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  • En 1771, la Fabrique lyonnaise subit une nouvelle crise, dont les causes et les effets sont rappelés par le mémoire qu'adressent, en mars 1772, les maîtres ouvriers à Jean-Charles-Philibert Trudaine de Montigny (1733-1777), car « les cris et les gémissements continuels d'un corps d'ouvriers le plus considérable du Royaume [...] ne leur permettent plus de garder le silence. » Tous les « maux » qui accablent la Fabrique sont alors rappelés : les deuils successifs qui ont affecté les cours européennes, la trop grande quantité d'étoffes fabriquées à l'occasion du mariage du dauphin et restée invendue, la guerre dans les pays du Nord qui ferme les principaux débouchés, les progrès des manufactures étrangères que l'émigration des ouvriers de Lyon « fortifie et perfectionne tous les jours », les mauvaises récoltes qui augmentent le prix des soies..., autant de causes qui expliquent « une cessation presque générale dont la durée ne fut jamais si considérable en aucun temps » (Paris, Archives nationales, F121441). Philippe de Lasalle (1723-1804) est alors en train de perfectionner le métier qu'il a inventé et qui lui permet, tout en renouvelant le dessin, d'abaisser les coûts de production. Par ailleurs, il imagine de produire des meubles en cannetillé, brochés à plusieurs lats liés en taffetas, dont les trames de fond, peu visibles, sont en schappe de soie lattée de coton et les trames brochées en schappe, également, pour les couleurs les plus mates, afin de réaliser des étoffes à prix véritablement compétitifs. Le premier exemple de ce type de meubles est très probablement la tenture « aux Perdrix » (inv. MT 2882), qu'il est en train de tisser lorsqu'il invite, en 1772, les maîtres-gardes de Lyon à se rendre à son domicile, rue Royale, au premier étage, pour examiner le métier de son invention à semple mobile, permettant de produire aisément de grands rapports de dessin sur la hauteur d'une laize. Les deux semples amovibles divisent le décor en deux parties correspondant chacune à plus de cinquante centimètres d'étoffe. Les maîtres-gardes sont impressionnés par ce système et par cette « étoffe fond carrelé bleu, brochée soye, a plusieurs lats, dont le dessein contenoit soixante dizaines » (Paris, Archives nationales de France, F121444A, Procès-verbal dressé par les maîtres-gardes, 9 novembre 1772). Cette tenture a été livrée à Louis-Joseph de Bourbon, prince de Condé, pour le Palais Bourbon, et elle a été utilisée pour le Salon d'attente de Bathilde d'Orléans, duchesse de Bourbon, la fille du prince et l'épouse de Louis-Henri de Bourbon-Condé. En 1773, elle fut aussi livrée à l'impératrice de toutes les Russies, Catherine II. Elle fut utilisée pour le Boudoir au premier étage du Grand Palais de Peterhof. Cette même année 1773, Philippe de Lasalle livre aussi à l'impératrice une autre étoffe remarquable, la tenture dite « de Tchesmé » (inv. MT 2886), elle aussi réalisée grâce au métier à semple mobile au moyen de soie, de coton et de schappe. Le prix de cette tenture, consigné dans les Archives de la maison impériale (РГНА, Ф 468, оп. I. Д. 3888, 1773 г., л. 156/RGIA, F. 468, liste 1, n° 3888, 1773, p. 156), paraît, en effet, dérisoire (dix roubles cinquante kopecks par archine) par rapport au coût de la tenture dite « au Paon et au Faisan » (inv. MT 1278), livrée en 1778 pour vingt-cinq roubles l'archine. Cette capacité de Philippe de Lasalle à maintenir son activité durant la grande crise de 1771-1772 grâce à l'invention du semple mobile et à la production d'étoffes mélangées, en soie, coton et schappe, a peu été soulignée. Au début de l'année 1778, pourtant, Philippe de Lasalle fait rappeler l'état de ses travaux au Directeur général des Finances (Archives nationales de France, F121444A, 6 janvier 1778). Parmi les services qu'il a rendus à la Fabrique lyonnaise, il rappelle qu'« il a fait considérablement travailler les ouvriers de Lyon en étoffes pour meubles pour la Russie, ou il entrait très peu de soye, beaucoup de main d'œuvre et dont les fleurs s'exécutoient avec le rebus des cocons qu'il faisoit filer. » Il obtient peu de temps après une gratification de six mille livres, dont Jacques Necker l'informe dans une lettre datée du 13 juin, où il précise : « Je scais aussi que vous avés créé dans la partie des meubles une branche de Commerce qui dans des tems de cessation de travail a occupé un grand nombre d'ouvriers et que vous avés été autorisé à cette occasion par le