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| - Ce fragment a été acquis en 1875 avec un ensemble d'étoffes médiévales de la collection du chanoine Franz Bock. Dès 1860, ce dernier avait déjà vendu d'autres fragments de la même tapisserie, qui sont aujourd'hui dispersés entre le musée national du Moyen Âge-Thermes et hôtel de Cluny à Paris (inv. Cl. 3053 ; acquis en 1860), le Victoria & Albert Museum à Londres (inv. 8229-1863 ; acquis en 1863), l'Österreisches Museum für angewandte Kunst de Vienne (inv. 741/4018). Un dernier fragment était conservé avant la Seconde Guerre mondiale au Museum für Kunstgewerbe de Berlin.
Les différents fragments conservés permettent d'apprécier le décor de cette tapisserie : sur un fond or alternent un registre de médaillons circulaires et un autre registre de médaillons en amande, formés par des bandes roses entrelacées. Les médaillons circulaires enferment un arbre stylisé de forme pyramidale ; les médaillons en amande, des tiges feuillues, en forme de candélabre. Des détails colorés animent la composition : rangées de perles blanches sur fond noir interrompant çà et là les rubans ou marquant la base des fleurons sur les tiges en candélabres, damiers bleus, rouge vif et jaunes à l'intérieur des fleurons, détails blancs et noirs dans les arbres en forme de pyramide et dans la tige centrale des tiges-candélabres. La chaîne rouge qui transparaît à travers l'or du fond fait ressortir, par l'unité chromatique qu'elle induit à l'ensemble du textile, ces touches colorées. Des analyses, effectuées sur cette chaîne rouge, ont montré que la soie avait été teinte à la garance (Rubia tinctoria), au kermès (Kermes vermilio) et à la cochenille de Pologne. Les filés métalliques sont constitués d'une lamelle organique dorée enroulée en Z autour d'une âme de soie jaune de torsion Z ou de deux bouts crème et jaune assemblés en Z.
Les fragments de cette étoffe appartiennent à un groupe de tapisseries de soie et d'or dont les caractéristiques techniques et iconographiques sont très homogènes : les exemplaires les plus connus constituent une partie de la doublure du manteau de couronnement dit « de Roger II » conservé à la Schatzkammer du Kunsthistorisches Museum de Vienne (inv. XIII 14). Une inscription brodée sur le manteau indique qu'il a été exécuté à Palerme en 1133-1134.
Ces tapisseries à fond d'or et décor structuré par des entrelacs de rubans, avec des arbres stylisés et, bien souvent, des oiseaux, des lièvres, des serpents ou des bêtes fantastiques, sont considérés comme des productions palermitaines de la fin du XIe siècle et du début du XIIe siècle. Un autre fragment de tapisserie comparable, provenant aussi de la collection Bock et acquis dans les mêmes circonstances, est conservé au musée des Tissus (inv. MT 22629). Cette étoffe a aussi été dispersée entre le musée de Cluny à Paris (inv. Cl. 3054), le Victoria & Albert Museum à Londres (inv. 8227-1863), le Museum für angewandte Kunst de Vienne (inv. 742/4019) et le Museum für Kunstgewerbe de Berlin (perdu). Il est cependant sans doute légèrement plus tardif (fin du XIIe ou début du XIIIe siècle), par comparaison, notamment, avec les orfrois décorant la chasuble dans laquelle avaient été enveloppés les restes de saint Antoine de Padoue lors de la translation de 1263.
Maximilien Durand (fr)
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