étoles, pour les chapes, ailleurs vous ne trouverez rien qui soit aussi magnifique. Je ne sais encore de quel côté s'écoulera le plus de tissus de verre, mais j'oserais parier que ce sera vers les sanctuaires. À tant de splendeur, des prix si modérés, c'est là qu'est le miracle. Parmi les pièces que j'ai le plus admirées, il y en avait trois qui m'ont semblé tout à fait incomparables et sans pareilles : une gros bleu de roi à ramages d'or, une vert et argent, et la troisième brun avec arabesques d'or. Tout Paris sait aujourd'hui que M. Dubus-Bonnel a tendu un salon avec ses tissus de verre : on y est admis, on le visite à la lueur des lustres et l'on reste ébloui de tant d'éclat et stupéfait de la modération du prix, car ces étoffes, qui résistent sans s'altérer à l'action du gaz et de l'humidité, ces deux grands ennemis des dorures, ne se vendent pas plus cher que les soieries ordinaires. Depuis cette belle découverte, les demandes ne cessent d'arriver à l'inventeur. M. Lassalle a examiné avec un soin extrême ces étoffes, je m'explique le soin qu'il a mis à les étudier par le désir qu'il a de les employer lorsque MM. les ecclésiastiques s'adresseront à lui pour avoir des ornements d'autel. »
Cherchant, en effet, à développer la branche des ornements d'église, Ignace Dubus-Bonnel adresse au pape Grégoire XVI une étole et une chasuble réalisées en tissus de verre. Une autre chasuble réalisée par Dubus-Bonnel, déposée par la commune de Cornieville, est aujourd'hui conservée au musée d'Art sacré de Saint-Mihiel, dans la Meuse (inv. DC 2001-0010-1-2).
Les nouvelles étoffes suscitent cependant aussi des réserves. On se souvient des encouragements à perfectionner le dessin des étoffes formulés par la commission réunie par l'Association lilloise pour juger les œuvres présentées à leur exposition de 1837, et celles d'Adolphe Blanqui, rapporteur de l'Exposition des produits de l'industrie française de 1839, qui redoutait l'usage et l'attouchement des étoffes de verre pour la santé. En Belgique, des échantillons des tissus de verre inventés par Ignace Dubus-Bonnel furent présentés à l'Exposition des produits de l'industrie nationale de 1841 par la maison Fretigny et Cie ; ils ne convainquent pas le rapporteur de l'événement, Édouard Perrot, dans sa Revue de l'Exposition des produits de l'industrie nationale publiée à Bruxelles la même année (p. 88) : « Puisque nous voici arrivés arrivés à la fin de notre revue des tissus de toute espèce, nous citerons, ne fût-ce que pour mémoire, l'écran en tissu de verre et de soie de MM. Fretigny et Cie, de Gand, auxquels il faut savoir gré de l'envoi de cet échantillon d'un produit qui a excité en France un certain intérêt de curiosité. M. Dubus-Bonnel, de Lille, à qui l'on doit cette invention, fait de ces tissus tout en verre ; le jury de l'Exposition de 1839 les a mentionnés honorablement ; il avait été frappé de l'éclat que jetait aux lumières un salon garni de tentures de tissus de verre ; mais tout cela ne fait pas que cette fabrication soit, à notre avis, destinée à prendre de l'importance. S'il devait en être ainsi, MM. Fretigny et Cie nous ont dans tous les cas donné la certitude qu'il serait facile à la Belgique d'y participer. »
La commande des draperies du char funèbre de Napoléon Ier avait cependant assuré une grande publicité aux étoffes de verre. Le musée des Tissus conserve plusieurs éléments de l'étoffe utilisée pour la cérémonie du 15 décembre 1840 (MT 35086). Les autres étoffes de la production de Dubus-Bonnel conservées dans les collections publiques sont évidemment bien moins connues, et plus rares. L'échantillon du musée des Tissus présente donc un grand intérêt. Il avait été acquis par Jules Reybaud (1807-1872), dessinateur de fabrique, auteur des portraits tissés de Philippe de Lasalle (MT 7912), d'Antoine Berjon (inv. MT 7910) et de Jean-François Bony (inv. MT 7911) qui ont été présentés à l'Exposition universelle de 1855, et d'Alexandre de Humboldt, exécuté l'année suivante, qui valut à l'artiste une lettre flatteuse du modèle lui-même et une médaille d'or du roi de Prusse Frédéric-Guillaume IV. Jules Reybaud avait constitué un cabinet, dans lequel il avait réuni une collection remarquable qui comprenait des œuvres appartenant au domaine des beaux-arts (peintures, gravures, lithographies), des arts appliqués à l'industrie (peintures, dessins) des céramiques européennes, chinoises et japonaises, des étoffes, du Moyen Âge jusqu'au Second Empire, des papiers peints et des objets d'art. La renommée, à Lyon, de ce cabinet était grande : il fut visité par le maréchal de Castellane, par le cardinal de Bonald et par le sénateur Vaïsse qui y accompagna le roi de Bavière, Maximilien II. La collection de Jules Reybaud a été acquise en intégralité par la Chambre de Commerce de Lyon, en 1862, pour son musée d'Art et d'Industrie fondé en 1856. Elle constitue, encore aujourd'hui, l'un des apports majeurs de la collection du musée, puisqu'elle avait été réunie par un connaisseur éclairé. L'échantillon de tissus de verre faisait partie de ce cabinet réuni par Jules Reybaud.