Conseil a sortir des règles prescrites par les Reglemens de la Fabrique en vous assujettissant a une marque distinctive ; les remerciemens que vous ont faits en 1772 les syndics et Mrs Gardes de la fabrique de Lyon à l'occasion du portrait de Louis XV exécuté en étoffes dont vous avés faits présent à cette Comté prouvent jusqu'à quel point vous avés porté l'art du dessein et de la fabrication. » Necker s'est préalablement fait remettre un rapport (Archives nationales de France, F121444A) sur Philippe de Lasalle, dans lequel on apprend que le fabricant fut autorisé à « s'écarter des méthodes usitées de fabriquer les étoffes, en mettant une marque distinctive, pour laisser à son génie l'essort dont il avait besoin, et l'on a vu sortir de son pinceau des chefs-d'œuvre dans le genre d'étoffes pour meubles, en matière de laine, fil et bourre de soye qu'il faisait préparer à sa manière, ce qui a prodigieusement occupé de bras dans des temps mesme de cessation d'ouvrages et ses étoffes ont orné les Palais des Rois et ceux de l'impératrice de Russie qui a considérablement fait travailler la ville de Lyon dans cette nouvelle branche d'industrie. » Les livraisons de Philippe de Lasalle pour la Russie sont le résultat du cadeau que le fabricant a adressé à Catherine II, par l'intermédiaire de Voltaire, en 1771, de son portrait tissé en camaïeu, sur un médaillon rapporté par broderie dans un entour de fleurs, dont le musée des Tissus conserve un exemplaire (inv. MT 2869), et du même entour de fleurs contenant une scène allégorique célébrant la victoire de Tchesmé. Les deux tableaux tissés étaient accompagnés de vers composés par Voltaire, à la gloire de la souveraine, et brodés sur l'étoffe. Des commandes de meubles façonnés s'ensuivirent, et les livraisons de Philippe de Lasalle pour la Russie s'échelonnent en 1773, 1776, 1778 et 1780. La tenture  dite « à la corbeille de fleurs » ou « au panier fleuri » a fait partie de la livraison de l'année 1776, avec la tenture dite « de Crimée » (inv. MT 24437, mise en carte ; MT 1280, tenture) et celle dite « aux colombes » (inv. MT 29688). Elles ont toutes les trois décrites dans les comptes des commandes impériales, à l'occasion de leur inscription au Bureau du Kammer-Zahlmeister et coûtent, chacune, dix-huit roubles l'archine, soit près du double de la fameuse Tenture de Tchesmé. Trois cent quarante deux archines de la tenture  dite « à la corbeille de fleurs » ou « au panier fleuri » ont été enregistrés, soit environ deux cent quarante-trois mètres, pour un montant total de six mille cent cinquante-six roubles (« 342 аршина по белой же земле с разными шоловыми в кубах цветами с бантами и с фестонами широкого по 18 руб. аршин - всего 6156 руб. » ; Archives de Saint-Pétersbourg). La différence de prix entre la Tenture de Tchesmé et la Tenture au panier fleuri s'explique aisément. La Tenture de Tchesmé a été tissée dans une largeur de cinquante-cinq centimètres environ, alors que la Tenture au panier fleuri mesure près de soixante-dix-neuf centimètres de large. Il s'agit, dans les deux cas, de cannetillé brochés à plusieurs lats liés en taffetas, mais on a vu que les trames de fond de la Tenture de Tchesmé, comme celles de la Tenture aux Perdrix tissée la même année, étaient en coton et en schappe de soie, et que les trames brochées contenaient également une grande quantité de schappe. Dans la Tenture au panier fleuri, les trames de fond sont toutes en soie de belle qualité, beige, de même que les trames brochées, qui comportent vingt-deux couleurs (bleu foncé, un bleu réalisé avec un fil mouliné à trois tons, trois tons de jaune, quatre tons de rose, dont un réalisé avec un fil mouliné à trois tons, six tons de vert, dont un réalisé avec un fil mouliné à trois tons, deux tons de brun, un brun-violet, un parme, trois tons de gris), plus le blanc et le noir. Une même passée peut contenir jusqu'à quinze couleurs. Le décor présente deux branches de lauriers, nouées à leur base par des rubans qui se prolongent pour former, lorsque les laizes étaient raboutées par le tapissier, un large réseau losangé. Une guirlande de fleurs (pivoines, narcisses, oreilles d'ours et hibiscus blanc) est suspendue en feston aux branches de laurier. Chaque compartiment formé par les rubans est occupé par une corbeille en vannerie, qui contient un bouquet de pivoines, de roses, d'oreilles d'ours, de lilas, de tulipes perroquets et de pieds d'alouette. Près de la base de la corbeille reposent des roses coupées et des guirlandes