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  • L'échantillon de broderie pour bas de robe provient d'un grand livre de patrons, relié in folio, acquis par la Chambre de Commerce de Lyon pour son jeune musée d'Art et d'Industrie en avril 1866 auprès du « S(ieu)r Gallot, passage des Terreaux », qui contenait « cent trente-trois échantillons de broderies soie nuancée, paillettes, dorures et pierreries pour vêtements, d'une belle conservation. [...] Travail du commencement du XIXe siècle. » Le livre d'inventaire ne mentionne pas le nom de la maison d'où proviennent ces échantillons. Cependant, la plupart des modèles sont attribuables à Jean-François Bony (1754-1825), célèbre dessinateur de fabrique, brodeur, fabricant et occasionnellement peintre de fleurs. C'est le cas, notamment des échantillons de broderie pour robes de cour (inv. MT 18514, MT 18614 et MT 18620, par exemple). Il est très probable, d'ailleurs, que le modèle de broderie or sur drap d'argent de la robe commandée à Jean-François Bony par le Conseil municipal de Lyon en avril 1810 pour l'impératrice Marie-Louise (inv. MT 18797.2) provienne de ce livre de patrons, qui a été démonté à son entrée dans les collections. Cet échantillon de broderie, en effet, a perdu son numéro d'inventaire d'origine et il a été réinventorié a posteriori sous le numéro 18797.2 qui ne correspond à aucune entrée du livre d'inventaire. On a seulement dédoublé le numéro MT 18797 correspondant au projet gouaché de la robe, acquis cette même année 1866 de Paul Desq, fabricant de soieries lyonnais, avec dix-huit autres projets de robes (inv. MT 18794 à MT 18812) de la main de Jean-François Bony. Le musée des Tissus conserve par ailleurs plusieurs autres documents relatifs à cette commande pour l'impératrice Marie-Louise (inv. MT 2014.0.1, MT 2014.0.2, MT 2014.0.3 et MT 2014.0.4) préparant la broderie. Du livre de patrons d'origine, le musée des Tissus a peut-être conservé une double page, elle aussi réinventoriée a posteriori, contenant un échantillon de broderie d'argent et soie, et, sur la page en regard, des indications à l'encre comme le numéro de patron et le nom du modèle de robe, intitulé La Prêtresse (inv. MT 35142). Le musée des Tissus conserve plusieurs documents manuscrits de Jean-François Bony, et notamment un carnet de dessins qu'il a utilisé entre 1802 et 1816 (inv. MT 27638). C'est bien son écriture qui figure sur la double page contenant l'échantillon de La Prêtresse. L'échantillon de broderie pour robe de cour, exécuté sur un fond de tulle de soie double, fond dentelle, à mailles fixes, présente, en partie inférieure, une rangée de franges simulées en broderie, provenant d'une suite de motifs en forme de gouttes. Au-dessus de cette bordure court un rinceau sinueux, formé de palmes chargées, le long de leur nervure médiane, de fruits, et de touffes de feuilles disposées en éventail autour d'un gros fruit central grenu. Entre la suite de gouttes et le rinceau, des motifs de zigzags occupent le fond, tandis que le reste de la robe était semé de petits motifs. La broderie est réalisée en lame métallique dorée simples ou gaufrées et en cannetille frisée dorée. Le dessin des touffes de feuilles courant en partie inférieure de la robe rappelle celui des broderies d'or figurées sur le fond de satin blanc de l'impératrice Marie-Louise sur le portrait à la gouache sur ivoire peint en 1810 par Jean-Baptiste Isabey (1767-1855), conservé au Kunsthistorischesmuseum de Vienne (inv. Nr. SK_WS_XIV_149). On sait que les ateliers de Jean-François Bony étaient particulièrement réputés pour les broderies métalliques. Les brodeurs lyonnais s'étaient fait aussi une spécialité, sous l'Empire, des broderies sur tulle de soie. La production du tulle était une des nouvelles branches de l'industrie textile largement développée à Lyon au lendemain de la Révolution. Le mécanisme qui donna naissance au métier à tulle était celui du métier à bas, perfectionné par les Anglais au milieu du XVIIIe siècle. En France, les recherches parallèles du parisien Joseph-Camille Sarrazin (1735-1794), associé à Lyon aux fabricants Chaix, d'abord, puis Jolivet, et du lyonnais