Maximilien Durand (fr)
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| - L'échantillon, qui présente une lisière sur son côté gauche, s'inspire, par ses couleurs et son décor, des lampas italiens brochés d'or de la fin du XVIe siècle et de la première moitié du XVIIe siècle. Sur un fond carmin se déploie un réseau formé par des palmettes, disposées en quinconce, prolongées par des enroulements de cuirs découpés et par des tigelles feuillues. L'échantillon se distingue néanmoins singulièrement par l'usage de trames de verre lancées, de couleur jaune, imitant les trames en or brochées des originaux, associées aux trames de coton du fond. Il s'agit ici d'un des premiers exemples des « tissus de verre », inventés et commercialisés par Ignace-Charles-Romain Dubus-Bonnel, fabricant spécialisé dans la teinture du fil, à partir de 1836-1837.
Un premier brevet d'invention de cinq ans (n° 10674) avait été pris le 29 décembre 1836 par Dubus-Bonnel et son associé Wattel-Bajeux, négociant à Roubaix, « pour le tissage du verre rendu malléable par la vapeur, pur ou mélangé avec la soie, laine, coton ou lin. » Le procédé, alors totalement inédit, est décrit dans le brevet :
« Le verre ordinaire est soumis à l'action du feu produit par une lampe d'émailleur, pour être filé très fin sur une roue, et il est ensuite placé dans une caisse où l'on introduit de la vapeur à la plus haute température possible. Le verre, sortant par une très petite ouverture, se dévide sur une navette, elle-même brûlante ou chauffée de 40° à 50° C. Le verre est ensuite tissé sur un métier à la Jacquard, dans un appartement chauffé de 30° à 35° Réaumur. Le peigne et le rot d'acier sont posés sur un tube en cuivre chauffé de même à 80° ; cela suffit pour rendre le verre filé malléable au point de le tisser comme la soie et autres produits avec lesquels il peut être réuni. »
La technique fut rapidement perfectionnée, comme en témoigne le brevet d'addition et de perfectionnement pris le 17 août 1837. Par la même occasion, le brevet était prorogé de dix ans, jusqu'au 29 décembre 1851. Le 19 décembre 1837, enfin, Dubus-Bonnel devenait cessionnaire de tous les droits de son associé sur le brevet qu'ils avaient pris ensemble le 29 décembre 1836. Les dispositions principales du brevet d'addition et de perfectionnement étaient les suivantes : « Le perfectionnement consiste à ne plus utiliser ni vapeur, ni chaleur pour le tissage du verre. Le verre, d'abord filé à la lampe d'émailleur, est ensuite posé par mèches (de 2 à 3 millimètres environ de grosseur, et longues de toute la largeur du tissu) sur une barre en bois léger qui contient une gorge propre à retenir les fils de verre. Cette barre, large de 4 centimètres et longue de 3 mètres environ, est garnie de roulettes, afin de glisser sur la chaîne comme une navette. Un support en bois est garni d'un couloir dans lequel glisse la barre de bois, avant que d'être lancée sur le métier à la Jacquard. Une corde est attachée à la barre, et la fait revenir à son point de départ, après qu'elle a eu distribué le verre sur le métier. Travail. — Un aide-ouvrier, après avoir placé une mèche de verre sur la barre, la lance entre les fils de chaîne. L'ouvrier qui est sur le métier saisit le verre ; l'aide retire la barre au moyen de la corde, et, tandis qu'il la garnit d'une autre mèche de verre, le tisserand exécute son travail. Il est facile de comprendre que ce moyen très simple doit activer la fabrication de l'étoffe et la perfectionner par sa régularité. Il fallait auparavant employer des crochets, dont le moindre inconvénient était de déchirer les fils de chaîne. »