d'oreilles d'ours. Enfin, des guirlandes de bleuets forment des chutes verticales entre les compartiments. Elles s'entremêlent avec les rubans et s'accrochent à la guirlande fleurie. Le rapport de dessin mesure soixante-dix-sept centimètres de large, soit un chemin, pour cent-dix-huit centimètres de haut. Il est exécuté, dans sa hauteur, au moyen de trois semples mobiles, correspondant à environ trente-neuf centimètres et demi de hauteur, soit soixante dizaines (ou six cents cordes, soit dix-huit ou dix-neuf passées par centimètre). La limite supérieure du premier semple correspond au chef de pièce qui est visible sur la laize du musée des Tissus, dans le haut de la pièce. Il permettait d'exécuter le nœud à la base des branches de laurier et ces deux dernières, au complet. Le deuxième semple concernait la guirlande de fleurs et le haut de la branche de pieds d'alouette, dans la corbeille. Le troisième semple permettait de réaliser la corbeille elle-même. La Fondation Abegg, à Riggisberg, conserve un exemplaire de la Tenture au panier fleuri qui présente un chef de pièce en partie inférieure (inv. Nr. 5287). Il correspond à la fin du troisième semple. Les archives de la maison Tassinari et Chatel conservent un autre exemplaire de la tenture (inv. 860), ainsi que le Metropolitan Museum de New York (inv. 33.119, dépouille de siège) et le Detroit Institute of Arts (inv. 48.18). Philippe de Lasalle met ici en œuvre le nouveau type de décor à grand rapport de dessin qu'il a inventé et que lui permet le semple mobile. Le premier exemple de ce type de décor est probablement la Tenture aux perdrix, conçue en 1771-1772, suivie de près par la Tenture de Tchesmé, puis, conçues en 1775-1776, la Tenture au panier fleuri, la Tenture de Crimée et la Tenture aux colombes. Ces tentures dessinent toutes un majestueux réseau losangé, enfermant le motif principal destiné à être répété en quinconce sur les parois. Chaque laize contient ainsi ce motif, en son centre, et la moitié des côtés du losange, formé par des rubans ou des guirlandes fleuries, ainsi que les angles tangents des losanges supérieur et inférieur, marqués par des compositions végétales, couronnes ou rameaux. Sur la Tenture au panier fleuri, les fleurs représentées figurent toutes, déjà, dans l'entour de fleurs du Portrait de Catherine II, envoyé à l'impératrice en 1771, entour de fleurs qui forme également le cadre du Portrait de Louis XV (inv. MT 45306 ; le musée des Tissus conserve aussi la mise en carte de cet entour de fleurs, inv. MT 1701), de celui de Louis-Stanislas-Xavier, comte de Provence et de celui de Marie-Joséphine-Louise de Savoie, comtesse de Provence (inv. MT 45307). Elles y sont réunies à d'autres variétés de fleurs, disposées en couronne nouée par un gros ruban. Les commandes de la Russie ont permis à Philippe de Lasalle de surmonter les difficultés de la crise de 1771-1772. Même s'il évoque les difficultés qu'il rencontre, en 1773, pour monter ses métiers, il obtient pour son invention une gratification et une pension. Pour le sacre de Louis XVI, le 11 juin 1775, il reçoit une commande pour les ornements liturgiques de la cérémonie. Il est invité par Emmanuel-Félicité de Durfort, duc de Duras, pair et maréchal de France (1715-1789), à être présent quand l'éloge et la présentation en sont faits au Roi, le 20 mai 1775. Le 29 novembre 1775, il est anobli et reçoit le Cordon de l'Ordre de Saint-Michel, ordre de chevalerie récompensant les savants, écrivains et artistes. Le lendemain, 30 novembre 1775, Philippe de Lasalle perd son fils unique, Étienne (né le 13 septembre 1749 ; son épouse, Élisabeth Charrier lui a par ailleurs donné cinq filles, Marie-Élisabeth, Didière, Marie-Françoise, Suzanne et Élisabeth-Sophie). Malgré cette épreuve, les affaires de Philippe de Lasalle sont florissantes. Les commandes pour la Russie contribuent à l'épanouissement de ses affaires, comme en témoigne une lettre du 11 mai 1775 où Philippe de Lasalle annonce qu'il a « trente-neuf métiers ou méchaniques (sic) qui travaillent. » Notons que l'autoportrait conservé au musée des Arts décoratifs de Lyon (inv. MAD 2274), où Philippe de Lasalle apparaît coiffé d'une perruque, en habit bleu et chemise à col de dentelle, en train d'arranger des fleurs à sa table de travail, entouré des attributs de l'artiste, date précisément de cette période où il rencontre plusieurs succès importants, puisqu'il est daté de 1776.  Maximilien Durand (fr)
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