Ganton, associé à Paris au fabricant de bas Philippe Germain, permirent le tissage de tricots de soie à mailles fixes tellement arrêtées que l'une pouvait s'échapper sans que les autres se défassent, ainsi que la fabrication d'autres articles de bonneterie, et notamment l'étoffe fond dentelle, couramment appelée « tulle. » En 1791, Jolivet, associé désormais avec Joseph-Marie Cochet, fabricant de tricot à Lyon, déposa « un brevet d'invention de quinze ans pour la fabrication de bas ondés, brillants comme le satin, et d'un tricot-dentelle, à mailles fixes, qu'on peut couper sans qu'il s'effile. » Jolivet et Cochet obtinrent, le 9 floréal an VII (28 avril 1799), un arrêté du Directoire exécutif leur accordant un brevet de perfectionnement de quinze ans « pour des améliorations apportées dans la fabrication du tricot à doubles mailles fixes», et un certificat d'addition. Jusqu'en l'an VIII (1800), les fabricants ne firent pas publicité de leur brevet et plusieurs métiers à tulle étaient en activité à Lyon. Mais ils accusèrent soudain un autre fabricant, Antoine-Marie Derussy, l'inventeur des aiguilles pour la mécanique dont ils espéraient jouir de manière exclusive, de fabriquer l'étoffe fond dentelle qu'ils prétendaient seuls avoir le droit de fabriquer et de débiter. Ils cherchèrent à le ruiner par une confiscation des métiers et des étoffes de son atelier, une amende et des dommage et intérêts. Mais le procès tourna à leur désavantage puisqu'ils furent convaincus de s'être emparés des recherches de Ganton, à Paris, et il fut démontré que Derussy fabriquait le tulle par d'autres moyens qu'eux. Leur brevet fut réformé et Jolivet et Cochet furent condamnés à verser des dommages et intérêts à Derussy. Dès l'an VIII, donc, le tulle ordinaire pouvait être fabriqué librement sur les métiers de bas de la manufacture de Lyon, et le commerce et la vente de cette étoffe pouvaient être pratiqués sans empêchement. En l'an IX, le fabricant Claude Bonnard, demeurant au 164, rue Touret, chercha à imiter le tulle double, fond dentelle, noué, des Anglais, et à le surpasser. Plusieurs métiers de ses ateliers se trouvaient en activité lorsque le ministre de l'Intérieur Jean-Antoine Chaptal accompagna Napoléon Bonaparte aux Comices de Lyon au mois de nivôse an X. Claude Bonnard soumit au ministre un Mémoire, présenté au bureau des Arts et Métiers de Lyon le 5 pluviôse an X, dans lequel il détaillait les avantages de son invention. Mais les échantillons de tulle de Bonnard présentaient le défaut des mauvaises filatures et pour atteindre à plus de finesse et de blancheur de la maille, il s'associa aux frères Gensoul, d'abord, à Bagnols (Gard), puis aux filatures Rocheblave, à Alais (Gard) et Savin et Salle, à Anduze (Gard), et enfin Jourdan, à Ganges (Hérault). C'est à Ganges également qu'il fit forger et fabriquer ses métiers à bas pour obtenir le degré de finesse qu'il espérait. À aucun moment, Claude Bonnard n'avait songé à déposer un brevet, car il souhaitait faire profiter l'industrie nationale de ses améliorations et de ses découvertes. Mais Jolivet et Cochet espéraient recouvrir le privilège de la fabrication des tulles que leur conférait le brevet. Demander un brevet sous leur nom était impossible après leurs déboires. Ils convainquirent donc les fabricants Jourdan père et fils de se présenter comme les inventeurs de l'étoffe fond dentelle noué, ainsi que des moyens d'exécution de Ganton, avec quelques changements. Le 27 messidor an X, la maison obtint un brevet d'invention, et par suite le privilège exclusif de fabriquer et de débiter l'étoffe fond dentelle en soie, ou tulle, sans expliquer si elle était à maille fixe ou à maille nouée. Le 10 prairial an X, ils obtenaient un brevet pour la fabrication des tulles mailles fixes, copiés des anglais. Forts de ces deux brevets, ils cherchèrent à présenter les autres fabricants de tulle comme des contrefacteurs. Claude Bonnard réagit en adressant un rapport au ministre de l'Intérieur Jean-Baptiste Nompère de Champagny. Il l'accompagna d'un acte de notoriété, enregistré par le notaire Jean-Baptiste Masson le 26 avril 1806 et au Tribunal civil le 3 mai suivant, signé par la