Dès le début de l'année 1837, Ignace Dubus-Bonnel soumet ses étoffes de verre à l'Exposition annuelle de l'Association lilloise, dont le compte rendu a été publié dans la Revue du Nord. Archives de l'ancienne Flandre, tome 2 (p. 110) : « Un brevet d'invention a déjà signalé à l'intérêt général l'importante découverte de M. Dubus ; quant à nous, membres d'une commission spéciale des arts du dessin, qu'il nous soit permis de rappeler à cet habile industriel combien le bon goût du dessin et le choix des formes dans les ornements ajoute au prix de la matière, quelque précieuse qu'elle soit. »
Les étoffes de verre sont soumises également à la Société des Enfants du Nord, société savante et littéraire qui se réunit à Paris. Elles y suscitent des commentaires plus enthousiastes, comme l'indique le témoignage d'un de ses membres, Pierre-Théodore Virlet d'Aoust, publié dans L'Écho du monde savant et l'Hermès. Journal analytique des nouvelles et des cours scientifiques, 4e année (n° 208), 1ère division, Sciences physiques et historiques, n° 59, du 15 février 1837 :
« Il y a cent ans à peine que quiconque eût dit qu'on pouvait tisser le verre, la matière qui paraît la moins flexible et la moins susceptible de se prêter à un travail mécanique de ce genre, aurait passé, aux yeux de bien du monde, pour un illuminé ou pour un fou ; ce problème vient cependant d'être complètement réalisé par M. Dubus-Bonnel, de Lille, qui a présenté à la Société des Enfants du Nord, lors de sa dernière réunion générale, divers tissus de verre qui l'emportent de beaucoup par l'éclat des couleurs et les reflets de la lumière sur tout ce que la laine et la soie réunies à l'or et à l'argent peuvent offrir de plus brillant. Aussi semble-t-il, après cela, que désormais, dans les temps modernes où les arts et l'industrie réalisent chaque jour tant de choses regardées jusqu'alors comme impossibles, il n'y ait plus de limites où le génie de l'homme ne puisse atteindre. Qu'on se figure un appartement tout décoré avec des tentures en étoffes de verre et resplendissant de lumières ; il égalera tout ce que l'imagination peut concevoir de plus brillant ; il réalisera en un mot les merveilles des palais enchantés des contes des Milles et une nuits ; car les lumières, en se jouant et en se réfléchissant en tous sens à travers le tissu transparent auquel on peut donner toutes les couleurs comme toutes les nuances lui donnera l'apparence d'un appartement tout en perles, en nacre ou en diamants, ou composé de grenats, de saphirs, de topazes, de rubis, d'émeraudes, d'améthystes, etc., ou bien enfin de toutes ces pierres précieuses réunies et combinées de mille manières différentes, se mariant et se jouant en étoiles, en rosaces, en bouquets, en guirlandes, en festons et en ondulations gracieuses et variées à l'infini. Les anciens n'eussent pas manqué de décerner des couronnes à l'inventeur de pareilles merveilles ; nous nous bornerons, nous, dans ce siècle d'indifférence, à engager M. Dubus-Bonnel à poursuivre son œuvre avec persévérance, persuadé que ses étoffes, dont nous avons pu constater la solidité et la parfaite flexibilité, n'étant pas sujettes à se ternir comme tous les autres tissus, présentent ce qui vaut peut-être beaucoup mieux un grand avenir industriel, surtout si, comme il nous l'a assuré, il peut les livrer à des prix très modérés. »
La même année, Ignace Dubus-Bonnel reçoit une médaille d'or de la reine Marie-Amélie qui voit les tissus de verre exposés dans le Passage de l'Opéra.
Établi désormais au 97, rue de Charonne, Ignace Dubus-Bonnel sollicite l'examen de ses tissus et ornements en verre par la Société d'encouragement pour l'industrie nationale. À l'Exposition des produits de l'industrie française de 1839, ses étoffes de verre sont très remarquées, comme en témoigne le Rapport du jury central (p. 314) : « Il nous reste à signaler un nouveau genre de broderie qui se fabrique au métier à la Jacquart, et qui, n'ayant pu être classé parmi les tissus ordinaires, à cause de son excentricité même, trouvera, par une sorte d'analogie, sa place naturelle à la suite des tissus de luxe dont il vient d'être question : nous voulons parler des étoffes dites de verre, exposées par M. Dubus-Bonnel. Plusieurs membres de la commission des tissus ont été visiter, dans le faubourg Saint-Antoine, les ateliers de fabrication de cet inventeur. Tout son secret consiste dans un moyen fort simple de donner au verre étiré à la lampe une flexibilité qui permet de l'employer comme fil de trame. Ce fil peut être coloré en jaune, en bleu, en vert, par les procédés ordinaires de l'art du verrier. Ainsi préparé et employé à faire des brochés par le métier à la Jacquart, le fil de verre imite avec un avantage apparent l'or et l'argent, et présente des reflets qu'on ne trouve pas toujours dans les plus magnifiques brocarts. M. Dubus-Bonnel s'en est servi pour obtenir des étoffes-tentures, des ornements d'église, des garnitures de fauteuils, sur lesquels il est à craindre qu'on ne puisse s'asseoir avec une parfaite sécurité, jusqu'à ce que l'inventeur ait fait disparaître certaines efflorescences inquiétantes. Tel qu'il est, cet essai hardi a paru au jury digne d'encouragement. » Le même rapport précise, un peu plus loin (p. 321) : « M. Dubus-Bonnel, à Paris, est l'inventeur des tissus de verre dont on vient de parler. L'effet de ces tissus a été généralement admiré ; ils brillent de l'éclat le plus vif, et il y a lieu d'espérer que l'usage en prévaudra pour la fabrication des ornements d'église, peut-être aussi pour les tentures fines, qui lancent de véritables feux à la clarté des bougies. Un salon ainsi éclairé a été visité par l'un des rapporteurs à la commission des tissus, et lui a paru mériter les éloges qui en avaient été faits. M. Dubus-Bonnel a d'ailleurs reçu, surtout de l'étranger, un très grands nombre de commandes, qu'il s'occupe à réaliser par le métier à la Jacquart. Le jury décerne à l'inventeur une mention honorable. »
L'Exposition de 1839 consacre l'invention d'Ignace Dubus-Bonnel. Elle lui vaut une commande du gouvernement pour les draperies du char funèbre de l'Empereur Napoléon Ier durant la cérémonie du Retour des Cendres, plusieurs commandes étrangères et des mentions dans diverses publications scientifiques, mais aussi dans des journaux, en France et à l'étranger. Le Recueil de la Société polytechnique ou Recueil industriel, manufacturier, agricole et commercial, de la Salubrité publique et des Beaux-Arts, et des actes de l'administration propres à encourager les diverses branches de l'économie publique, publié en 1840, par exemple, montre l'engouement que suscitent les étoffes de verre de Dubus-Bonnel (p. 89-91) : « C'est avec un intérêt d'à propos que nous rappellerons ici les éloges mérités que le public a accordé, lors de la dernière exposition, aux produits si remarquables et si curieux à la fois de MM. (sic) Dubus-Bonnel. En attendant que, dans le premier volume de la Description de cette exposition, que nous ne tarderons pas à faire paraître, nous puissions consacrer un long article à cette invention, nous nous contenterons de féliciter l'administration des pompes funèbres d'avoir eu le bon goût de vouloir que le char funèbre qui doit transporter les cendres de Napoléon fût décoré avec les étoffes de cette manufacture. Nul doute que le grand homme, qui a tant enrichi la France, et qui a versé dans ses coffres tant de millions, ne méritât bien que l'or et l'argent massif fussent employés aux décorations indiquées par le programme des cérémonies. Mais, d'une part, le crédit ouvert par les Chambres traçait des limites, et, de l'autre, le temps accordé pour les travaux était trop court pour qu'on tentât de mettre, par exemple, en broderies d'or tout ce qui semblait l'exiger. Il fallait donc y suppléer d'une manière heureuse et chercher à faire illusion à ces milliers d'yeux d'une foule qui contemplera le char funèbre... Tout indiquait, pour ce choix, les étoffes si moelleuses et si brillantes que MM. Dubus-Bonnel sont parvenus à fabriquer dans leurs ateliers. Le très beau dessin, qu'on doit aux talents si bien connus de MM. Visconti et Labrousse (sic), sera