plupart des marchands brodeurs de Lyon. Les autres fabricants de bas enregistrèrent également un acte de notoriété auprès de Masson le 28 avril de la même année. Comme celui des marchands brodeurs, cet acte affirmait que le tulle fond dentelle noué inventé par Bonnard était fabriqué librement depuis six ans à Lyon. À l'Exposition des produits de l'industrie française, deux fabricants de tulle lyonnais ont été distingués par le jury pour la section IV « Tulle et crêpe » : il s'agissait de Claude Bonnard et de ses rivaux, Jolivet, Cochet et Jourdan. « M. Bonnard. Il a présenté des tulles à double nœud et à maille fixe qui ne coule ni à sec ni au blanchissage ; ils peuvent être lavés sans se gonfler, et deviennent même plus beaux que du premier blanc. M. Bonnard peut faire dans le tissu des variations susceptibles de produire des dessins agréables : les qualités de son tulle tiennent aussi à une perfection qu'il a introduite dans la préparation de la soie. Le jury lui décerne une médaille d'argent de première classe. Le jury arrête de faire mention honorable de MM. Jolivet, Cochet et Jourdan qui ont exposé du beau tulle à double nœud. » Le 19 décembre 1806, Claude Bonnard obtint un brevet d'invention de quinze ans « pour des perfectionnements apportés au métier à bas, qui le rendent propre à fabriquer le tulle uni et façonné, dont la maille est nouée comme dans le tulle anglais. » Après la récompense à l'Exposition des produits de l'industrie française de 1806, Claude Bonnard s'est appliqué à perfectionner la qualité de ses tulles. Il participe à l'Exposition suivante, en 1819. Le Rapport du jury central souligne le rôle qu'il a joué dans le développement de l'industrie du tulle à Lyon (p. 57-58) : « Section IV. Crêpes et Tulles. À l'époque de l'exposition qui eut lieu en l'an 10 (1802), on ne fabriquait encore en France que du tulle à mailles coulantes. M. Bonnard, de Lyon, exposa, en 1806, des tulles à double nœud, à mailles fixes, fabriqués sur un métier que lui-même avait imaginé en perfectionnant le mécanisme du métier à faire le tricot à mailles fixes. On a été longtemps sans pouvoir égaler les tulles fabriqués à l'étranger, parce que le métier dont on vient de parler n'était pas connu, et parce qu'on n'avait pas la soie de Chine convenable sous le rapport de la blancheur, de la finesse et de l'égalité du brin. On doit au même artiste d'avoir surmonté cette seconde difficulté, en perfectionnant la filature de la soie sina. Pour être employée à la fabrication du tulle, cette soie n'a besoin que d'être montée ; M. Bonnard est parvenu à lui donner cet apprêt par la même opération qui la tire du cocon. On a déjà eu occasion de dire jusqu'à quel degré de finesse il est parvenu à la filer. Ses travaux ont eu tout le succès qu'on pouvait désirer ; la fabrication du tulle est actuellement établie à Lyon avec une grande supériorité. La ville de Lyon et ses environs, dit le jury départemental, qui réunissent plus de deux mille métiers de tulle en activité, sont devenus le lieu presque exclusif de la fabrication de ce tissu, soit pour la perfection du travail, soit pour la modicité du prix. C'est pour avoir rendu ces services que M. Bonnard a été présenté, en vertu de l'ordonnance du 9 avril 1819, comme l'un des artistes qui ont le plus contribué aux progès de l'industrie. (...) MM. Bonnard père et fils, de Lyon. Leur fabrique fut distinguée à l'exposition de 1806, où elle obtint une médaille d'argent. Elle a présenté, en 1819, des crêpes et des tulles. Ces tissus sont faits avec le plus grand art : le tulle a été l'objet de l'admiration du public, par la régularité de ses mailles et par sa finesse presque aérienne. Le jury se fait un devoir de déclarer que la fabrique de MM. Bonnard père et fils est toujours très digne de la médaille d'argent qui lui fut décernée en 1806. » Cette même année 1819, Nicolas Tissier, dans son Discours d'inauguration du cours de chimie de l'École royale des Beaux-Arts de Lyon, lu dans la salle de chimie le 1er mai 1819, suivi du Discours d'ouverture du cours de chimie, lu le 2 mai même année, publié à Lyon (p. 86-89), résume ainsi l'introduction du tissage du tulle à Lyon, ses