rendu avec une perfection admirable. Nous en avons déjà vu une partie ; et si quelques rayons du soleil d'Austerlitz viennent à éclairer cette scène funèbre, le reflet des draperies fabriquées permettra aux plus incrédules de croire qu'on a semé l'or à pleines mains. Un de nos correspondants nous a fait part d'une anecdote qui prouve jusqu'à quel point MM. Dubus-Bonnel sont parvenus à fasciner les yeux. Il n'est certes pas de pays où l'on apprécie mieux qu'en Orient les tissus d'or et d'argent ; c'est le nécessaire indispensable de tout ameublement. S. M. le roi des Français a eu l'idée d'envoyer en présent au schah de Perse, par la dernière ambassade, plusieurs tentures exécutées en verre filé. Elles ont été reçues avec un empressement marqué par ce souverain ; mais, malgré toutes les assurances données par les personnes de l'ambassade, le schah est resté convaincu qu'on le trompait en lui disant que les tissus offerts n'étaient pas brodés en or. Il n'a jamais pu se rendre compte de ces merveilles de l'art... On voit que si les distances n'étaient pas si grandes, MM. Dubus et Bonnel pourraient assurer leur fortune, en établissant un dépôt à Ispahan ou à Bagdad. Ajoutons enfin que des souverains bien connus en Europe par leur goût, tels que le roi de Bavière, ont voulu juger de l'effet de ces belles tentures, en en faisant décorer les salles de leurs palais. »
La Revue du Nord de la France, dans un article intitulé « Coup d'œil sur l'industrie française, à propos de l'Exposition », dans la 5e livraison publiée en juillet 1839, réserve les mêmes louanges aux tissus de verre révélés à l'Exposition de 1839 (tome second, Lille, 1840, p. 300) : « C'est avec un plaisir bien vif et même avec un certain orgueil que nous avons vu, durant tout le cours de l'exposition, la foule se porter devant les tissus de verre que fabrique notre compatriote, M. Dubus-Bonnel. Chacun s'ébahissait à la vue de ses tentures où la substance la plus friable, teinte des plus belles couleurs, s'est assouplie à l'excès. On peut louer sans restriction les dessins et les dispositions de ces belles productions d'une industrie à peine naissante et déjà parvenue à une rare perfection. Le verre, aussi éblouissant que l'or, conserve une transparence toute particulière qui doit faire un grand effet à la lueur des bougies. Les encouragements et les récompenses ne peuvent manquer de prouver à M. Dubus-Bonnel que le gouvernement s'associe à l'admiration générale. »
À l'issue de l'Exposition, les étoffes de verre pouvaient être commandées à la Maison de Commission Lassalle, comme en témoigne la livraison du 1er juin 1839 du Journal des Modes (p. 272-273) : « Si vous avez des salles d'apparat à meubler, à qui pouvez-vous mieux vous adresser qu'à M. Lassalle en relation avec M. Bonnel, l'inventeur des tissus de verre ? Vous seriez roi ou empereur que je vous défierais de trouver de plus somptueuses, de plus flexibles, de plus éclatantes étoffes que ces merveilleux tissus : le prodige, le nec plus ultra de l'exposition de 1839. Et pour les ornements d'église, pour les chasubles, pour les étoles, pour les chapes, ailleurs vous ne trouverez rien qui soit aussi magnifique. Je ne sais encore de quel côté s'écoulera le plus de tissus de verre, mais j'oserais parier que ce sera vers les sanctuaires. À tant de splendeur, des prix si modérés, c'est là qu'est le miracle. Parmi les pièces que j'ai le plus admirées, il y en avait trois qui m'ont semblé tout à fait incomparables et sans pareilles : une gros bleu de roi à ramages d'or, une vert et argent, et la troisième brun avec arabesques d'or. Tout Paris sait aujourd'hui que M. Dubus-Bonnel a tendu un salon avec ses tissus de verre : on y est admis, on le visite à la lueur des lustres et l'on reste ébloui de tant d'éclat et stupéfait de la modération du prix, car ces étoffes, qui résistent sans s'altérer à l'action du gaz et de l'humidité, ces deux grands ennemis des dorures, ne se vendent pas plus cher que les soieries ordinaires. Depuis cette belle découverte, les demandes ne cessent d'arriver à l'inventeur. M. Lassalle a examiné avec un soin extrême ces étoffes, je m'explique le soin qu'il a mis à les étudier par le désir qu'il a de les employer lorsque MM. les ecclésiastiques s'adresseront à lui pour avoir des ornements d'autel. »
Cherchant, en effet, à développer la branche des ornements d'église, Ignace Dubus-Bonnel adresse au pape Grégoire XVI une étole et une chasuble réalisées en tissus de verre. Une autre chasuble réalisée par Dubus-Bonnel, déposée par la commune de Cornieville, est aujourd'hui conservée au musée d'Art sacré de Saint-Mihiel, dans la Meuse (inv. DC 2001-0010-1-2).
Les nouvelles étoffes suscitent cependant aussi des réserves. On se souvient des encouragements à perfectionner le dessin des étoffes formulés par la commission réunie par l'Association lilloise pour juger les œuvres présentées à leur exposition de 1837, et celles d'Adolphe Blanqui, rapporteur de l'Exposition des produits de l'industrie française de 1839, qui redoutait l'usage et l'attouchement des étoffes de verre pour la santé. En Belgique, des échantillons des tissus de verre inventés par Ignace Dubus-Bonnel furent présentés à l'Exposition des produits de l'industrie nationale de 1841 par la maison Fretigny et Cie ; ils ne convainquent pas le rapporteur de l'événement, Édouard Perrot, dans sa Revue de l'Exposition des produits de l'industrie nationale publiée à Bruxelles la même année (p. 88) : « Puisque nous voici arrivés arrivés à la fin de notre revue des tissus de toute espèce, nous citerons, ne fût-ce que pour mémoire, l'écran en tissu de verre et de soie de MM. Fretigny et Cie, de Gand, auxquels il faut savoir gré de l'envoi de cet échantillon d'un produit qui a excité en France un certain intérêt de curiosité. M. Dubus-Bonnel, de Lille, à qui l'on doit cette invention, fait de ces tissus tout en verre ; le jury de l'Exposition de 1839 les a mentionnés honorablement ; il avait été frappé de l'éclat que jetait aux lumières un salon garni de tentures de tissus de verre ; mais tout cela ne fait pas que cette fabrication soit, à notre avis, destinée à prendre de l'importance. S'il devait en être ainsi, MM. Fretigny et Cie nous ont dans tous les cas donné la certitude qu'il serait facile à la Belgique d'y participer. »
La commande des draperies du char funèbre de Napoléon Ier avait cependant assuré une grande publicité aux étoffes de verre. Le musée des Tissus conserve plusieurs éléments de l'étoffe utilisée pour la cérémonie du 15 décembre 1840 (MT 35086). Les autres étoffes de la production de Dubus-Bonnel conservées dans les collections publiques sont évidemment bien moins connues, et plus rares. L'échantillon du musée des Tissus présente donc un grand intérêt. Il avait été acquis par Jules Reybaud (1807-1872), dessinateur de fabrique, auteur des portraits tissés de Philippe de Lasalle (MT 7912), d'Antoine Berjon (inv. MT 7910) et de Jean-François Bony (inv. MT 7911) qui ont été présentés à l'Exposition universelle de 1855, et d'Alexandre de Humboldt, exécuté l'année suivante, qui valut à l'artiste une lettre flatteuse du modèle lui-même et une médaille d'or du roi de Prusse Frédéric-Guillaume IV. Jules Reybaud avait constitué un cabinet, dans lequel il avait réuni une collection remarquable qui comprenait des œuvres appartenant au domaine des beaux-arts (peintures, gravures, lithographies), des arts appliqués à l'industrie (peintures, dessins) des céramiques européennes, chinoises et japonaises, des étoffes, du Moyen Âge jusqu'au Second Empire, des papiers peints et des objets d'art. La renommée, à Lyon, de ce cabinet était grande : il fut visité par le maréchal de Castellane, par le cardinal de Bonald et par le sénateur Vaïsse qui y accompagna le roi de Bavière, Maximilien II. La collection de Jules Reybaud a été acquise en intégralité par la Chambre de Commerce de Lyon, en 1862, pour son musée d'Art et d'Industrie fondé en 1856. Elle constitue, encore aujourd'hui, l'un des apports majeurs de la collection du musée, puisqu'elle avait été réunie par un connaisseur éclairé. L'échantillon de tissus de verre faisait partie de ce cabinet réuni par Jules Reybaud.
Maximilien Durand (fr)
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| - Échantillon d'étoffe pour ameublement, tissu de verre (fr)
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