développements rapides dans la ville et le rôle joué par Claude Bonnard : « Le tulle est une dentelle fil ou soie qui n'est point recouverte d'entoilage ou de broderie et ne présentant à l'œil que le filet pur et simple. Le tulle se fabriquant sur le métier à bas nous vient d'Angleterre (English las [sic]), en français filoche ou filet, à Lyon, filoche ou tulle de Lyon. Ce tulle n'est point noué, mais simplement maillé, et la maille est susceptible de couler. M. Tholosan Amarante, introducteur des Ambassadeurs à la Cour de France, envoyé en mission en Angleterre, introduisit ce tulle en France, et Mgr. le duc d'Orléans en fit déposer des échantillons dans son Conservatoire d'arts et métiers en 1787. Ce tissu fut ensuite exécuté par un Lyonnais nommé Ganton, artiste très distingué qui se trouvait alors à Paris, et cette étoffe sortit de ses mains plus perfectionnée (celle d'Angleterre était alors très grossière). Le prince récompensa M. Ganton, et cette nouveauté fut rendue publique. Cependant, personne n'appréciant ce genre, ne songeait à en tirer parti. Une visite que fit au Conservatoire du Duc, M. Jolivet, marchand bonnetier de Lyon, tira cet art de l'oubli ; muni des plans et des modèles nécessaires pour la réussite qui fut complète, il prit fort adroitement en 1791 un brevet d'invention qui lui fut, en l'an 7, contesté par M. Joseph Derussy ; le brevet fut annulé. Depuis cette époque, cette espèce de tulle s'est tellement naturalisée dans notre ville, et l'industrie lyonnaise a été poussée si loin, qu'aucune ville de France, ni même de l'Europe, n'a pu entrer en concurrence avec elle. Le premier tulle qui s'est fait à Lyon a été vendu 80 francs l'aune quarrée ; mais la fabrication une fois répandue a trouvé tant de facilité qu'un ouvrier qui, dans les premiers temps, ne pouvait faire qu'une demi-aune par jour, est parvenu à en achever trois aunes. Le prix actuel est de trois francs et au-dessous. Depuis son importation, cette branche d'industrie a procuré à des familles des fortunes considérables, et aucun article n'a tant valu à Lyon. Il est actuellement en souffrance. Pendant que nous ne faisions que du tulle à maille coulante, les anglais fabriquaient le tulle à maille fixe ou nouée ; on le crut d'abord le même ; mais en l'an 7, Mme Granger arrivant de Londres avait apporté un voile de tulle anglais qu'elle eût la complaisance de prêter à M. Bonnard, pour l'examiner ; cet artiste exercé reconnut bientôt la différence, s'aida des instruments d'optique pour découvrir l'entrelacement du nœud et mettant sur le champ la main à l'œuvre, le 5 pluviôse an 10, il présenta au ministre de l'intérieur la première pièce de tulle noué qui était faite en France ; et constamment occupé de son perfectionnement jusqu'à ce jour, il vient de pousser la fabrication de cette étoffe à un tel degré de finesse que personne ne peut le surpasser. C'est ce qu'on certifié le jury central de France, et la récompense du Gouvernement. Bien plus, la finesse de ce même tulle faisait douter de la possibilité de supporter la broderie ; un dessin à l'aiguille sur ce tissu, exposé à la Chambre de Commerce de Lyon, lève tous les doutes. Le nombre des métiers de tulle a été porté à huit mille, et ils occupent trente mille individus, tant pour la préparation des matières premières, que pour la fabrication, broderie et autres accessoires. » Parallèlement au développement de l'industrie du tulle à Lyon, on assiste à la renaissance des ateliers de broderie dans la ville. L'activité des brodeurs avait été particulièrement éprouvée par la Révolution française, et elle avait presque entièrement disparue avec le Siège de la ville en 1793. Encouragée par la Chambre de Commerce de Lyon et par le gouvernement, cette activité connaît un renouveau considérable à partir de 1800. L'Indicateur de Lyon, en 1810, mentionne près de cinquante marchands brodeurs dans la ville. Parmi les maisons les plus célèbres figurent Placy et Cie. Le musée des Tissus conserve un livre de patrons de cette maison (inv. MT 2015.0.1), ainsi que des échantillons de broderie, l'un pour une robe exécutée pour l'impératrice de Russie Marie Feodorovna en 1801 (inv. MT 20852), et l'autre, pour bas d'une robe brodée pour la cour, réalisée en 1807 (MT 20853). L'atelier de Jean-François Bony est aussi l'un des plus réputé. À l'Exposition des produits de l'industrie française de 1806, il obtient une médaille d'argent de seconde classe pour « des broderies remarquables par leur beauté », tandis qu'une autre Lyonnaise, la veuve Vitte, reçoit la même distinction pour avoir « imaginé un nouveau point de broderie propre à donner plus de correction à ce genre de travail. » Jean-François Bony exécute plusieurs robes de cour pour l'impératrice et son entourage, comme en témoigne, par exemple, le projet d'une robe brodée pour Caroline Murat contenu au folio 11 du carnet de dessins conservé au musée des Tissus (inv. MT 27638). Après 1814, il est toujours sollicité par le nouveau gouvernement. À l'occasion de la réception à Lyon de la duchesse d'Angoulême, Jean-François Bony est honoré par Madame Royale d'une visite à son atelier. Il s'engage à lui remettre dans un délai de six semaines « une robe de cour à grande queue sur une belle Levantine rose brodée argent sur le dessin composé de fleurs naturelles liées par des ornements recherchés » et « une robe ronde sur tulle rayé dont le dessin sera composé de roses, de renoncules et autres fleurs exécutées dans les couleurs naturelles en soie unie, le fond de la robe sera à colonnes et petits bouquets brodés argent fin ; au bas de la robe sera un falbala brodé aussi en argent. Prix convenu : 3000 francs. » Lors du séjour à Lyon, en 1816, de Marie-Caroline de Bourbon-Siciles, à l'occasion de son mariage avec Charles-Ferdinand d'Artois, duc de Berry, Jean-François Bony est encore sollicité puisqu'il réalise une « robe longue sur satin blanc, brodée richement en or fin », tandis que la maison Placy et Cie exécute deux robes qui sont remises à la duchesse avec la corbeille offerte par la Chambre de Commerce de la ville. La première est une « robe tulle, mailles fixes ; le fond de la robe glacé argent fin, la bordure formée d'une guirlande de roses, brodées soie avec feuillage ; au-dessous de la guirlande, une broderie en argent mate, le bas de la robe terminé par une frange nuancée, la ceinture assortie à la robe, la doublure est en satin blanc » ; la seconde, « une robe tulle, mailles fixes, brodée soie blanche, le dessin composé d'une plante de muguet et de petites cloches, le fond de la robe à colonnes se réunissant dans le haut, composé d'un courant de cloches se liant dans le bas à la plante de muguet. » La duchesse de Berry, invitée à assister à un spectacle le soir même au Grand-Théâtre, choisit la première des deux robes de Placy pour paraître en public. Les brodeurs ont exploité toutes les possibilités offertes par le tulle à maille fixe produit à Lyon. Il a ainsi été employé découpé et appliqué en volants sur des manteaux de cour dans le goût du règne de Louis XVI (inv. MT 48994), appliqué en trompe-l'œil dans des compositions en soie nuancée (inv. MT 20852) ou en étoffe de fond, supportant un délicat décor brodé ton sur ton, en soie nuancée, en or ou en argent.  L'échantillon de tulle orné de broderie or témoigne de l'incroyable vitalité des industries textiles à Lyon, sous l'Empire. On connaît mieux la production des étoffes façonnées pour l'ameublement ou l'habillement. Mais la production textile était bien plus diversifiée dans la ville, comme le rappelle la Chambre de Commerce de Lyon au ministre de l'Intérieur, dans une lettre datée du 16 avril 1805 : « On distingue quatre branches principales dans la division que l'on peut faire de nos manufactures diverses : la première et la plus essentielle comprend nos fabriques en étoffes de soie ; la seconde se compose du tirage et traite des matières d'or et d'argent, de la guimperie par les procédés de laquelle on fait de ces matières des filés, de la passementerie qui emploie ces filés dans les galons et à laquelle appartient encore la rubannerie ; la troisième est la chapellerie ; la quatrième, la fabrication des bas et gants de soie en bonneterie et la fabrication des filoches [ou tulles]. » Maximilien Durand (fr)
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